Dans un arrêt du 27 novembre 2019 pourvoi n°19-14.224 publié au bulletin, la chambre sociale de la cour de cassation se prononce pour la première fois sur les modalités de désignation des membres de la CSSCT.
Pour rappel :
À l’issue de l’ordonnance Macron du 22 septembre 2017 n°2017-1386, le CSE, instance unique de représentation du personnel, assure désormais la mission de l’ancien CHSCT sur le thème de la santé et la sécurité au travail.
À cette fin, des commissions santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) pourront être créées au sein des comité sociaux et économiques selon les modalités prévues par le Code du travail.
Mise en place obligatoire | Mise en place conventionnelle | |
Article L.2315-36 du Code du travail - Dans les entreprises et établissements distincts d’au moins 300 salariés. - Dans les établissements désignés à l’article L.4521-1 sans condition d’effectif (ex : les établissements comprenant au moins une installation nucléaire de base). | Article L.2315-37 du Code du travail - L’inspecteur du travail peut imposer la création d’une CSSCT dans les entreprises et établissements de moins de 300 salariés lorsqu’il le juge nécessaire en raison par exemple d’une activité spécifique. | Article L.2315-43 du Code du travail - Lorsque la mise en place d’une CSSCT n’est pas obligatoire ou imposée, un accord d’entreprise ou, en l’absence de DS, un accord entre l’employeur et le CSE adopté à la majorité des membres titulaires élus peut permettre d’instaurer une CSSCT. |
Que sa création soit obligatoire ou conventionnelle, les modalités du cadre de mise en place et du fonctionnement de cette commission seront déterminées par un accord collectif majoritaire (article L.2315-41). Néanmoins en cas d’absence de DS, ces modalités pourront être fixées par un accord entre l’employeur et le CSE adopté à la majorité des membres titulaires élus du comité ou éventuellement par le règlement intérieur du CSE en l’absence d’accord.
S’agissant plus particulièrement de la composition de la CSSCT et de la désignation de ses membres, ces modalités sont prévues aux articles L.2315-38 à 40 figurant parmi les dispositions d’ordre public qui devront donc impérativement être respectées.
Dans cet arrêt la cour de cassation se prononce sur l’application et la portée de l’article L.2315-39 prévoyant que « Les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail sont désignés par le comité social et économique parmi ses membres, par une résolution adoptée selon les modalités définies à l'article L.2315-32, pour une durée qui prend fin avec celle du mandat des membres élus du comité. ». « Les résolutions du comité social et économique sont prises à la majorité des membres présents. » (L.2315-32).
LES FAITS :
En l’espèce, la société Stryker Spine a signé le 4 octobre 2018 un accord relatif à la mise en place du CSE dans le cadre duquel a été convenu de la création d’une CSSCT composée de quatre membres. Dans ce cas la mise en place de cette commission n’était pas obligatoire mais conventionnelle. Par la suite les membres ont été désignés lors de la première réunion du CSE le 3 décembre 2018. Le syndicat CFDT métallurgie Gironde conteste ces désignations.
PROCÉDURE :
Le syndicat saisit donc le TI par requête, requête qui sera jugée non fondée dans une décision du tribunal d’instance de Bordeaux du 14 mars 2019 rejetant sa demande en annulation des désignations des membres de la CSSCT et la demande tendant à suspendre le fonctionnement de la commission.
Le syndicat se pourvoit donc en cassation.
MOYENS DU POURVOI :
Dans son moyen unique, le syndicat soutient que le CSE aurait dû prendre une résolution préalable fixant le mode de désignation des membres du CSSCT lors de la réunion du 3 décembre 2018, comme il en ressort selon lui de l’article 3.4 de l’accord relatif à la mise en place CSE prévoyant la création de la CSSCT. Cet accord prévoyait en effet, conformément aux dispositions légales, que les membres de la commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT) sont désignés par le comité parmi ses membres, par une résolution adoptée à la majorité des membres présents.
QUESTION DE DROIT :
La désignation des membres de la CSSCT nécessite-t-elle une résolution préalable du CSE fixant les modalités de l’élection?
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION :
La chambre sociale de la cour de cassation répond à la négative et rejette le pourvoi.
Au visa des articlesL2315-39 et L2315-32 du Code du travail, elle rappelle que la désignation des membres de la CSSCT résulte d’un vote du CSE à la majorité des voix des membres présents lors du vote. Cette disposition vaut donc aussi bien que la mise en place de la commission soit obligatoire ou conventionnelle.
Observations:
La cour de cassation fait donc une simple application de l’article L2315-39 du code du travail qui est d’ordre public. Le tribunal d’instance a bien constaté que l’accord prévoyait la désignation des membres de la CSSCT conformément aux dispositions légales c’est-à-dire par une résolution du CSE adoptée à la majorité des membres présents lors du vote. La cour ajoute au passage une précision : la désignation est pratiquée par le CSE parmi ses membres titulaires ou suppléants.
L’article L.2315-39 n’implique donc pas la nécessité pour le CSE d’adopterune résolution préalable fixant les modalités de l’élection, l’accord étant suffisant pour procéder à la désignation lors de la première réunion.
Note: Le point clef dans ce cas d’espèce est la conformité de l’accord aux dispositions légales d’ordre public de l’article L2315-39 du code du travail. Il faut donc en déduire qu’il ne serait pas possible dans le cadre de l’accord de mise en place du CSE prévoyant la CSSCT de déroger aux modalités de désignation prévues par le code du travail et d’en organiser des différentes.