L’interdiction au recours du travail de nuit ne porte pas atteinte à la liberté d’entreprendre

Qualité de vie au travail
Organisation du travail

- Auteur(e) : Chela BINDA

Le 21 juin 2023, la Chambre sociale de la Cour de cassation a rendu un arrêt dans lequel elle affirme que l’interdiction au recours au travail de nuit ne porte pas atteinte à la liberté d’entreprendre.

Dans les faits, un accord sur le travail de nuit a été signé entre la CFE-CGC, la CFDT et les sociétés de l’UES Monoprix le 11 décembre 2019. Le 7 février 2020, la CGT a saisi la juridiction civile afin de faire interdire l’application de cet accord et celle-ci prononce l’annulation de la convention ainsi que l’interdiction de recourir au travail de nuit sous peine d’astreinte.

Les sociétés de l’UES Monoprix décident de faire appel de ce jugement, débouchant sur une question prioritaire de constitutionnalité, visant à se demander si l’interprétation de la Cour de cassation de l’article L3122-1 en une interdiction absolue du recours au travail de nuit porte atteinte à la liberté d’entreprendre, prévue par la Constitution.

Pour rappel, l'article L3122-1 du Code du travail :

« Le recours au travail de nuit est exceptionnel. Il prend en compte les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et est justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale ».

Voici la question prioritaire de constitutionnalité qui était posée aux juges :

« La jurisprudence constante depuis 2014 de la chambre criminelle et de la chambre sociale de la Cour de cassation, retenant une interprétation de l'article L. 3122-1 (ancien article L. 3122-32) du code du travail, qui interdit de facto le recours au travail de nuit aux entreprises du secteur de la distribution et du commerce alimentaire s'agissant de l'ouverture au public de nuit, est-elle conforme à la liberté d'entreprendre qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ? ».

La Chambre sociale déclare la QPC irrecevable au motif que l’article L3122-1 a été déclaré constitutionnel en 2014 par le Conseil Constitutionnel[1] et la jurisprudence de la Cour de cassation n’a jamais modifié les « limitations encadrant le recours au travail de nuit ». Ainsi, l’interprétation n’ayant pas changé depuis, il est inutile de remettre en cause son caractère constitutionnel, et ce même pour la liberté d’entreprendre.

Cass. soc., 21 juin 2023, nº 23-40.007

 

[1] Décision n° 2014-373 QPC du 4 avril 2014 rendue par le Conseil constitutionnel