Effets contrastés du temps partiel sur les pensions de retraite

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- Auteur(e) : Hakim EL FATTAH

D'après les données de l'Insee, 18,4 % des salariés travaillaient à temps partiel en 2013, soit près de 4 millions de personnes, parmi lesquelles on constate une très grande majorité de femmes (79,6 %). Le temps partiel, dont le dispositif a été récemment réformé, désigne les situations où le temps de travail est inférieur à la durée légale du travail (35 heures par semaine) ou à la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l’entreprise ou à la durée du travail applicable dans l’établissement. Le nombre de personnes travaillant à temps partiel a fortement progressé au cours des années 1980 et 1990, avant de se stabiliser depuis le début des années 2000.

Hormis les cas où il est subi, le dispositif du temps partiel peut présenter l'avantage d'ouvrir la possibilité d'exercer une activité professionnelle à des personnes qui, eu égard aux contraintes liées notamment à leur état de santé ou à l'absence de modes de garde de leurs enfants, ne peuvent être salariées à temps complet. Cependant, même lorsqu'il est choisi, le recours au temps partiel n'est pas sans inconvénient pour les salariés concernés. A titre d'illustration, une étude publiée par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) indique que le travail à temps partiel peut avoir un impact plus ou moins significatif sur le montant de la pension de retraite.     

En examinant certains cas types de salariés à temps partiel (salarié cadre du privé; salarié non cadre du privé; carrière complète au SMIC)*, les auteurs de cette étude conviennent d'abord que l'impact du temps partiel sur le calcul de la durée d'assurance peut être limité. Ceci s'explique par le fait qu'en matière de validation des trimestres pour la retraite au titre d'une année civile, ce qui prime c'est le montant du salaire et non la durée du travail. A cet égard, il faut préciser que depuis le 1er janvier 2014, un salarié peut valider au cours d'une année donnée autant de trimestres que son salaire comporte de fois la valeur de 150 heures payées au SMIC (au lieu de 200 fois auparavant).

En revanche, en fonction de son positionnement dans la carrière et du montant du salaire afférent, "une activité réduite peut avoir un effet plus important sur le montant de la pension, calculée à partir du salaire de référence". Ainsi, dans le cas type d'un salarié non-cadre, "les périodes de temps partiel ont un effet négatif important sur le montant de pension, sauf pour celles qui ont lieu en début de carrière, c’est-à-dire au cours d’années qui ne font pas partie des 25 meilleures (servant au calcul du salaire de référence). Une période de travail à mi-temps de 10 années réduit ainsi le taux de remplacement à la CNAV de 2,9% si elle a lieu en milieu de carrière (entre 30 et 40 ans) et de 13,5 % si elle a lieu en fin de carrière".

A l'inverse, "dans le régime de base, les périodes travaillées à temps partiel n’ont aucune conséquence sur le montant de pension pour le cadre, comme pour l’assuré ayant cotisé toute sa carrière au niveau du SMIC", affirme l'étude. Pourquoi? S'agissant d'abord du salarié-cadre, les auteurs de l'étude expliquent que "l’absence d’impact est lié, pour les périodes de temps partiel en début de carrière, au fait que ces années ne font de toute façon pas partie des 25 meilleures années, et ne jouent donc pas sur le salaire de référence retenu pour calculer la pension. Pour les périodes de temps partiel en milieu et en fin de carrière, l’absence d’impact s’explique en revanche par le fait que les salaires sont écrêtés au niveau du plafond de la sécurité sociale ; or, vu le montant de salaire élevé du cas type de cadre, le fait de travailler à mi-temps ne l’empêche pas d’avoir un salaire annuel au moins égal au plafond". S'agissant ensuite d'une carrière entièrement cotisée au SMIC, "l’absence d’effet des périodes de temps partiel tient au fait que le faible niveau des rémunérations (même en cas de temps complet) conduit à ce que la pension soit portée au niveau du minimum contributif (sous l’hypothèse d’un départ au taux plein), et ne dépende donc pas, in fine, des revenus salariaux en cours de carrière".    

Enfin, rappelons que pour limiter l’effet potentiellement négatif sur le salaire de référence, outre l'abaissement du seuil de validation de trimestres de 200 à 150 heures SMIC, il est possible pour un salarié travaillant à temps partiel de surcotiser sur la base d’une rémunération à temps plein, avec l’accord de son employeur qui devra également surcotiser sur la part employeur (art. L. 241-3-1 du code de la sécurité sociale). Ce dernier peut également prendre en charge la part salariale.

* Les auteurs de l'étude rappellent que ces cas types ne sont pas représentatifs et ne sont donc pas généralisables à l'ensemble des salariés. Néanmoins, leur étude est éclairante quant aux mécanismes à l'oeuvre dans les carrières salariales.