Enracinement du télétravail dans la durée : des évolutions et des risques (Anact)

Organisation du travail

- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

Malgré une meilleure prise en compte de certaines dimensions du télétravail, telles que l’équipement, les horaires, la conciliation des temps, des difficultés et des risques se font toujours entendre. Par ailleurs, le travail hybride qui se profile constitue un nouveau mode organisationnel qui doit être accompagné. Tels sont les principaux résultats de la nouvelle enquête menée par le réseau Anact-Aract, dévoilés le 14 juin 2021[1].

  • Une meilleure prise en compte du dispositif

L’équipement des télétravailleurs semble s’être adapté au développement du télétravail en période de crise : 72% des répondants (contre 67% en 2020) déclarent disposer d’un environnement matériel adapté à la pratique du télétravail ainsi que d’outils numériques adéquats (95 % des répondants contre 87 % en 2020). A noter, cependant, que seuls 28% des sondés déclarent avoir bénéficié d’une formation visant à faciliter la pratique du télétravail et seuls 20% d’une prise en charge partielle ou totale des surcoûts liés au télétravail (frais téléphoniques, internet, consommables, équipements, etc.).

Quant aux activités de travail, celles-ci semblent adaptées pour 49 % des sondés. De manière plus intéressante, le niveau d’adaptation apparaît un peu plus marqué parmi les non manageurs (51%), les salariés qui pratiquaient le télétravail avant la crise (53%), les non cadres (54%) ainsi que les hommes (55%). Ils sont ainsi 77% à déclarer qu’ils sont en mesure de réaliser l’ensemble de leurs tâches et missions habituelles en télétravail, et beaucoup plus nombreux à se sentir plus efficaces (53 % contre 35 % en 2020).

La conciliation entre la vie personnelle et professionnelle paraît aussi atteinte pour 81 % des répondants. Ils étaient ainsi 64% à déclarer qu’ils ont la possibilité d’adapter leurs horaires de travail. Ce sentiment d’une bonne conciliation des temps apparaît plus marqué parmi les non-manageurs (84 %) et les non-cadres (85 %).

Pourtant, « les observations de terrain montrent, elles, que la capacité des organisations à adapter au fil de l’eau l’activité et les objectifs pour faciliter le travail à distance reste un chantier à poursuivre », avertit l’Anact.   

  • Des difficultés qui persistent

Malgré les améliorations rapportées par les sondés, plusieurs effets du télétravail de crise semblent préoccupants. Il en est ainsi pour 37% des sondés qui estiment que les conditions de travail se sont dégradées (contre 17% en 2020). Par ailleurs, un sentiment de sur-connexion touche 64% des répondants (plus particulièrement les cadres, les manageurs, les salariés du secteur privé et ceux qui pratiquaient le télétravail avant la crise), un sentiment d’isolement est ressenti par 40% d’entre eux, de fatigue par 50 % d’entre-deux (35 % en 2020), et de “travailler plus” par 63% des répondants (en nette évolution par rapport aux 48 % des répondants de l’année précédente). Additionnement, 39% des sondés éprouvent de l’appréhension dans la perspective d’un retour au travail en présentiel (notamment les femmes, les non cadres, non manageurs, les personnels qui pratiquaient le télétravail auparavant). Or, seuls 19 % des répondants estiment aborder les difficultés liées à la réalisation du travail à distance avec leurs managers (40 % en 2020).

Cela etant, l’Anact souligne que « l’importance des ressentis en matière d’isolement, de fatigue, de craintes quant au retour sur site nécessite, par ailleurs, de soigner particulièrement le dialogue dans les semaines qui viennent ». Elle pointe par ailleurs que « la difficulté des manageurs à évaluer et adapter la charge de travail à distance et sur site doit alerter - notamment pendant la phase de reprise - et inciter les directions à les soutenir et leur fournir les moyens adaptés (écoute, formation, outillage, marges de manœuvre…) ».

  • Le nouveau défi du travail hybride

Les difficultés susmentionnées n’empêchent pas la quasi-totalité des répondants (96%) de souhaiter pouvoir poursuivre le télétravail à l’issue de la crise, 69% de manière régulière (contre 43% en 2020) et 27% de manière occasionnelle (contre 45% en 2020). Une donnée qui « s’affirme de manière claire et nette cette année comme en 2020 », note l’Anact. 36% de ceux qui souhaiteraient poursuivre aimeraient pouvoir télétravailler 3 jours par semaine voire plus, et 56% à hauteur d’un ou deux jours par semaine. Plusieurs motivations à recourir au télétravail se conjuguent : la réduction des temps de transport, le travail au calme, l’efficacité perçue, la conciliation entre la vie personnelle et professionnelle, et autres.

Alors que ce travail hybride s’installe dans la durée, « les organisations ont tout intérêt à continuer de tester et ajuster les modalités de fonctionnement collectifs adaptés (fréquences et formats de réunions, formes du suivi de l’activité, nombre de jour sur site et à distance…) », conseille l’Anact.

Vous trouverez, ci-après, le rapport des résultats de l’enquête « Télétravail de crise en 2021 : quelles évolutions ? Quels impacts ? » du réseau Anact-Aract.

 

[1] L’enquête a été menée de février à avril 2021 auprès de 2 864 personnes en situation de télétravail (total ou partiel) sur la base d’un questionnaire visant à mesurer l’évolution des pratiques, à appréhender les impacts du télétravail sur l’organisation du travail et le management et à identifier les pistes d'amélioration.

 

 

par : Evdokia Maria Liakopoulou