Le basculement du modèle traditionnel d’entreprise reposant sur une double unité de lieu et de la direction vers un modèle d’entreprise « éclatée » (via la filialisation, la sous‐traitance, l’appartenance à une entreprise multi‐établissements ou à une UES) extériorise non seulement les responsabilités en matière d’emploi et de conditions de travail, mais reconfigure aussi la représentation collective. Par ailleurs, le nouveau cadre posé par les ordonnances de 2017, renouvelle la question de l’articulation des espaces de régulation.
Partant de ces constats, le rapport du Centre d'Économie de la Sorbonne (CES), réalisé dans le cadre d'un appel à projets de la Dares[1], cherche à rendre compte des formes de représentation collective et des niveaux de dialogue social selon l’inscription des établissements dans les rapports de dépendance, de nature économique, organisationnelle ou encore financière, rapports observés dans les relations de sous‐traitance, de filialisation ou encore dans le cas d’entreprises multi‐sites. Plus précisément, les chercheurs visent à analyser comment s’articulent les instances représentatives du personnel à la structuration des organisations de travail « éclatées », à quels niveaux de cette structure les négociations se réalisent et comment les représentants du personnel parviennent‐ils à des accords.
Pour ce faire, l’étude combine une exploitation des données statistiques issues de l’enquête nationale sur les relations professionnelles et les négociations en entreprise (REPONSE), et une analyse de six enquêtes monographiques.
Dans une première partie, les chercheurs décrivent et quantifient les différentes formes d’éclatement (preneur d’ordres versus donneur d’ordres selon l’intensité de la sous‐traitance et le type d’activités sous‐traitées, appartenance à un groupe, à une entreprise multi‐établissement et à une UES) et les instances représentatives du personnel qui s’y déploient.
Ensuite, la deuxième partie s’appuie sur les enquêtes monographiques pour saisir les contours de l’entreprise « éclatée » et analyser comment s’y structurent les relations professionnelles selon les formes d’interdépendances économiques et financières qui les relient aux autres unités économiques.
Enfin, dans une troisième partie, les chercheurs font une analyse transversale des enseignements de ce travail de terrain.
Vous trouverez, ci-après, l’intégralité du rapport du CES-Université Paris 1, Entreprise « éclatée » et périmètre de la représentation collective, juin 2021.
[1] Appel à projet de la Dares lancé en décembre 2017 portant sur « Les relations de travail dans un contexte de réformes institutionnelles : post‐enquêtes et exploitations secondaires » afin d’interroger : la redéfinition des espaces de la régulation des relations de travail à l’aune des transformations des organisations productives ; la notion de dialogue social à travers la confrontation de la réalité des relations entre employeurs et salariés sur les lieux de travail avec le modèle de dialogue social préconisé par les récentes réformes ; la place de la négociation d’entreprise dans la régulation des relations de travail et comme source de construction des normes ; le processus de structuration des institutions représentatives du personnel et leur fonctionnement ; les relations de travail dans les moyennes et petites entreprises où, faute de représentants des salariés, les règles se construisent entre référentiels extérieurs (la branche, la loi).