Prévention des situations de harcèlement moral : quel rôle pour le CSE ?

Qualité de vie au travail
Conditions du travail

- Auteur(e) : EvdokiA Maria Liakopoulou

« Ce n’est pas au comité social et économique de qualifier une situation de harcèlement moral. En revanche, il doit signaler toute situation de travail dégradée et demander des actions en conséquence », signale le cabinet d’expertise Secafi dans la nouvelle version du guide « Agir en cas de présomption de harcèlement moral », datant d’octobre 2022.

  • Recueil d’un signalement de harcèlement : entre réactivité et prudence

Le recueil d’un signalement de la part d’une présumée victime ou de la part d’un témoin, constitue, selon Secafi, « une étape cruciale ». C’est le moment de la libération de la parole et celui qui marque le point de départ d’une résolution de problème efficace.

Cela étant, le guide incite tant l’employeur que le CSE à « être à la fois réactifs et en capacité de prendre du recul ». « Réactif car le pire advient parfois alors que l’on a trop attendu. Et prendre du recul pour ne pas se laisser submerger par l’émotion, des points de vue irrationnels et/ou subjectifs », expliquent-t-ils. Pour ce faire, il faudrait privilégier, avant tout, le niveau collectif  et placer la situation de harcèlement signalée dans une « problématique plus globale qu’il conviendrait de traiter ».

Pour rappel :

Selon l’article L. 2312-12 du Code du travail, « le comité social et économique formule, à son initiative, et examine, à la demande de l'employeur, toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail, d'emploi et de formation professionnelle des salariés, leurs conditions de vie dans l'entreprise ainsi que les conditions dans lesquelles ils bénéficient de garanties collectives complémentaires ».

Suivant l’article L. 2312-9 du Code du travail, « dans le champ de la santé, de la sécurité et des conditions de travail, le comité social et économique [...] peut susciter toute initiative qu’il estime utile de proposer notamment des actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes définis à l’article L. 1142-2-1 du Code du travail. Le refus de l’employeur doit être motivé. ».

Selon ce dernier article, « nul ne doit subir d'agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».

  • Expertise en cas de présomption de harcèlement moral : un droit à ne pas négliger  

Le guide rappelle que le harcèlement présumé, entre dans le cadre d’une expertise à laquelle peut recourir le CSE  « lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement » (article L. 2315-94 du Code du travail).

Ledit dispositif accompagne le CSE dans la prise de recul et l’objectivisation des conditions de travail, tout en permettant d’identifier des actions visant à résoudre le problème et à prévenir sa future apparition.  

  • L’enquête paritaire : un moyen de traiter concrètement une situation de harcèlement moral

Le guide attire l’attention des représentants du personnel sur l’existence de deux voies possibles les permettant d’alerter sur une situation de harcèlement moral. Dans une démarche globale et collective, le CSE peut user de son droit d’alerte pour « danger grave et imminent » (DGI), tel que prévu dans l’article L. 4131-2 du Code du travail[1]. Toutefois, le CSE peut aussi s’appuyer sur l’article L. 2312-59 du Code du travail[2], « sans que soit activée nécessairement une procédure de danger grave et imminent ». Il s’agit d’un article « qui fait explicitement référence à la problématique du harcèlement », soulignent les auteurs.Bien qu’il comporte cette tonalite « plus individuelle », ledit article reste « tout à fait valable en vue de déclencher une enquête paritaire », concluent-ils.

 

[1] Selon cet article, « Le représentant du personnel au comité social et économique, qui constate qu’il existe une cause de danger grave et imminent, notamment par l’intermédiaire d’un travailleur, en alerte immédiatement l’employeur selon la procédure prévue au premier alinéa de l’article L. 4132-2. ».

[2] « Si un membre de la délégation du personnel au comité social et économique constate, notamment par l’intermédiaire d’un travailleur, qu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l’employeur. Cette atteinte peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel ou moral […]. L’employeur procède sans délai à une enquête avec le membre de la délégation du personnel du comité et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation […]. »

Vous trouverez ci-après, l’intégralité du guide de Secafi : Agir en cas de présomption de harcèlement moral. A l’attention des représentants du personnel. Agir pour l’amélioration des conditions de travail coll., Octobre 2002 (mise à jour).