Réforme des retraites/financement : un rapport sénatorial préconise la recherche de nouvelles recettes.

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- Auteur(e) : Hakim EL FATTAH

Rapport d'information de Mme Christiane DEMONTÈS et M. Dominique LECLERC, fait au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale - Sénat, 18 mai 2010.

Alors que le gouvernement semble privilégier la piste du report de l'âge légal de départ à la retraite, le Sénat, par le biais de la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale* estime que "aucun paramètre ne permettra à lui seul d'assurer la couverture des besoins de financement actuels et à venir, d'autant que certaines mesures ne produiront d'effets tangibles qu'à moyen ou long terme". D'où la nécessité pour les rapporteurs de la Mission de prendre en compte l'ensemble des leviers disponibles.

Afin de rétablir l'équilibre financier des régimes de retraites, les sénateurs écartent d'emblée la baisse du taux de remplacement ou des pensions. La hausse de l'âge effectif de départ en retraite est "un élément important du redressement financier des comptes", mais "la recherche de nouvelles recettes doit évidemment être entreprise en explorant simultanément plusieurs pistes". La MECSS préconise ainsi :

- le redéploiement des cotisations d'assurance chômage dès que le niveau du chômage le permettra, ce qui pourrait être le cas au milieu des années 2010 selon le Conseil d'orientation des retraites;

- l'élargissement de l'assiette des cotisations : annualiser le calcul des exonérations de cotisations sociales (gain estimé à 2 milliards); évaluer rigoureusement l'efficacité de chaque dispositif d'exonération ciblée; élargir l'assiette du forfait social qui n'affecte d'une partie des "niches"; augmenter le taux du forfait (gain attendu : 1,2 milliard pour un relévement de 4% à 10%); accroître la taxation spécifique applicable aux stock-options et actions gratuites; revoir la taxation des indemnités de rupture et le régime des retraites chapeau;

- la mobilisation de ressources nouvelles : examiner les avantages fiscaux et sociaux spécifiques aux retraités en étudiant la possibilité d’aligner la CSG des retraités imposables (pour préserver les petites retraites) sur celle des actifs

(gain attendu : 2 milliards) ; accroître les prélèvements sociaux sur les revenus du capital (gain du relèvement d’un point du taux global de ces prélèvements : 1,1 milliard) ; création d’une contribution additionnelle à l’impôt sur les hauts revenus ou sur les sociétés. En revanche, la MECSS estime que les pistes parfois évoquées de la cotisation sur la valeur ajoutée ou de la TVA sociale "comportent certes des avantages mais surtout des inconvénients".

-le traitement conjoint de la politique de l'emploi et des retraites, en agissant d'abord sur la pénibilité du travail qui bien que "ses effets sur l'espérance de vie relève d'abord de l'organisation du travail et de la responsabilité des entreprises", constitue néanmoins "un paramètre à prendre en compte dans le cadre des retraites, surtout vis-à-vis des personnes qui ont déjà été exposés  à des facteurs de pénibilité"; ensuite la MECSS préconise une politique active en faveur de l'emploi des seniors "en mettant fin aux préretraites déguisées, en vérifiant que la rupture conventionnelle, qui connaît un grand succès, ne devient pas la nouvelle "trappe à seniors", et en encourageant une meilleure gestion des ressources humaines en fin de vie active; enfin, la Mission insiste sur la nécessité de faire de l'insertion des jeunes sur le marché du travail une priorité.

Au-delà du débat sur les mesures à prendre pour répondre à l'urgence financière, la mission sénatoriale appelle à "une modernisation durable des retraites". Et cela passe par l'harmonisation progressive des paramètres et règles de calcul, des rapprochements entre les régimes et le renforcement du droit à l'information des assurés.

 

 

* Afin de développer ses activités de contrôle, la commission des Affaires sociales du Sénat, présidée par Muguette Dini, a crée en son sein une mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss). Composée à la proportionnelle des groupes politiques représentés au Sénat, elle comprend dix membres dont l’ensemble des rapporteurs du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Elle est présidée par Alain Vasselle, en sa qualité de rapporteur général de la commission des affaires sociales.

Conformément à la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale (Art. L.O. 111-9 et L.O. 111-10 du code de la sécurité sociale), la Mecss a pour mission de suivre et contrôler l’application des lois de financement et peut procéder à l’évaluation de toute question touchant aux finances de la sécurité sociale.

Ses pouvoirs sont importants : elle peut procéder à toute audition qu’elle jugera utile ainsi qu’à des investigations sur pièces et sur place auprès des administrations de l’Etat et de la sécurité sociale ; elle peut également se faire communiquer tout renseignement ou document qu’elle estime nécessaire à son information. Les contrôles sont menés en associant le plus systématiquement possible des rapporteurs de la majorité et de l’opposition.