Les affections qui résultent d'une exposition à des risques psychosociaux d'origine professionnelle pourraient-elles être bientôt reconnues en maladies professionnelles? Dans une proposition de résolution du groupe socialiste au Sénat, il est préconisé que le législateur se saisisse "par humanité et par pragmatisme" de la "problématique sociale, économique et humaine" que représente "le phénomène du mal-être au travail".
Les sénateurs constatent dans ce texte que "les initiatives parlementaires ont été relativement peu nombreuses" dans ce domaine, alors même qu'une pléthore de rapports ont abordé cette question, qu'une multitude d'acteurs (universitaires, scientifiques, professionnels de santé, acteurs du monde de l'entreprise ...) se sont attachés à "mieux appréhender les symptômes et maladies pouvant témoigner d'un mal-être évident au travail" et que la jurisprudence a élaboré tout un corpus jurisprudentiel "afin de mieux protéger la sécurité et la santé des travailleurs, et renforcer les obligations des employeurs en la matière".
Ce paradoxe est d'autant plus injustifiable que "l'organisation et les méthodes de travail se sont foncièrement transformées", notamment du fait de la globalisation financière et de la mise en concurrence mondiale des entreprises, contribuant à créer "un climat anxiogène" et un "sentiment d'insécurité" dans le monde du travail, jugent les sénateurs.
Dans ces conditions, le législateur a le devoir de "prendre en considération les évolutions ayant trait à l'organisation, aux méthodes de travail et à la gestion des ressources humaines afin de mieux protéger les droits et la santé des travailleurs" estiment-ils, en rappelant au passage d'une part que la sauvegarde de la santé des travailleurs est un droit fondamental, garanti par la Constitution, et d'autre part que l'employeur a une obligation de sécurité de résultat en matière de prévention des risques professionnels, "y compris des risques psychosociaux".
Dans ce cadre, ils appellent les pouvoirs publics et les acteurs sociaux à "réfléchir aux modalités qui permettraient une reconnaissance en maladies professionnelles des affections résultant d'une exposition à des risques psychosociaux d'origine professionnelle, et qui se caractérisent notamment par un état de stress post-traumatique, d'épuisement manifeste, par une dépression ou par des complications somatiques spécifiques".
Les sénateurs critiquent, de surcroît, la situation actuelle consistant à ce que "la branche maladie prenne en charge des affections qui découlent de la réalisation de risques psychosociaux d'origine professionnelle, alors que la branche AT-MP, financée à 97% par les cotisations patronales, semble plus légitime au regard de la nature" de ces risques.
Ils préconisent, par ailleurs, en présence d'un projet de restructuration "la réalisation systématique d'une étude d'impact sur les risques psychosociaux d'origine professionnelle", qui devra par la suite être transmise au comité d'entreprise, au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, aux délégués du personnel.
Ils invitent, enfin, les acteurs de l'entreprise à "se saisir davantage de l'enjeu que représente la prévention des risques psychosociaux d'origine professionnelle". Ce qui passe notamment par l'intégration de la prévention de ces risques dans la formation des professionnels des ressources humaines.