Un salarié peut contester le défaut d’habilitation des délégués syndicaux signataires d’un accord par le biais de l’exception d’illégalité

Syndicats

- Auteur(e) : Chela BINDA

La Chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 31 janvier 2024, juge qu’un salarié peut contester le défaut d’habilitation des délégués syndicaux signataires d’un accord collectif par le biais de l’exception d’illégalité.

En l’espèce, un salarié en CDI à temps partiel voit ses horaires de travail modifiées suite à la conclusion d’un accord d’entreprise du 1er juillet 2010. Il est licencié le 29 mars 2016. Le salarié conteste son licenciement et demande la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein, en invoquant par voie d’exception l’illégalité de l’accord d’entreprise, car les délégués signataires n’ont pas fait l’objet d’une nouvelle désignation à la suite des élections.

La Cour d’appel de Lyon, dans un arrêt rendu le 7 janvier 2022, a requalifié le contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein, et a condamné la société à verser au salarié les sommes afférentes en accueillant l’exception émise dans le cadre de l’accord d’entreprise. La société se pourvoit alors en cassation. Elle soutient que les moyens invoqués dans le cadre du recours par voie d’exception d’illégalité d’une clause de convention, ou d’un accord collectif, doivent uniquement porter sur le fond, et non la forme, c'est-à-dire la procédure de négociation et de signature.

Les juges devaient répondre à la question suivante : Un salarié peut-il par voie d’exception, contester la légalité de la procédure de négociation et de signature d’un accord collectif ?

La Chambre sociale rejette le moyen formulé par la société, au motif que le salarié "peut invoquer le non-respect des conditions légales de validité de l’accord collectif, relatives notamment à la qualité des parties signataires, telles que prévues, pour les accords d'entreprise ou d'établissement, par les articles L. 2232-12 à L. 2232-14 du code du travail". En l’espèce, la qualité des parties signataires pouvait donc bien être contesté par le salarié. Il s’agit là d’une solution inédite qui élargi les possibilités du recours qu’est l’exception d’illégalité pour le salarié, suite à sa consécration par le Conseil Constitutionnel[1].

Cass. soc, 31 janvier 2024, nº 22-11.770

 

[1] Conseil Constitutionnel, Décision n°2018-761 du 21 mars 2018