Le versement d’une prime de 13ème aux cadres peut être conforme au principe d’égalité de traitement : Cass. Soc. 26 septembre 2018, n°17-15.101 FS-PB

Non-discrimination
Égalité professionnelle F/H

- Auteur(e) : Khalida BENZIDOUN

Les faits :

Des salariés embauchés par la société COOPER SECURITE en qualité d’ouvriers et d’employés pont saisi les juridictions prud’homales aux fins d’obtenir le versement de ce qu’ils considèrent être une prime de 13ème mois accordée qui serait accordée aux seuls cadres.

 

La procédure :

La Cour d’appel de RIOM fait droit aux prétentions des demandeurs en affirmant que « la seule différence de catégorie professionnelle ne peut en elle-même justifier, pour l’attribution d’un avantage, une différence de traitement entre salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage ».   

Elle considère à cet effet que « l'employeur [n’a pas établi que] la différence de traitement instituée entre les cadres et les personnels non- cadres relativement au versement de cette prime qui serait justifiée par des raisons objectives, réelles et pertinentes »

L’employeur se pourvoit alors en cassation en invoquant le fait que les sommes litigieuses ne constituent pas une prime, mais d’une rémunération annuelle de douze mois versées sur treize mois.

 

La solution :

La chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel sans renvoi, pour violation du principe d’égalité de traitement, principe qu’elle énonce dans son visa général.

Il s’agit d’une cassation partielle.

 

La motivation :

La Cour de cassation confirme la solution dégagée par l’arrêt d’appel en ce qui concerne la qualification de prime de 13ème mois les sommes litigieuses, et ce quand bien – même elle apparaît « sous couvert de douze mois de salaire payés sur treize mois ».

Dès lors, dans la mesure où cette prime était versée aux seuls cadres, il appartenait à l’employeur de justifier cette différence de traitement entre les cadres et les non-cadres par « des raisons objectives, réelles et pertinentes ».

Toutefois, la Haute juridiction considère que « une prime de treizième mois, qui n'a pas d'objet spécifique étranger au travail accompli ou destiné à compenser une sujétion particulière, participe de la rémunération annuelle versée, au même titre que le salaire de base, en contrepartie du travail à l'égard duquel les salariés cadres et non-cadres ne sont pas placés dans une situation identique.

 

Les observations :

  • « En l’espèce, la prime de 13e mois n’avait pas été instituée par un accord collectif. C’est pourquoi les juges du fond ont appliqué le régime classique de justification des différences de traitement par une raison objective et pertinente, et non pas celui issu des arrêts du 27 janvier 2015 instaurant une présomption de justification des avantages conventionnels (Cass. soc. 27-1-2015 n° 13-22.179 FS-PBRI)[1] ».
  • La Haute juridiction met l’accent sur l’objet spécifique de cette prime, lui-seul permet de justifier une différence de traitement quant aux versement d’une prime de 13ème mois. « Il en serait allé autrement si la prime avait eu un objet spécifique étranger au travail accompli ou avait été destinée à compenser une sujétion particulière. Par exemple, le versement d’une prime de vacances ou d’ancienneté devrait ainsi respecter le principe d’égalité de rémunération [2]».

 

Vous trouverez ci-après l'arrêt du 26 septembre 2018 dans son intégralité.

 

 


 

 

[1] Guilhem POSSAMAÏ, Egalité salariale : verser un 13ème mois aux seuls cadres est licite », F. LEFEBVRE Actualités, 22 octobre 2018.

 

 

 

[2] G. POSSAMAÏ, préc.