Si la crise sanitaire a porté un coup d’accélérateur au déploiement du télétravail, une tendance à la hausse du nombre d’accords et avenants signés en la matière s’observe depuis 2017 : il passe de 390 en 2017, à 1 060 en 2018 et 1 490 en 2019. Le dispositif reste fortement plébiscité et se poursuit au-delà de la crise sanitaire : entre 2020 et 2021, le nombre d’accords collectifs portant sur le télétravail a quasiment doublé. Tels sont les principaux résultats tirés d’une étude de la Dares[1] publiée le 23 novembre 2022, qui passe en revue les usages du télétravail au sortir de la crise sanitaire.
- Une multiplication des accords de télétravail, assortie d’une diversification des profils signataires
L’étude de la Dares confirme une pérennisation et une extension du recours au télétravail. En effet, 2 760 accords ont été conclus en la matière en 2020, et 4 070 en 2021, soit dix fois plus en quatre ans. Les accords de télétravail représentent ainsi 67 % des accords traitant de conditions de travail en 2021. Pourtant, l’impact de la crise sanitaire se fait sentir : la majorité des accords étudiés par la Dares sont à durée déterminée.
Peu courants dans le secteur du commerce, transports et hébergement-restauration, les accords sur le télétravail se voient considérablement déployés à partir de 2020 : ils passent de 190 en 2019, à 390 en 2020, pour atteindre plus de 600 accords en 2021. Ils rejoignent ceux conclus dans l’administration publique, l’enseignement, la santé et l’action sociale (600 accords en 2021, contre 200 en 2019).
En 2021, les secteurs de l’industrie ainsi que des activités spécialisées, scientifiques et techniques continuent à se démarquer, avec respectivement 860 et 760 accords télétravail signés. Parallèlement, dans les activités financières et d’assurance, le nombre d’accords de télétravail continue à être bas (180 accords en 2019, contre 410 accords en 2021). La raison tient selon la Dares, au développement du télétravail dans ce secteur avant la crise sanitaire, ainsi qu’à son organisation plus répandue au niveau du groupe.
L’accélération du déploiement du télétravail touche les entreprises de toute taille. L’étude met en avant sa diffusion constante au sein des petites structures. Ainsi, le nombre d’accords signés par des entreprises de moins de 50 salariés passe de 30 en 2017 à 850 en 2021. Et celui des entreprises entre 50 et 299 salariés, de 130 accords à 1 900. Ce sont pourtant les entreprises familières de la négociation collective qui concluent le plus d’accords sur le télétravail (trois accords sur quatre au premier semestre 2021).
- Eligibilité, forme et accompagnement des frais occasionnés : les domaines déterminants des accords de télétravail
Les critères qui déterminent l’éligibilité au télétravail sont présents dans l’ensemble des accords de l’échantillon. Des similarités se constatent au niveau de conditions techniques (disposer d’un espace calme et isolé, débit internet suffisant, etc.) et de conditions liées à la compatibilité entre le poste occupé et le télétravail (capacité d’autonomie, travail sur support informatique, etc.). Il en est de même pour les dispositions relatives au lieu du télétravail (domicile principal avec option de résidence secondaire, ou autre lieu autorisé par le manager, etc.) avec toutefois quelques accords originaux (télétravail depuis l’étranger, espaces de coworking). Au contraire, les conditions liées aux caractéristiques du contrat de travail (accessibilité aux salariés en contrats à durée indéterminée ou déterminée, accessibilité aux salariés à temps partiel, ancienneté, etc.) varient d’une entreprise à l’autre.
Des divergences se constatent aussi dans la mise en œuvre des mesures d’accompagnement. Si la majorité des textes étudiés (8 accords sur dix) prévoient la fourniture d’un ordinateur portable, quelques-uns étendent le dispositif, en mettant à disposition, par exemple, un second écran, un clavier ou un mobilier de bureau. Un peu moins de la moitié des textes analysés prennent en charge des frais occasionnés par le télétravail. La fourchette d’indemnisation mensuelle, quand celle-ci est prévue, est comprise entre 8 et 80 € , avec pourtant une moyenne de 2,50 € par jour ou de 10 € par mois.
Selon l’étude, le télétravail régulier constitue la forme privilégiée par les accords. 71 % des textes étudiés le prévoient, avec une organisation pour la plupart sur la semaine (plus rarement au mois ou à l’année) et des journées de travail fixes ou flexibles (ou même pour partie fixes et pour partie variables), qui doivent systématiquement être définis en accord avec le manager. Près de la moitié des accords portant sur le télétravail régulier permettent de télétravailler pendant deux jours par semaine. Traité par 36% des accords de l’échantillon, le télétravail occasionnel vient en complément du travail régulier, ou pour couvrir les salariés qui en sont exclus. Rarement abordé en tant que seule forme de télétravail traitée dans un accord, le télétravail exceptionnel est mentionné par près de la moitié des accords. Les conditions de sa mise en œuvre sont pourtant très brièvement énumérées (épidémie, grève, etc.).
Enfin, très peu d’accords prévoient des dispositifs relatifs à la santé et la sécurité des salariés, en lien avec le télétravail. Quoique contenues dans 77% des textes, les clauses relatives au droit à la déconnexion, aux dispositions légales et conventionnelles relatives à la santé et la sécurité ne constituent que des simples rappels, sans qu’elles soient accompagnées « de dispositifs de prévention ou de sécurité spécifiques et adaptés à un recours au télétravail accru ».
Vous trouverez, ci-après, l’intégralité de : Dares Analyses nº 57, Les accords d’entreprise portant sur le télétravail : quels usages durant la crise sanitaire ?, 23 novembre 2022.
[1] S’appuyant sur l’application D@ccord NG qui recense les textes signés par les entre- prises et déposés auprès des directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS en métropole, DEETS en outre-mer). 922 accords et avenants thématisés télétravail sont signés et déposés entre le 1er janvier 2021 et le 30 juin 2021 à la date de réalisation de l’étude. Puis, un échantillon de 151 textes a été analysé.