Engagement des entreprises pour la prévention des conduites addictives (alcool, tabac et stupéfiants) : Recommandations de la Plateforme RSE

Conditions du travail

- Auteur(e) : Khalida BENZIDOUN

Le 14 janvier 2019, la plateforme RSE a rendu un rapport relatif aux engagements des entreprises pour la prévention des conduites addictives.

 

Ce rapport s’inscrit dans le cadre de la demande de Monsieur Nicolas Prisse, Président de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), qui a sollicité la plateforme en vue de « proposer des mesures susceptibles d’encourager les entreprises à s’engager dans des démarches volontaires visant à prévenir et à réduire les consommations à risque d’alcool, de tabac et de stupéfiants ».

La plateforme RSE (Plateforme nationale d’actions globales pour la Responsabilité sociétale des entreprises) a été mise en place au sein de France Stratégie en 2013[1], par « 16 organisations représentatives des employeurs, des salariés et de la société civile [qui] ont demandé au Premier ministre la création auprès de lui d’une « Plateforme nationale de dialogue et de concertation [qui] associerait les différents acteurs de la société française ayant un intérêt pour la RSE (représentants des entreprises, des salariés, des associations et ONG, des structures multi-parties prenantes…) et les représentants des pouvoirs publics (administrations centrales, parlementaires, collectivités territoriales…). »

Parmi ses différentes missions, la Plateforme RSE « émet des avis sur les questions qui lui sont soumises et formule des recommandations sur les questions sociales, environnementales et de gouvernance soulevées par la responsabilité sociétale des entreprises ».

 

L’étude la Plateforme RSE se décompose comme suit :

1/ Données statistiques relatives à la consommation de substances addictives en France (alcool, tabac, drogues illicites, médicaments psychotropes)

2/ La consommation et pratiques en milieu professionnel

  • « Les consommations à risque en milieu professionnel : bien que l’activité professionnelle soit un facteur de protection des conduites addictives, plusieurs études ont mis en lumière le lien entre des difficultés rencontrées quotidiennement dans le monde professionnel et une augmentation de la consommation de substances psychoactives sur le lieu de travail.À ce titre, on distingue généralement trois vecteurs pouvant expliquer cette consommation :
  • L’« importation » : une consommation importée de la vie privée du salarié ;
  • L’« acquisition » : la consommation résulte de sollicitations et facilitations du milieu professionnel (ex. : présence de SPA lors des pauses de l’équipe, de pots, etc.) ;
  • L’« adaptation » : l’idée de « dopage » pour tenir au quotidien, faire face au stress, à des douleurs récurrentes, pour tenir le rythme, etc.
  • Cette consommation à risque peut prendre différentes formes en milieu professionnel : Occasionnelle, le plus souvent conviviale : pots, apéritifs, rites d’admission dans un groupe ;Répétitive et collective : instituée dans certains collectifs de travail où il est difficile de ne pas « faire comme les autres » ;Occasionnelle ou répétitive pour tenir au travail ;Individuelle : en lien avec une relation difficile voire pathologique à un ou plusieurs produits.
  • Si toutes les entreprises sont concernées par les addictions, certains secteurs sont particulièrement touchés : la construction, l’hébergement, la restauration, et les arts, spectacles et activités récréatives ».
  • L’entreprise, un lieu de sensibilisation, d’information et d’actions pour prévenir et réduire les consommations à risque des salariés.
  • L’injonction législative faite à l’employeur d’assurer la sécurité et de protéger la santé physique et mentale des travailleurs doit l’encourager à mettre en place une démarche de prévention des conduites addictives.
  • La réussite de cette démarche repose sur l’implication de tous les acteurs de l’entreprise : service de santé au travail, services sociaux, encadrement, représentants du personnel, salariés. Elle passe par une formation de la médecine du travail mais aussi par la sensibilisation et l’information des manageurs, employeurs et salariés.
  • Son élaboration doit se faire dans un esprit de concertation, d’accompagnement, de soutien, et ne pas rester dans une logique répressive ou de sanction. Il est essentiel de clarifier le discours de l’entreprise sur ce sujet et de montrer que l’addiction sera traitée comme toute autre pathologie. Enfin, la mise en œuvre d’une telle démarche de prévention doit être adaptée à la taille ainsi qu’à la culture de chaque entreprise ».

 

3/ 14 recommandations de la plateforme RSE « auxdifférents acteurs afin de promouvoir une approche globale de prévention et de réduction des risques »

Au gouvernement :

  • Veiller à ce que, dans les politiques publiques de lutte contre les addictions, la prévention prime sur la répression, et que cette orientation s’applique aussi aux obligations du monde de l’entreprise ;
  • Mener à bien la réforme de la médecine du travail et mettre en place des dispositifs de dialogue entre la médecine du travail et la médecine de ville ;
  • Intégrer la lutte contre les conduites addictives dans la formation initiale des futurs managers (écoles de commerce, de gestion et d’ingénieurs), ainsi que dans la journée de formation suivie par les futurs responsables d’un point de vente d’alcool ou de tabac avant l’obtention du KBIS
  • Intégrer des cas concrets du monde professionnel dans les campagnes de santé publique contre les addictions.

 À toutes les entreprises :

  • Porter une attention particulière à la qualité de vie au travail (QVT) de leurs salariés et à la vulnérabilité des jeunes – stagiaires, apprentis, alternants –, particulièrement exposés à ce risque ;
  • Associer les parties prenantes internes (salariés, médecine du travail, Comité social et économique, DRH, manageurs) à la définition et à la mise en œuvre de leurs actions d’information et de prévention ;
  • Veiller à la sensibilisation et à la formation du personnel médical des services de santé au travail et associer des tiers (associations de patients, etc.) aux actions menées dans l’entreprise ;
  • Relayer dans l’entreprise les messages des campagnes nationales de prévention et participer aux programmes d’action proposés par les organismes de protection sociale ;
  • Faire figurer leurs politiques de prévention des consommations à risque dans la valorisation de leurs politiques de responsabilité sociétale.

 Aux entreprises productrices ou distributrices d’alcool ou de tabac :

  • Mettre en œuvre la « recommandation alcool » de l’Agence de régulation professionnelle de la publicité et relayer les messages des campagnes nationales de prévention sur les unités de conditionnement de leurs produits ;
  • Mettre à disposition des entreprises des outils (guides, éthylotests, etc.) afin de prévenir les consommations à risque dans le cadre du travail ;
  • Former les professionnels au contact des consommateurs, et notamment les personnels de caisse, sur l’interdiction de la vente aux mineurs ;
  • Faire figurer dans leur déclaration de performance extra-financière le montant des dépenses consacrées aux actions de lobbying auprès des élus et décideurs publics, ainsi que les positions fournies au débat.

 Aux fédérations professionnelles :

  • Renforcer l’accompagnement et la sensibilisation de leurs adhérents, rendre publiques les initiatives menées avec eux pour lutter contre les conduites addictives, et établir une charte d’engagement à destination des opérateurs de filières productrices ou distributrices d’alcool et de tabac ».

 

Par ailleurs, toujours dans le domaine de la lutte contre les addictions, notons que le Premier Ministre a validé « Le Plan national de mobilisation contre les addictions 2018-2022 ».  

Le plan 2018-2022 s’articule autour de 6 grands axes principaux :

  1. Protéger dès le plus jeune âge
  2. Mieux répondre aux conséquences des addictions pour les citoyens et la société
  3. Améliorer l’efficacité de la lutte contre le trafic
  4. Renforcer les connaissances et favoriser leur diffusion
  5. Renforcer la coopération internationale
  6. Créer les conditions de l’efficacité de l’action publique sur l’ensemble du territoire

 

Vous trouverez ci-après l’étude de la Plateforme RSE ainsi que le Plan national de lutte contre les addictions 2018-2022 dans leur intégralité.

 

 


 

 

[1] Article 5 du décret n° 2013-333 du 22 avril 2013 modifié portant création du Commissariat général à la stratégie et à la prospective