L’article L.4131-1 du code du travail, dispose que « le travailleur doit alerter immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection. »
De plus, les dispositions de l’article L1132-3-3 du même code, offre une protection aux lanceurs d’alerte en disposant qu’ « aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions ou pour avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. "
En l’espèce, une salariée a saisi le comité d’éthique de la situation de harcèlement dont elle estime faire objet à la suite de son alerte, elle a également signalé à ce même comité des faits susceptibles d’être qualifiés de corruption, mettant en cause l’un de ses anciens collaborateurs et son employeur. Quelques mois plus tard, le comité d’éthique conclut que les faits en cause n'étaient pas contraires aux règles et principes d’éthiques.
Licenciée trois mois plus tard, la salariée décide de saisir la formation des référés de la juridiction prud’homale afin que soit constatée la nullité de son licenciement, intervenu en violation des dispositions protectrices des lanceurs d’alerte. Les juges de référés et la cour d’appel ont rejeté la demande en nullité du licenciement de la salariée, en retenant que « l'appréciation du motif de licenciement de la salariée relevait exclusivement des juges du fond ». Cependant, les juges de fond et de référés, malgré le rejet de la demande du salarié, ont relevé qu’aucun élément ne permet de remettre en cause la bonne foi de la salariée à l’occasion des alertes données successivement à sa hiérarchie puis au comité d’éthique. De ce fait, les juges de fond ont reconnu le statut de lanceur d’alerte à la salariée. Nonobstant, la reconnaissance de la qualité de lanceur d’alerte, les juges de fond retiennent que « les pièces et moyens de droit fournis par la salariée n’ont pas permis d’établir et de démontrer un lien évident et non-équivoque de cause à effet entre le fait d’avoir lancé une alerte et le licenciement ».
La salariée, contestant l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles, se pourvoit en cassation. Premièrement, elleretient qu’il appartient au juge des référés en présence d’une contestation sérieuse, de mettre fin au trouble manifestement illicite que constitue le licenciement d’un salarié en raison de sa qualité de lanceur d’alerte. Et que deuxièmement, il appartenait à l’employeur de démontrer que le licenciement était justifié par des éléments objectifs étranger à cette alerte de harcèlement.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles, en vertu des dispositions de l’article L.1132-3-3 du code du travail, et affirme que la salariée présentait des éléments permettant de présumer qu’elle avait signalé une alerte. Les juges considèrent qu’il appartenait à la cour d’appel de rechercher si l’employeur avait rapporté la preuve que sa décision, de licencier était justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration de la salariée. Les juges de cassation n’hésitent pas à rappeler les règles applicables à la répartition de la charge de la preuve, et semblent reprocher à la cour d’appel d’avoir fait peser la charge de la preuve uniquement sur la salariée.
Cass.soc.,1er févirer 2023, n°21-24.271 B