« Les partenaires sociaux européens ont su montrer l’utilité d’un dialogue social sectoriel inclusif dans la gestion de la crise provoquée par la pandémie ». Telle est la principale conclusion du rapport intitulé « Union sacrée ? Les partenaires sociaux sectoriels face à la crise du Covid-19 en Europe », publié par l’Institut syndical européen (ETUI)[1]. L’étude entend évaluer l’utilité et le rôle concret du dialogue social européen[2] dans ce contexte sanitaire exceptionnel. Pour ce faire, le rapport s’appuie sur l’analyse de la base de données de l’ETUI contenant des textes conjoints[3] du dialogue social au niveau sectoriel dont le contenu principal est lié à la pandémie, combinée avec la conduite des entretiens qualitatifs menés avec des acteurs syndicaux et patronaux[4].
- Le dialogue social européen sectoriel en forte intensité
Selon l’étude, l’année 2020 constitue l’année qui a donné lieu à la plus grande activité des partenaires sociaux sectoriels. 62% des textes adoptés en 2020 (soit 51 textes sur 82) ont eu pour objet principal la pandémie de Covid-19, ses conséquences sur le secteur, et les conséquences des mesures de prévention prises dans les États membres. Il en ressort que la majorité de ces textes a été adoptée au plus fort de la première vague pandémique.
Un nombre important de secteurs a été impliqué dans la production de ces textes (30 secteurs sur un total de 43 présents dans la base des données) représentatifs de tout type d’activité économique, à savoir le transport, la pêche, la culture, l’horeca, l’agriculture, la métallurgie, l’éducation, etc.
- Une préoccupation commune des partenaires sociaux sectoriels sur les questions de santé-sécurité
En tête des priorités les plus partagées par les partenaires sociaux en 2020 (22 secteurs sur 30) figurent les recommandations et mesures sanitaires visant à assurer la santé et la sécurité dans les entreprises (équipements de protection, formation aux mesures de prévention, etc.). L’étude révèle que les secteurs étant plus en contact avec le public, tels que l’horeca, le transport, le travail intérimaire, l’éducation, les administrations etc., perçoivent ces mesures en tant que « condition sine qua non pour assurer la relance ou la continuité de leurs activités ».
Le soutien financier aux entreprises (aides financières, fiscales, programmes de financement ou d’investissements pour le secteur public), constitue la deuxième priorité partagée par 19 secteurs. Il s’agit selon le rapport « d’éviter les faillites en aidant (temporairement) les entreprises à traverser la période de récession ».
La troisième priorité partagée par de nombreux secteurs (16) est la protection des emplois (chômage temporaire, compléments de revenus, congés maladie, accès aux gardes d’enfant, etc.). L’auteur remarque à ce point une insistance inhabituelle des partenaires sociaux de nombreux secteurs pour inclure les travailleurs « atypiques » ou « périphériques » dans l' accès au chômage temporaire ou aux prestations de la sécurité sociale. "La pandémie semble à cet égard avoir mis en lumière une foule de travailleurs précaires ou « périphériques » pourtant essentiels à l’activité économique", conclut l’auteur.
La liste des principales priorités partagées est complétée par : les demandes de reconnaissance de certains secteurs comme « essentiels » (par 13 secteurs), l’accès aux fonds UE et fonds de relance nationaux (12 secteurs), le développement et renforcement de la formation et les qualifications de travailleurs à l’utilisation des outils numériques ainsi qu’aux nouveaux modes d’organisation du travail (10), l’harmonisation européenne des protocoles sanitaires (8), les mesures de marché dans la perspective de la relance des activités économiques (8), la continuité des chaînes d’approvisionnement (7), la coordination des mesures nationales en ce qui concerne le franchissement des frontières (6) et enfin les assouplissements de certaines réglementations spécifiques pour la certification, pour la validité de licences ou de brevets, pour les périodes de formation ou de recyclage obligatoires (6).
Vous trouverez, ci-après, l’integralité du rapport de l'ETUI.
https://www.etui.org/fr/publications/union-sacree
[1] Christophe Degryse, Union sacrée ? Les partenaires sociaux sectoriels face à la crise du Covid-19 en Europe, ETUI, avril 2021.
[2] Encadré par les articles 151 à 156 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) le dialogue social européen englobe les discussions, les consultations, les négociations et les actions communes entreprises par les organisations représentant les partenaires sociaux (les employeurs et les salariés). Il revêt deux grandes formes: un dialogue tripartite avec les autorités publiques et un dialogue bipartite entre les organisations syndicales et les employeurs européens. Ce dialogue se déroule au niveau interprofessionnel et au sein des comités de dialogue social sectoriel.
[3] Il s’agit de documents adoptés conjointement par les organisations représentatives au niveau européen des employeurs et des travailleurs des secteurs concernés. En janvier 2021, cette base de données contient, quelque 1 016 textes conjoints résultant de la négociation sociale dans 43 secteurs d’activité économique, depuis 1978. Cette base est en partie alimentée par la base de données de la Commission européenne et en partie par les chercheurs de l’ETUI eux-mêmes.
[4] Vu le grand nombre de secteurs à analyser, la recherche a été limitée au recueil, de manière éparse, des points de vue de certains membres de fédérations syndicales européennes pour mieux comprendre la dynamique des acteurs.