La possibilité pour le Délégué syndical d’obtenir des dommages-intérêts en réparation de discrimination syndicale ET de harcèlement moral : Cass. Soc. 20 juin 2018

Non-discrimination

- Auteur(e) : Khalida BENZIDOUN

La chambre sociale de la Cour de cassation a rendu un arrêt le 20 juin 2018 (n°16-19536) en vertu duquel elle affirme qu’un salarié titulaire de mandats syndicaux peut obtenir des dommages-intérêts non seulement du fait de la discrimination syndicale dont il est victime, mais également des agissements de harcèlement moral qui en découlent.

LES FAITS :

Un salarié est embauché par la société PHARMALOG en qualité d’assistant logistique.

Désigné comme Délégué syndical, il occupe également les fonctions de représentant syndical au CE et CHSCT.

Ce dernier reproche à son employeur plusieurs comportements qu’il estime constitutif de discrimination syndicale et de harcèlement moral.

Il rapporte notamment les faits suivants :

  • -« Dès ses désignations, il a été affecté dans un local distant de quelques kilomètres où il travaillait isolé de ses collègues
  • -Il s’est vu notifié un avertissement et fait l’objet d’une procédure de licenciement à laquelle la société a renoncé à la suite de sa contestation »
  • -Il se dit victime de de « pressions et menaces de licenciement alors qu’il assistait un collègue en sa qualité de représentant syndical
  • -Il a également fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire jugée disproportionnées et annulée par l’inspection du travail
  • -Il a fait l’objet d’une demande d’autorisation de licenciement suite à mise à pied conservatoire, qui a été refusé par l’administration
  • -« À compter de sa réintégration dans l’entreprise le salarié a été privé d’accès au réseau internet et s’est vu retirer son autorisation de conduite de chariot automoteur, indispensable à l’exercice de ses fonctions ».

Le salarié a alors saisi les juridictions prudhommales aux fins d’obtenir des dommages-intérêts suite à la discrimination syndicale ET les agissements constitutifs de harcèlement moral.

LA PROCEDURE :

Les juridictions du fond ont fait droit aux prétentions du salarié.

L’employeur décide de se pourvoir en cassation. Il invoque notamment le fait que ses mesures disciplinaires sont justifiées et constituent des éléments objectifs distinct de toute discrimination et harcèlement

LES MOYENS DU POURVOI:

A titre d’exemple, l’employeur affirme que l’accès au réseau internet a été retiré au salarié « en raison de l’introduction par le salarié, sur un ordinateur de l’entreprise, d’une clé USB contenant des logiciels malveillants servant au décryptage de mots de passe ».

Il en déduit que la mise à pied conservatoire et le licenciement afférent n’ont pas été autorisés par l’inspection du travail uniquement pour des questions de non-respect de procédure sans remettre en cause la véracité des faits.

LA SOLUTION :

La chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par l’employeur et le condamne aux dépens.

LES MOTIFS :

La motivation de la Haute juridiction s’articule en 2 temps :

  • -Elle estime que la Cour d’appel a considéré à juste titre que les agissements de l’employeur « pris dans leur ensemble » peuvent laisser penser qu’ils sont constitutifs de discrimination syndicale et à ce titre, l’employeur n’a pas apporté la preuve que ces agissements litigieux « sont des éléments objectifs étrangers à toute discrimination
  • -C’est par une appréciation souveraine que les juges de la Cour d’appel ont « déduit l’existence de faits permettant de laisser présumer l’existence d’un harcèlement moral, sans que la société ne démontre que ses agissements étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement »

Il en ressort donc que l’employeur peut à la fois être condamné à verser des dommages-intérêts en réparation des faits de discrimination ET de harcèlement moral dont le salarié a été victime depuis sa désignation à des mandats syndicaux.

 

Vous trouverez ci-après l’arrêt Cass ; Soc. 20 juin 2018 dans son intégralité.