La négociation sur la pénibilité au travail reste dans l'impasse (séance du 25 mars 2008)

Conditions du travail

- Auteur(e) : Tiphaine Garat

 

 

Les partenaires sociaux se sont retrouvés, le 25 mars dernier, pour la 17e séance de négociation sur la pénibilité au travail. Ils ont notamment discuté d’un nouveau texte du patronat explicitant les différents types de pénibilité.

 

À l’issue de cette réunion, les partenaires sociaux ont qualifié la situation de « bloquée ». En effet, les discussions achoppent toujours sur le financement du dispositif de prise en compte de la pénibilité - les syndicats sollicitant une prise en charge au moins partielle des entreprises, le patronat s’y refusant - et sur ses conditions d’ accès.

 

Le patronat avait pourtant effectué deux avancées lors de cette séance : à la demande des syndicats, il a accepté d’ouvrir le dispositif à tous les salariés (et non plus seulement aux ouvriers ou employés d’exécution), et d’intégrer dans les critères de pénibilité les risques psychosociaux.

 

Une dernière séance de négociation est prévue le 21 avril.

 

Différents types de pénibilité

 

Le nouveau document du patronat définit trois types de pénibilité. Il s’agit des contraintes physiques marquées, de l’environnement agressif et des rythmes de travail.

 

1. Les contraintes physiques marquées constituent :

 

  le port de charges lourdes, c’est-à-dire « la manutention manuelle, répétitive, pendant plus de 20 heures par semaine, de charges de plus de 55 kg pour les hommes ». En outre, la manutention manuelle est définie comme toute opération de transport ou de soutien d’une charge, dont le levage, la pose, la poussée, la traction, le port ou le déplacement exigent l’effort physique d’un ou plusieurs travailleurs, et comportent des risques, notamment dorso-lombaires, pour les travailleurs, en raison des caractéristiques de la charge ou des conditions ergonomiques défavorables ;

 

  des postures pénibles tenues par les salariés plus de 20 heures par semaine. Il s’agit de la position forcée des articulations et le maintien des bras en l’air ;

 

  les vibrations : sont concernés les salariés exposés, avant l’entrée en vigueur du décret du 4 juillet 2005, plus de huit heures par jour, à des vibrations transmises aux membres supérieurs, au-delà de 5 m/s2, ou à des vibrations transmises à l’ensemble du corps, supérieures à 1,15 m/s2.

 

2. L’ environnement agressif est constitué par :

 

  les produits toxiques : il s’agit du contact quotidien, effectif et répété avec des agents cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques de classe 1, et/ou avec des poussières et fumées au sens de l’article R. 232-5-5 du Code du travail ;

 

  les températures extrêmes : sont concernés les salariés soumis, plus de 20 heures par semaine, à des températures supérieures à 30 °C ou inférieures à -10 °C ;

 

  les bruits intenses : sont visés les salariés, exposés avant le 1er janvier 2008 de manière habituelle, plus de 20 heures par semaine, à un bruit excédant 87 dB à l’oreille.

 

3. Les contraintes liées aux rythmes de travail visent :

 

  les salariés ayant travaillé plus de 200 nuits par an ;

 

  ceux ayant travaillé au moins 15 ans en équipes successives alternantes ;

 

  le travail répétitif consistant en la répétition, plus de 20 heures par semaine, d’un même geste, à une cadence élevée, imposée ou non par le déplacement automatique d’une pièce, avec un temps de cycle de moins d’une minute.

 

Dispositif de prise en compte de la pénibilité

 

Le nouveau texte du patronat reprend le dispositif proposé dans son document du 6 février 2008. Les salariés concernés peuvent bénéficier d’un allégement de leur charge de travail. Cet allégement, qui peut intervenir au plus tôt deux ans avant l’âge auquel il peut faire valoir ses droits à la retraite à taux plein, peut prendre la forme d’une mission de tutorat au sein de l’entreprise, d’un passage à mi-temps ou d’une cessation d’ activité anticipée.

 

Quelque soit la forme d’allègement retenue, durant ses périodes travaillées, le salarié perçoit de son employeur une rémunération correspondant à la durée de son temps de travail. Les périodes non travaillées, que ce soit dans le cadre d’un mi-temps ou d’une cessation anticipée d’activité, sont financées par la solidarité nationale.

 

Pour accéder à ce dispositif, les salariés doivent remplir plusieurs conditions (avoir accompli 40 ans d’activité salariée, avoir été exposé pendant au moins 30 ans à un des facteurs de pénibilité, présenter des traces durables identifiables et irréversibles sur leur santé résultant des travaux pénibles...). Le nouveau texte patronal reprend les conditions fixées dans le document du 6 février dernier, à deux exceptions près :

 

  la nécessité d’avoir atteint l’âge de 58 ans n’apparaît plus dans les nouvelles propositions ;

 

  en revanche, les salariés doivent avoir cumulé pendant au minimum 10 ans un des facteurs de chacun des trois types de pénibilité (le document précédent prévoyait que les salariés devaient cumuler pendant cette même période trois facteurs ou plus, quel que soit le type de pénibilité).

 

Le salarié qui estime remplir les conditions ci-dessus pour bénéficier du dispositif et qui peut en justifier peut les faire valider, dans le cadre de l’approche personnalisée, par une commission ad hoc.

 

Cette commission, composée de membres désignés par les organisations patronales et syndicales assistés par un représentant de la sécurité sociale, d’un médecin du travail et d’un médecin de la sécurité sociale sera chargée :

 

  d’une part de valider les durées d’activité salariée et d’exposition à des travaux pénibles susceptibles d’avoir eu des effets sur l’état du salarié

 

  d’autre part d’apprécier l’exsitence de traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé du salarié résultant des travaux pénibles qu’il a exercés et jsutifiant un allégement de sa charge de travail.

 

Les organisations patronales proposent de mettre en place ce dispositif à titre expérimental pour cinq ans pour une population cible de 6 % de la tranche d’âge concernée.