Débat sur l’avenir des retraites : revue de presse.

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Conditions du travail

- Auteur(e) : Hakim EL FATTAH

Les acteurs de la négociation, la méthode et le calendrier :

Le président de la République a réuni lundi, à l’Elysée, dans le cadre du sommet social sur notamment l’avenir des retraites, les partenaires sociaux pour fixer la méthode et le calendrier des réformes à venir.

La concertation, a précisé le chef de l’Etat, commencera « début avril » quand le Conseil d’orientation des retraites (COR) fera connaître ses projections financières sur l’équilibre des régimes. « Sur la base de ce rapport qui sera publié au début du mois d’avril, Xavier Darcos et Eric Woerth, pour la partie publique, entameront des négociations avec les partenaires sociaux. Ces négociations se dérouleront aux mois d’avril, mai, juin, éventuellement août si nécessaire et, au début du mois de septembre, le gouvernement prendra ses responsabilités et déposera un texte », a déclaré M. Sarkozy. « Ce qui fait que la question de la pérennité de nos systèmes de retraites sera réglée à l’automne prochain », a-t-il ajouté (AFP, 15 février 2010 ; Les Echos, 15 février 2010 ; Le Monde, 16 février 2010).

Depuis plusieurs jours, les responsables syndicaux mettent en garde les pouvoirs publics contre « un passage en force ». Lundi, M. Sarkozy a exclu de conclure la réforme des retraites dés cet été. « Celle-ci ne sera pas adoptée par le parlement en juillet », a-t-il garanti aux partenaires sociaux » (Les Echos, 16 février 2010). Mais, « compte tenu du temps que les mesures que nous prendrons mettront à produire leur plein effet, si nous voulons sauver le système de retraite, nous ne pouvons plus différer les décisions », a prévenu le chef de l’Etat.

 

 

Les enjeux :

 

Comme l’a rappelé le chef de l’Etat lundi, il y a, aujourd’hui, « une retraite sur dix qui n’est pas financée ». Le rapport démographique cotisants/retraités risque de se dégrader « il y a 20 ans, il y avait deux cotisants, c’est-à-dire deux personnes qui travaillaient, pour financer la pension d’un retraité et qu’à terme malheureusement le rapport sera un retraité pour 1,2 cotisant », a-t-il rappelé. Résultat : « le déficit des régimes de retraite est aujourd’hui de l’ordre de 30 milliards d’euros ».

Bien que le débat sur les retraites soit focalisé sur la durée de cotisation, il faudra néanmoins s’attaquer aux inégalités qui résident, selon le professeur Michel Godet (Le Monde 12 février 2010), dans le nombre d’années où l’on va profiter de sa retraite. M. Godet pointe du doigt les inégalités face à la mort qui « sont telles que les ouvriers du privé vivent 9 ans de moins que les cadres et les employés du secteur public ».

Mais, le débat sur l’avenir des retraites met en lumière une dimension amplement plus problématique et plus difficile à résoudre qu’est le poids de la pratique. En effet, depuis une trentaine d’années, dans un contexte de chômage de masse, parmi les leviers mobilisé pour y faire face, on peut citer les dispositifs « préretraite » et l’existence pour les chômeurs seniors de conditions d’indemnisation-chômage leur permettant « d’attendre l’âge du taux plein en situation d’inactivité » (Jean-Olivier Hairault, Le Monde du 12 février 2010), en étant dispensé, à leur demande, de la recherche d’emploi.

Ces dispositifs reposaient sur le postulat suivant : le départ prématuré des seniors aurait des effets positifs sur notamment l’emploi des jeunes.

Aujourd’hui, bien que la donne juridique ait changé – certains dispositifs de préretraite ayant été supprimés, l’accès à d’autres est rendu plus difficile, la suppression de la dispense de recherche d’emploi à compter du 1er janvier 2012 - des pratiques, tout à fait légales, mais qui sont aux antipodes de la politique gouvernementale encourageant l’emploi des seniors perdurent.

Deux exemples récents illustrent la persistance de ces pratiques : la banque BNP PARISBAS qui avait indiqué le 19 janvier qu'elle étudiait un projet de mise en place d'un plan de départs volontaires à la retraite pour ses salariés âgés de plus de soixante ans, et qu’a annoncé deux jours après, avoir abandonné l'idée... sur intervention du ministre du Travail (Les Echos du 20 janvier 2010; Challenges du 21 janvier 2010; Le Figaro 21 janvier 2010; Le Monde du 21 janvier 2010).

Le second exemple est l'initiative du groupe pharmaceutique SANOFI-AVENTIS qui propose à une partie de ses salariés " une forme de préretraite à 55 ans " (Les Echos, 16 février 2009).

Par ailleurs, un autre problème est mis en avant à l’occasion de ce débat sur l’avenir des retraites qu’est la pénibilité. En effet, la loi sur les retraites du 21 août 2003 invitait les partenaires sociaux à engager des négociations interprofessionnelles au niveau national sur « la définition et prise en compte de la pénibilité » avant trois ans.

Lancées en 2005, ces négociations se sont terminées en juillet 2008 sur un échec, aucun accord n’ayant finalement été signé.

Le Président de la République a annoncé lundi, à l’occasion du sommet social, que le gouvernement mènera la concertation sur la pénibilité du travail avec les partenaires sociaux « en parallèle des retraites ». En tous les cas, les pouvoirs publics veulent « éviter de répondre au problème de la pénibilité uniquement par le départ anticipé à la retraite, le sujet invitant également à penser des solutions en termes de prévention et d’amélioration des conditions de travail » (Les Echos, 16 février 2010).

 

 


Les pistes d’actions :

 

Alors que s'ouvre le débat sur les retraites, le ministre du travail, M. Xavier Darcos a déclaré sur RMC "l'emploi des seniors est une des clés de la retraite". Selon lui, "la solution qui consiste à faire partir les gens très tôt n'est pas bonne pour eux, pour l'entreprise, ni pour les retraites", a-t-il dit, ajoutant : "Nous prévoyons d'interdire des plans sociaux qui s'appuient sur le départ prématuré des seniors." (Le Monde, 16 février 2010).

« La France est la traîne pour l’âge de départ et l’épargne privée », fait observer Mme Martine Durand dans Le Monde du 12 février 2010. « L’âge légal de départ est désormais de 65 ans en moyenne dans l’OCDE » rappelle-t-elle. S’agissant du niveau des retraites, les réformes conduites ces dernières années ont abouti à une baisse des taux de remplacement qui sont passés de 63% à 59% en moyenne dans les pays de l’OCDE (43% en Allemagne, 53% en France, 80% au Danemark. Pour compenser cette baisse, des dispositifs privés individuels ou professionnels encourageant les salariés à se constituer eux-mêmes une épargne ont été mis en place. Ainsi, au Canada, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, les pensions privées atteignent plus de 40% du revenu des retraités, contre environ 30% au Danemark, en Irlande et en Norvège et près de 20% en Allemagne. En France cette par n’est que de 8%.


Enfin, un autre paramètre peut être actionné : l’augmentation de la durée de cotisation. Cette dernière sera portée à 41 ans à l’horizon 2012 (loi Fillon de 2003). Mais, comme le relève M. Rémi Barroux (Le Monde, 15 février 2010), « un nouvel allongement de la durée de cotisation aurait pour conséquence de repousser l’âge effectif de départ à la retraite. Compte tenu de l’entrée de plus en plus tardive sur le marché du travail (22 ou 23 ans), il faudrait ainsi travailler jusqu’à 64 ans, voire 65 ans pour pouvoir bénéficier d’une retraite à taux plein. Les femmes qui ont souvent des carrières discontinues, avec des périodes d’inactivité plus longues et plus nombreuses que les hommes, risquent d’être les premières pénalisées ».