Réforme des régimes spéciaux de retraite : un bilan moins optimiste que prévu

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- Auteur(e) : Hakim EL FATTAH

Rapport du sénateur M. Dominique Leclerc du 15 novembre 2009.

Évoquée en filigrane dans la loi du 21 août 2003, la réforme des régimes spéciaux de retraite a été engagée en 2007 par les pouvoirs publics pour une mise en oeuvre au 1er juillet 2008¹ .

L'objectif de la réforme est d'harmoniser les principaux paramètres de droit et de calculs appliqués par les régimes spéciaux avec ceux mis en oeuvre dans la fonction publique. Elle prévoit l'augmentation progressive de la durée de cotisation, de 37,5 ans à 41 ans en 2016, pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Elle instaure l'indexation des pensions sur l'inflation à compter du 1er janvier 2009 et introduit une décote réduisant la retraite en cas de trimestre manquant à compter du 1er juillet 2010.

L'adoption de la réforme des régimes spéciaux a été subordonnée à l'instauration de mesures salariales de compensation actées dans le cadre des négociations d'entreprises.

Un rapport parlementaire exprime de fortes craintes quant au " fort potentiel de dépenses supplémentaires que représenteraient ces contreparties salariales"², et qui "viendraient grever les économies attendues de la réforme".

Selon les estimations et projections de la SNCF et la RATP, l'incidence financière des mesures d'accompagnement seraient importantes pour les années à venir :

- pour la RATP, la progressivité de la mise en oeuvre des contreparties salariales entre 2008 et 2015 conduira à un étalement des coûts pour atteindre 19 millions d'euros par an à compter de 2015.

- pour la SNCF, le coût des mesures d'accompagnement aurait été de 125 millions pour 2009, il serait de 146 millions pour 2010, il s'établirait à 162 millions et il atteindrait 171 millions en 2012.

Conséquence : le rapport souligne, à propos des économies escomptées de la réforme à la SNCF, que les gains à court terme seraient annulés à moyen terme³ . A la RATP, le rapport prévoit un surcoût jusqu'en 2015 suivi de faibles économies4.

Ces projections viennent mettre à mal les estimations du gouvernement qui a présenté la réforme des régimes spéciaux comme un facteur d'économie annuelle à long terme. En effet, il tablait sur 500 millions d'euros d'économies cumulées en 2012, dont 90% concerneraient la S.N.C.F et, dans une moindre mesure, la RATP.

 

¹ Voir les décrets d'application de la loi :

www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do

www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do

² Pour plus de détails, voir le rapport du sénateur M. Dominique Leclerc du 15 novembre 2009: www.senat.fr/rap/a09-103-3/a09-103-31.pdf

³ Selon le rapport, en moyenne, les perspectives d'économies seraient de l'ordre de 300 millions d'euros par an sur la période 2009-2030, ce qui représente 10 % de la subvention d'équilibre versée par l'Etat au régime. Le gain cumulé en 2030 dépasserait 6,5 milliards.

 Cependant, les avantages accordés aux salariés viendraient "grever" les économies dans une moyenne de 112 millions par an sur la période 2009-2030. En réalité, le gain moyen s'établirait donc à environ 200 millions par an.

4 Toujours selon le rapport, pour la RATP :

- de 2009 à 2014, la réforme engendrerait un surcoût qui atteindrait un pic en 2013 estimé à 2,7 millions d'euros. Durant cette période, les prestations versées seraient en effet plus élevées que ce qu'elles auraient été sans la réforme. Autrement dit, jusqu'en 2015, la réforme coûterait environ 2 millions d'euros supplémentaires par an, en raison des contreparties accordées ;

- c'est seulement à partir de 2015 que la réforme commencerait à produire des économies et encore, celles-ci seront faibles puisqu'elles n'atteindraient que 23 millions en 2020.