Jurisprudence : un salarié mis à la retraite en dehors des conditions légales et donc licencié sans cause réelle et sérieuse bénéficie de l'indemnité conventionnelle de licenciement prévue par la convention collective de branche.

Publics prioritaires

- Auteur(e) : Tiphaine Garat

"dès lors qu’il était irrévocablement jugé que le licenciement de M.X était dépourvu de cause réelle et sérieuse, l’intéressé avant droit au paiement de l’indemnité conventionnelle de licenciement, laquelle n’est exclue qu’en cas de licenciement pour motif disciplinaire ou en raison d’une condamnation pour crime ou délité touchant à l’honneur ou à la probité."

 

34 ans après avoir été recruté au Crédit Lyonnais, un salarié apprend qu’il doit céder son poste en raison d’une réorganisation. Suite à son refus d’occuper le poste qui lui est proposé, la banque le met à la retraite, par courrier du 9 octobre 2001.

 

Il a demandé la requalification de cette rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et le paiement des indemnités correspondantes.

 

Les juges ont accédé à sa demande tendant à la requalification de la rupture, et retenu un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais ils l’ont débouté de sa demande d’indemnité conventionnelle de licenciement (CA Paris, 17 septembre 2002).

 

Interprétant l’article de la CCN correspondant (article 26 de la CCN du 10 janvier 2000), les magistrats ont estimé que l’indemnité n’était due qu’au salarié licencié pour insuffisance professionnelle. Ils ont ainsi pris en considération le motif de la rupture.

 

La chambre sociale de la Cour de cassation avait censuré l’arrêt et retenu une interprétation extensive de l’accord : en présence de dispositions accordant une indemnité de licenciement pour motif non disciplinaire résultant d’une insuffisance professionnelle ou d’une inaptitude physique, "il en résulte nécessairement que ces dispositions sont applicables lorsque le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse" (Cass.soc., 8 mars 2005, n°01-44.752).

 

Néanmoins, les juges de la cour de renvoi ont rejeté la demande d’indemnité faisant prévaloir l’intention des rédacteurs de la convention, lesquels n’ont entendu accorder le bénéfice de l’indemnité " qu’aux salariés licenciés pour insuffisance professionnelle ou incapacité physique". "Le juge ne saurait étendre l’application de ces dispositions au-delà de la convention collective en reconnaissant un droit à l’indemnité conventionnelle de licenciement à des salariés licenciés pour des causes autres que celles limitativement énumérées", ont-ils souligné.

 

Mais finalement, statuant en assemblée plénière, la Haute juridiction a confirmé l’interprétation de la chambre sociale et imposé le versement de l’indemnité conventionnelle de licenciement au salarié licencié en l’absence de cause réelle et sérieuse.

 

Peu importe donc le motif de licenciement et l’intention des rédacteurs de la convention collective : l’employeur est débiteur de l’indemnité conventionnelle de licenciement dès lors qu’un licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, sauf licenciement pour motif disciplinaire ou en raison d’une condamnation pour crime ou délit touchant à l’honneur ou à la probité.