Inclusion des personnes LGBT+ au travail : des efforts restent à fournir

Égalité dans le travail
Non-discrimination

- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

 « En deux ans, les résultats au niveau national ne montrent pas une évolution positive en matière d’inclusion des personnes LGBT+ au travail ». Tel est le constat alarmant qui ressort de la troisième édition du baromètre biennal, réalisé par la fédération nationale de L’Autre Cercle en partenariat avec l’Ifop et avec le soutien d’Orange et d’EY[1]. Dévoilés le 3 juin 2022, les chiffres concernant la visibilité, les agressions, les discriminations contre les salariés LGBT enregistrent une hausse par rapport à ceux de 2020. Il est à noter toutefois que, dans les organisations signataires de la Charte d’Engagement LGBT+ de L’Autre Cercle, « les LGBTphobies et les discriminations sont significativement moins présentes ».

  • Une progression des discriminations et des agressions au travail

Les chiffres révélés par le baromètre 2022 confirment que l’inclusion des LGBT+ au travail peine à se faire. Et pour cause : 26 % des répondants dénoncent des discriminations de la part de la direction (contre 20 % en 2020) et 30 % déclarent avoir subi au moins une agression LGBTphobe dans leur organisation (contre 26 % en 2020).

De manière concrète, ces inégalités concernent le déroulement de carrière (+ 3 % depuis 2020) avec une différence encore plus pointue selon l’échelle sociale (26 % des ouvriers déclarent avoir été victimes d’inégalités contre 17 % des cadres et professions intellectuelles supérieures), la rémunération (+ 4 % depuis 2020), les missions confiées (+ 2 %), le recrutement (+ 1 %). S’agissant des formes d’agression, celles-ci consistent à des mises à l’écart (+ 3 % depuis 2020), des insultes ou injures à caractère diffamatoire (+ 3 %), des moqueries ou propos vexants (+ 5 %), des menaces de révéler l’orientation sexuelle (+ 2 %), des menaces d’agression (+ 3 %) ou même des actes de violences physiques (+ 3 %).

Pourtant, dans les entreprises signataires de la Charte d’Engagement LGBT+ de L’Autre Cercle, un bilan plus positif se dessine, signe de son efficacité « pour combattre l’ensemble des LGBTphobies ». De manière indicative, dans ces entreprises, les moqueries désobligeantes ou des propos vexants subis par les LGBT+ ont reculé de deux points par rapport à 2020, tout comme les insultes ou injures (-1 depuis 2020).

  • Un phénomène d’autocensure et d’invisibilité des personnes LGBT+ au travail

Si les chiffres sur la visibilité des personnes LGBT+ dans leurs organisations sont stables par rapport à 2020, il n’en reste pas moins qu’ils demeurent alarmants : une personne LGBT+ sur deux (49 %) est invisible auprès de la totalité ou d’une partie de ses collègues. Il est à noter que la part de cette l’invisibilité diminue avec la progression dans l’échelle sociale : seuls 42 % des ouvriers sont visibles auprès de leur supérieur hiérarchique direct, contre 65 % de ceux qui occupent une profession intellectuelle supérieure.

Par ailleurs, ils sont nombreux (sept LGBT+ sur dix) à avoir omis volontairement de faire référence au sexe de leur conjoint au travail, ou même à avoir renoncé à participer à un événement organisé par des collègues ou l’entreprise (quatre sur dix), pour préserver leur évolution de carrière et leur bien-être au travail.

Or, « la question de la visibilité ne doit pas être renvoyée aux seules personnes LGBT+ » souligne Alain Gavand, administrateur et co-responsable du Pôle Observatoire de L’Autre Cercle. Il s’agit, avant tout, de garantir un environnement de travail favorable à l’expression de l’orientation sexuelle, d’assurer la présence de collègues et de rôles modèles LGBT+ visibles au sein de l’organisation, ou même de renforcer la prise de parole de la direction générale et/ou des organisations syndicales en la matière.

  • Une méconnaissance et sous-estimation des agissements LGBTphobes au travail

Même au sein des organisations signataires de la Charte LGBT+ de L’Autre Cercle, des écarts de perception du climat de LGBTphobie se constatent entre les personnes LGBT+ et non-LGBT+. Les chiffres sont assez parlants : 55% des LGBT+ ont été destinataires de propos LGBTphobes au travail contre 34% des non-LGBT+. Il s’avère que 64 % de ces propos proviennent des collègues et 31 % des supérieurs hiérarchiques. A cette méconnaissance du climat LGBTphobe contribue, entre autres, le silence trop présent des salariés ayant subi une agression physique ou verbale : quatre salariés sur dix n’en ont pas parlé.

Ces constats confirment le décalage entre les engagements entrepris par les organisations et la réalité du terrain. Ils mettent en évidence ainsi la nécessité, selon le président de L’Autre Cercle Denis Triay, d’engager des opérations de formation et de sensibilisation, seules susceptibles de « transformer les comportements et d’améliorer très concrètement l’inclusion des personnes LGBT+ au travail ».

Vous trouverez, ci-après, l’intégralité du 3e Baromètre LGBT+ | L’Autre Cercle x Ifop, 3 juin 2022.

[1] Sur la base d’un questionnaire auto-administré en ligne du 22 avril au 25 mai 2021 auprès de 1 068 salariés LGBT+ en France métropolitaine, et du 24 janvier au 11 février 2022 auprès de 29 979 salariés et agents travaillant dans les organisations signataires de la Charte d’Engagement LGBT+ de L’Autre Cercle.