Index égalité femmes-hommes : Terra Nova propose des pistes d’amélioration

Égalité dans le travail
Égalité professionnelle F/H

- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

Le groupe de réflexion Terra Nova publie, le 21 janvier 2021, une note relative à l’index de l’égalité professionnelle femmes-hommes[1]. L’objet de la présente note est d’étudier les forces et les faiblesses de l’index, en examinant avant tout la pertinence des éléments pris en compte dans son calcul par rapport aux renseignements fournis sur la politique salariale.

 

La rédactrice de la note[2] admet que la mise en place de ce dispositif constitue une avancée majeure et prometteuse, en raison du passage d’une obligation de moyens à une obligation de résultats ainsi que d’une réelle dynamique d’amélioration suscitée au sein des entreprises. Pourtant, l’index reste « sans doute perfectible ». En effet, la note identifie une série de lacunes quant à la méthode de calcul, les indicateurs choisis ainsi que les coefficients qui leur sont appliqués. Cela étant, elle formule un nombre de propositions pour étoffer cet outil et déverrouiller toute sa dynamique.

 

Les faiblesses de l’index : un manque de transparence à observer, une marge de tolérance à questionner et une note globale à nuancer

L’auteure de la note passe au crible la méthode de calcul de l’index[3] afin de déterminer si celle-ci est susceptible de comporter des biais.

S’agissant du premier indicateur, celui de l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes, la rédactrice déplore l’absence de prise en compte des temps partiels dans son calcul. Or, dans 85% des cas, ces postes sont « occupés par des femmes et pas toujours réellement ‘‘choisis’’».

Le manque de précision sur le montant des augmentations afin d’évaluer le pourcentage d’hommes et de femmes qui ont perçu une augmentation dans l’année (correspondant au second indicateur) est aussi pointé. Dans ces conditions, une entreprise « qui augmenterait autant d’hommes que de femmes de la même catégorie mais qui consentirait à un effort financier plus significatif en faveur des hommes ne serait pas pénalisée et pourrait obtenir l’ensemble des points, renforçant ainsi les inégalités ». L’auteure attire aussi l’attention sur la marge de tolérance (de 2 %) consentie pour calculer le pourcentage d’hommes et de femmes promus au sein de chaque catégorie socioprofessionnelle, dont l’application systématique pourrait minimiser davantage les écarts dans la note finale.

De manière plus intéressante encore, la rédactrice s’étonne de la présence du quatrième indicateur, relatif aux augmentations de salaire suite à un retour de congé maternité. En effet, cet indicateur ne fait que récompenser la mise en œuvre d’une obligation légale déjà instaurée par la loi du 23 mars 2006.

In fine, le dernier indicateur concernant la parité parmi les 10 plus hautes rémunérations (l’entreprise doit compter au moins 4 femmes dans ses 10 plus hauts salaires pour obtenir les 10 derniers points), n’est pas dépourvu de lacunes. S'il permet, selon l'auteure, « de rééquilibrer les inégalités ‘‘par le haut’’ et de favoriser l’accès des femmes au ‘‘top management’’ », il reste muet sur la prépondérance des femmes dans les bas salaires. Or, « c'est une réalité pour le plus grand nombre et il aurait été bon d'en tenir compte ».

 

Des pistes pour déverrouiller la dynamique de l’index égalité

 

  • Première préconisation : calculer la part des femmes dans les bas salaires

Concrètement, cette proposition concerne la substitution de l’indicateur sur l’augmentation des salariées de retour de congé maternité par un autre indicateur calculant le pourcentage des femmes dans les deux premiers déciles de la distribution salariale de l’entreprise (D1 et D2). Il serait noté sur 15 points, dont l’attribution se ferait selon une approche sectorielle pour tenir compte des spécificités de l’entreprise (secteur féminisé ou non).

Pour appuyer cette proposition, la note offre un exemple :dans un secteur très féminisé avec un ratio femmes/hommes qui serait de 80/20, une entreprise comprenant 100 salariés dont 85 femmes et 15 hommes n’obtiendra aucun point si le pourcentage de femmes dans D1 et D2 est supérieur ou égal à 80%. S’il y a moins de 80% de femmes dans les deux premiers déciles de la distribution salariale, alors l’entreprise remporte les 15 points.

 

  • Deuxième préconisation : attribuer un bonus de 10 points aux entreprises qui emploieraient une plus faible proportion de femmes à temps partiel que la moyenne du secteur.

 

  • Troisième préconisation : renforcer le niveau d’information vis-à-vis des CSE

La note souligne que les représentants du personnel doivent disposer toutes les informations ayant conduit au calcul des résultats, afin qu’ils puissent formuler des propositions ciblées pour résorber les écarts.

 

  • Quatrième préconisation : s’assurer que l’obligation de calcul de l’index ne court-circuite pas le dialogue social

La note soulève le risque qui pourrait surgir de l’obtention d’une bonne note à l’index. En effet, la bonne note pourrait « inciter les entreprises concernées à se dispenser de la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle ». Or, « il faut encourager les entreprises, qu’elles aient une bonne ou une mauvaise note, à améliorer leur score car l’égalité, c’est 100/100 et non 75/100 », insiste l’auteure.

 

  • Cinquième préconisation : refonder les classifications professionnelles

Selon la rédactrice, l’examen des classifications professionnelles, en particulier dans les métiers à prédominance féminine, et leur révision au niveau des branches via la création d’une Commission Paritaire d’Evaluation des Emplois « ouvrent des perspectives intéressantes pour l’égalité professionnelle puisqu’ils impliquent de tenir compte du degré de ségrégation des métiers ».

 

 

Vous trouverez, ci-après, l’intégralité de la note du 21 janvier 2021 intitulée « L’Index Egalité Professionnelle :  occasion manquée ou outil prometteur ? ».

 

 

 

 

[1] Issu de la loi « Avenir Professionnel » du 5 septembre 2018, l’index de l’égalité salariale constitue un outil qui permet de mesurer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans l’entreprise.

[2] Kenza Tahri, Coordinatrice du Pôle Egalité Hommes/Femmes de Terra Nova.

[3] L’index se calcule à partir de 4 ou 5 indicateurs selon la taille de l’entreprise et prend la forme d’une note sur 100.