Les SMS envoyés par le biais d’un téléphone portable mis à disposition par l’employeur sont présumés avoir un caractère professionnel. Si donc ces messages comportent des propos injurieux et excessifs à l’encontre de l’entreprise et ses dirigeants, ils peuvent être invoqués pour fonder un licenciement pour faute, même s’il n’étaient pas destinés à être rendus publics. C’est ainsi que juge la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 11 décembre 2024.
En l’espèce, un salarié engagé comme « business unit manager », occupant aussi le rôle de « conseiller du président », a été licencié pour faute lourde, en raison de son refus de collaborer avec la nouvelle direction et de ses propos critiques et dénigrants visant la société et ses dirigeants, tenus lors d'échanges électroniques et par SMS envoyés au moyen de son téléphone portable professionnel. Plus particulièrement, il avait désigné le directeur général sous une dénomination dénigrante en détournant l'appellation « l'EPD » (entretien progrès développement). De plus, il avait incité certains salariés en poste ou anciens à assigner en justice l’entreprise pour les litiges les opposant à celle-ci.
Le salarié saisit la juridiction prud’homale pour contester son licenciement. Il soutient, tout d’abord, que les échanges litigieux réalisés depuis son téléphone professionnel n’étaient pas destinés à être rendus publics et revêtent donc un caractère privé, ce qui empêche leur invocation au cours d’une procédure disciplinaire. Il fait aussi valoir que les propos en cause, tenus dans un cadre « strictement limité à des échanges de SMS », ne constituent aucun abus de la liberté d’expression qu’il jouit en vertu de l’article L. 1121-1 du Code du travail.
La cour d’appel le déboute pourtant de sa demande, en retenant le caractère professionnel des échanges ainsi qu’un abus de la liberté d’expression. La Cour de cassation s’aligne à l’argumentation de la cour d’appel. Premièrement, elle confirme la présomption de caractère professionnel de ces messages litigieux, puisque ceux-ci avaient été échangés avec des salariés en poste, ou des salariés ayant quitté la société et au moyen du téléphone mis à sa disposition par l'employeur. En plus, ils contenaient de propos critiques de l’entreprise et dénigrants à l'égard de ses dirigeants. De ce fait, l’employeur pourrait s’appuyer sur le contenu de ces messages pour fonder un licenciement disciplinaire, peu importe que ceux-ci n’aient pas vocation à être rendus publics. Deuxièmement, la Haute juridiction confirme l’abus du salarié dans l’exercice de sa liberté d’expression, compte tenu du caractère injurieux et excessif des propos employés, notamment à l’égard du directeur général. Et ce, « peu important le cadre restreint de la diffusion de ces propos ».
Cass. soc., 11 décembre 2024, Pourvoi n° 23-20.716