Au terme de la quatorzième séance de négociation sur la pénibilité au travail, le 23 janvier, organisations syndicales et patronales ont déploré l’absence d’avancées, et se sont accusées mutuellement de reculer sur leurs propositions.
Au terme de la quatorzième séance de négociation sur la pénibilité au travail, le 23 janvier, organisations syndicales et patronales ont déploré l’absence d’avancées, et se sont accusées mutuellement de reculer sur leurs propositions. Les partenaires sociaux se sont uniquement mis d’accord sur le programme de travail des trois prochaines séances de discussion, les 6 février, et 4 et 25 mars prochains. Ainsi, conformément aux propositions des organisations syndicales, la séance du 6 février sera notamment consacrée aux dispositifs et procédures à mettre en oeuvre et celle du 4 mars au financement, la séance du 25 mars devant être conclusive.
À l’issue de la réunion, le patronat a remis aux syndicats un texte reprenant le projet d’ accord du 31 janvier 2006, amendé de quelques dispositions. Ces derniers se prononceront sur ce texte le 6 février prochain.
Positions patronales
François-Xavier Clédat, PDG de Spie Batignolles et chef de file de la délégation patronale, a insisté sur la difficulté de négocier sur la pénibilité au travail, affirmant qu’aucun pays n’a mis en place de dispositif spécifique en la matière. Il a qualifié les propositions syndicales d’« outrancières » et d’« usine à gaz ». Pour lui, ces propositions, visant à mettre en place une cessation anticipée d’activité, « sont en contradiction avec l’ allongement de la durée du travail ».
En outre, selon lui, l’exposition à plusieurs pénibilités touche majoritairement les ouvriers, mais « il n’y a pas de corrélation directe entre l’ espérance de vie et la pénibilité ».
Le patronat propose la mise en place à titre expérimental pendant quatre à cinq ans d’un temps partiel progressif en fin de carrière pour les salariés ayant subi la pénibilité.
Un nouveau texte proposé par le patronat
En fin de séance, le patronat a présenté un texte sur l’ amélioration des conditions de travail. Il s’agit en fait de l’accord du 26 janvier 2006 amendé, avec les références à l’accord interprofessionnel du 12 mars 2007 sur la prévention, la tarification et la réparation des risques professionnels. Ce texte « tient compte » également des conclusions et propositions de la conférence sur les conditions de travail du 4 octobre 2007.
Le nouveau projet d’accord proposé par le patronat affirme que « la branche AT/MP de la Cnam doit être un lieu privilégié de réflexion et d’innovation pour définir des mesures d’amélioration des conditions de travail ». Cette branche « doit se doter d’une politique de recherche globale et prospective associant l’INRS, les Cram et Eurogip, adaptée aux attentes des entreprises et des salariés pour améliorer la prévention des risques professionnels ». En outre, « les partenaires sociaux réfléchiront à la mise en place d’un portail Internet, pour permettre aux acteurs intéressés d’accéder à une information claire sur les risques professionnels ».
Le texte prévoit également de « renforcer l’action collective des organisations représentatives d’employeurs et les organisations syndicales de salariés à travers les commissions techniques nationales (CTN), les commissions techniques régionales (CTR) et les observatoires régionaux de santé au travail (ORST) », ainsi que le rôle et la formation des membres des CHSCT. Par ailleurs, « les partenaires sociaux considèrent que les services de santé au travail constituent les relais d’action prioritaires pour la prévention des risques professionnels. Ils souhaitent que la pluridisciplinarité soit pleinement mise en oeuvre, et que les services de santé au travail puissent développer avec les Cram des actions adaptées et concrètes pour l’amélioration des conditions de travail ». Le patronat souhaite également le développement « des dispositifs existants pour aider et inciter les entreprises à procéder aux investissements destinés à l’amélioration des conditions de travail des salariés ».
Enfin, pour le patronat, le Conseil d’ orientation sur les conditions de travail, proposé lors de la conférence sur les conditions de travail du 4 octobre, pourrait assurer « le suivi de l’évolution des conditions de travail dans les entreprises » et définir des « indicateurs plus affinés et pertinents » en la matière.
Propositions critiquées par les syndicats
À l’issue de la réunion, les organisations syndicales, à l’exception de la CFE-CGC qui ne s’est pas exprimée, ont unanimement affirmé que le patronat avait reculé sur ses positions. Selon les syndicats, les organisations patronales proposent un champ d’ application très restreint du dispositif à définir sur la pénibilité, qui ne concernerait que les « ouvriers et les personnels d’exécution ». En outre, pour les syndicats, le patronat refuse de reconnaître que la pénibilité est liée à l’ espérance de vie.
Joseph Thouvenel (CFTC) a qualifié la réunion de « catastrophique ». Pour lui, il existe un « décrochage » entre la façon dont est perçue la négociation par les syndicats, ces derniers souhaitant aborder la retraite, et la conception du patronat, qui se concentre sur la santé au travail. Pour Jean-Louis Malys (CFDT), il s’agit d’un véritable « retour en arrière » par rapport au texte proposé par le Medef le 26 septembre 2007. Il souligne que la CFDT a montré des « signes d’ouverture » en proposant la mise en place d’un dispositif individuel, avec des critères précis. Michelle Biaggi (FO) considère qu’il s’agit d’une « véritable régression », qualifiant de « laboratoire de sémantique » la séance de négociation. Quant à Jean-Christophe Le Duigou (CGT), il estime qu’il y a sans doute « connivence entre le recul du Medef et l’importance que Xavier Bertrand semble donner à l’intégration de la question de la pénibilité dans le rendez-vous sur les retraites ».
-Source : Liaisons Sociales Quotidien, 25/01/2008