Compte personnel de prévention de la pénibilité : une approche novatrice en matière de santé et sécurité au travail ?

Conditions du travail
Publics prioritaires

- Auteur(e) : Hakim EL FATTAH

Article initialement mis en ligne le 15 décembre 2014

Mise à jour, le 11 janvier 2016

Préconisé par le rapport Moreau, le compte personnel de prévention de la pénibilité se veut « une réponse durable à la question de la pénibilité au travail »[1]. Son introduction dans le droit du travail (loi relative aux retraites du 20 janvier 2014) est motivée par le fait que « l’effort demandé aux assurés pour préserver l’équilibre des régimes de retraites ne peut méconnaitre l’impact des conditions de travail auxquelles certains travailleurs sont confrontés »[2], car « malgré l’augmentation de l’espérance de vie depuis 25 ans, les inégalités sociales face à la mort ne sont pas résorbées ». [3]      

La philosophie qui a présidé à la mise en place de ce compte a une double finalité : d’abord elle s’inscrit dans une perspective de prévention, l’enjeu étant que « les travailleurs soient davantage protégés lorsqu’ils sont exposés à des situations de travail pénible, par des mesures de prévention des risques professionnels appropriées, et qu’ils puissent sortir de ces situations dans le cours de leur carrière »[4]. Mais conscients que la prévention n’est pas la panacée, les pouvoirs publics jugent que « des mécanismes de compensation sont également nécessaires face à certaines situations »[5].

Plusieurs décrets publiés le 10 octobre dernier précisent le contenu de ce nouveau dispositif.

I- Ouverture du compte personnel de prévention de la pénibilité

A- Salariés concernés

A compter du 1er janvier 2015, chaque salarié (du privé ou du public) relevant du droit privé aura droit à un compte personnel de prévention de la pénibilité. Ce compte est effectif dès lors que des points sont acquis par le salarié.

Les salariés titulaires d'un contrat de travail de type particulier tels que notamment les apprentis ou les titulaires de contrat de professionnalisation sont également concernés (Instruction DGT-DSS n° 1 du 13 mars 2015 relative à la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité en 2015).

Quant aux travailleurs détachés en France, ils ne rentrent pas dans le champ d'application du compte.

D’après les estimations du gouvernement, près de 20% des salariés du secteur privé auront vocation à détenir un compte pénibilité.

B- Salariés exclus

Pour éviter tout problème de télescopage, les salariés affiliés à un régime spécial de retraite comportant un dispositif spécifique de reconnaissance et de compensation de la pénibilité n’acquièrent pas de droits au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité.

Un décret, publié le 27 décembre 2014, fixe la liste des régimes concernés :

- le régime de retraite des agents titulaires de la Banque de France;

- le régime de retraite des industries électriques et gazières;

- le régime de retraite des personnels de l’Opéra national de Paris;

- le régime de retraite des personnels de la Comédie-Française;

- le régime de retraite des clercs et employés de notaire;

- le régime de retraite du personnel de la Régie autonome des transports parisiens;

- le régime de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français; 

- le régime de retraite des marins;

- le régime de retraite du personnel titulaire du Port autonome de Strasbourg;

- le régime de retraite des personnels des mines et des entreprises assimilées.

N'acquièrent pas non plus de droits au titre du compte les salariés du particulier employeur et les travailleurs détachés en France (Instruction DGT-DSS n° 1 du 13 mars 2015 relative à la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité en 2015). 

II- Modalités d’acquisition des points

Comment s’acquièrent les points au titre du compte « pénibilité » ? L’acquisition des points intervient lorsque le salarié s’expose dans son travail, après application des mesures de protection collective et individuelle, à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels caractérisant la pénibilité, au-delà des seuils déterminés (les facteurs à prendre en compte et les seuils associés à chacun d’eux sont à consulterici). Deux catégories de salariés sont à distinguer : ceux dont la durée du contrat de travail est supérieure ou égale à un an et ceux dont cette durée est supérieure ou égale à un mois.  

A- Les salariés dont la durée du contrat de travail est supérieure ou égale à un an  

Concrètement, au terme de chaque année civile et au plus tard le 31 janvier de l’année suivante, l’employeur déclare dans le cadre de la déclaration annuelle des données sociales (DADS) le ou les facteurs de risques professionnels caractérisant la pénibilité auxquels les travailleurs titulaires d’un contrat de travail dont la durée est supérieure ou égale à l’année civile ont été exposés au-delà des seuils fixés, conformément aux informations qu’il a consignées dans la fiche de prévention des expositions. 

Sur le fondement de cette déclaration, la CNAV procède à l’inscription sur le compte « pénibilité » du salarié concerné de :

  • 4 points lorsqu’il est exposé à un seul facteur de risque professionnel ;
  • 8 points lorsqu’il est exposé à plusieurs facteurs de risques professionnels.

B- Les salariés dont la durée du contrat de travail est supérieure ou égale à un mois

Une déclaration similaire est faite concernant les travailleurs titulaires d’un contrat de travail dont la durée, supérieure ou égale à un mois, débute ou s’achève en cours d’année civile. 

La Caisse nationale d’assurance vieillesse agrège l’ensemble des déclarations transmises par le ou les employeurs et établit, pour chaque facteur de risque professionnel déclaré, sa durée totale d’exposition en mois au titre de l’année civile.

La règle étant que chaque période d’exposition de trois mois à un facteur de risque professionnel donne lieu à l’attribution d’un point et chaque période d’exposition de trois mois à plusieurs facteurs de risques professionnels donne lieu à l’attribution de deux points.     

Précisions :

Le suivi des expositions ne concerne pas les titulaires de contrats de travail d'une durée inférieure à un mois

Dans le cas d'un travailleur présent deux mois seulement (par exemple dans le cadre d'un CDD) sur un poste qui, en conditions habituelles de travail sur une période de 12 mois, n'implique pas une exposition supérieure aux seuils, l'employeur ne recense pas l'exposition même si, au cours des deux mois considérés, le travailleur a été, en raison par exemple d'un pic d'exposition lié à un phénomène de saisonnalité, exposé à des facteurs de pénibilité.  

Pour les travailleurs à temps partiel, il n'y a pas de modalité particulière d'appréciation du dépassement du seuil. 

(Instruction DGT-DSS n° 1 du 13 mars 2015 précitée).

C- Plafond des points pouvant être acquis

Le compte personnel de pénibilité étant avant tout à finalité préventive, le nombre de points acquis ne peut excéder 100 au cours de la carrière professionnelle du salarié.

D- Aménagements en faveur des salariés seniors

Pour les assurés nés avant le 1er juillet 1956, les points inscrits sont multipliés par deux. 

III- Modalités d’utilisation des points 

A- Des points aux droits : règles communes de la convertibilité

Les points inscrits sur le compte personnel de prévention de la pénibilité sont convertibles en droits. Ainsi, 

  • un point ouvre droit à 25 heures de prise en charge de tout ou partie des frais d’une action de formation professionnelle continue en vue d’accéder à un emploi non exposé ou moins exposé ;
  • 10 points ouvrent droit à un complément de rémunération dont le montant correspond à la compensation pendant trois mois d’une réduction du temps de travail égale à un mi-temps ;
  • 10 points ouvrent droit à un trimestre de majoration de durée d’assurance vieillesse.    

Les points inscrits sur le compte sont consommés point par point en ce qui concerne l’exercice du droit à la formation et par tranche de 10 points pour le passage à temps de travail réduit et pour le départ à la retraite anticipé. A noter que les 20 premiers points, inscrits sur le compte « pénibilité », doivent être consacrés à une ou des actions de formations. 

Le dispositif du compte « pénibilité » n’étant pas rétroactif - seules des expositions qui seront consignées à compter du 1er janvier 2015 ouvriront des droits - des aménagements en faveur des seniors sont prévus. Ainsi, 

  • aucun point n’est réservé aux actions de formation en ce qui concerne les assurés nés avant le 1er janvier 1960;
  • seuls les 10 premiers points doivent aller aux actions de formation s’agissant des assurés nés entre le 1er janvier 1960 et le 31 décembre 1962 inclus. 

B- Demande d’utilisation des points

Dès lors que des points sont inscrits sur son compte, le salarié peut demander à les utiliser soit directement en ligne sur le site www.preventionpenibilite.fr, soit en s’adressant à la caisse de retraite compétente. Il peut prendre connaissance du nombre de points disponibles sur son compte sur ce même site Internet.

Le silence gardé pendant plus de quatre mois par la caisse sur une demande d’utilisation des points vaut rejet de celle-ci. 

Le titulaire du compte « pénibilité » peut accéder en ligne (http://www.preventionpenibilite.fr/) à un relevé de points lui permettant de connaître le nombre de points disponibles pour les utilisations souhaitées et d’en éditer un justificatif. 

C- Les utilisations possibles 

Le compte personnel de prévention de la pénibilité ouvre droit à trois types de droits alliant les préoccupations liées à la prévention des expositions aux risques professionnels et la nécessité de prévoir des mécanismes de compensation.

1- Le droit à des actions de formation professionnelle

Le droit à la formation professionnelle généré par le compte « pénibilité » apparaît à la fois comme un moyen de prévention des situations de pénibilité en ce qu’il permet au salarié d’évoluer professionnellement vers des postes moins pénibles, mais il a aussi une dimension compensatrice, en ce que les points ne s’acquièrent qu’après que le salarié ait été exposé à des conditions de travail difficiles.     

a- Accès à un emploi non exposé ou moins exposé aux facteurs de pénibilité

Le salarié titulaire d’un compte « pénibilité » peut décider d’affecter, en tout ou partie, les points inscrits sur son compte à la prise en charge de tout ou partie des frais d’une action de formation professionnelle continue. Cette démarche doit lui permettre d’accéder à un emploi non exposé ou moins exposé à des facteurs de pénibilité.

Cette exigence est réputée satisfaite dès lors que la formation demandée par le salarié concerné correspond à l’une des formations facilitant son évolution professionnelle[6] ou que la demande est reconnue éligible par l’organisme ou l’employeur prenant en charge les frais de formation du demandeur.

b- Articulation entre le compte « pénibilité » et le compte personnel de formation

Lorsqu’il désire suivre une formation longue qualifiante nécessitant un nombre important d’heures de formation, le salarié peut mobiliser, en les combinant, les droits qu’il a acquis sur son compte personnel de formation (au maximum 150 heures) et ceux figurant sur son compte « pénibilité » (au maximum 100 points ; chaque point ouvrant droit à 25 heures de formation).

Dans ce cas, il joint à sa demande de formation un document précisant le nombre d’heures qu’il souhaite consacrer à sa formation au titre des heures capitalisées sur le compte « pénibilité », ainsi que les éléments précisant le poste occupé et la nature de la formation demandée.

Cette liaison opérée par le législateur entre les deux dispositifs traduit une préoccupation fortement d’actualité tendant à permettre aux salariés ayant travaillé dans des conditions difficiles d’accéder à des formations et qualifications utiles à leur évolution professionnelle.

c- Financement des actions de formation 

Les organismes en charge du compte « pénibilité », à savoir la Cnav et le réseau des Carsat, versent au financeur « primaire » de l’action de formation - qui peut être l’Opca ou l’employeur - le montant correspondant au nombre d’heures de formation effectivement suivies par le titulaire du compte « pénibilité ». A cette fin, le financeur doit fournir aux organismes compétents une attestation indiquant que la formation a été réellement suivie et a fait l’objet d’un règlement.

Le montant de l’heure de formation est fixé au regard du coût réel de la formation dans la limite de 12 euros (arrêté du 29 décembre 2015)

Toutefois, lorsque le coût de l’heure de formation excède ce plafond, une valorisation monétaire supplémentaire des heures de formation, dans la limite du plafond, peut être accordée sur demande du salarié par la prise en compte d’heures abondées sur le compte personnel de formation non utilisées pour cette formation ou par la mobilisation d’un nombre de points supplémentaires du compte « pénibilité ».

2- Le droit à un complément de rémunération en cas de réduction du temps de travail

Pour réduire son exposition à certaines conditions de travail caractéristiques de la pénibilité, le salarié peut faire valoir un certain nombre de points inscrits sur son compte « pénibilité » aux fins de faire financer un passage à temps partiel. Pour cela, il doit formuler une demande auprès de son employeur. Celui-ci est tenu d’y répondre favorablement sauf s’il peut démontrer que cette réduction est impossible compte tenu de l’activité économique de l’entreprise.   

Lorsque la demande du salarié est acceptée, sa durée de travail suite au passage à temps partiel ne peut être inférieure à 20% ni supérieure à 80% du temps de travail en vigueur dans l’établissement. Le coefficient de réduction de la durée du travail est apprécié par le rapport de la durée sollicitée à la durée antérieure de travail. Il est arrondi à deux décimales, au centième le plus proche.

Le nombre de jours pris en charge au titre du complément de rémunération est égal au produit suivant :

L’employeur doit s’adresser à la caisse de retraite dont relève son salarié pour obtenir le remboursement de la somme compensatoire (comprenant le complément de salaire et les cotisations et contributions sociales). Pour ce faire, il transmet par tout moyen à la caisse de retraite compétente une copie de l’avenant au contrat de travail ainsi que les éléments nécessaires au remboursement (qui seront définis par arrêté ministériel).         

3- Le droit à la majoration de la durée d’assurance vieillesse

Les salariés titulaires d’un compte « pénibilité » disposent d’une troisième possibilité. Ils peuvent en effet utiliser certains points du compte « pénibilité » pour financer une majoration de leur durée d’assurance vieillesse, dans la limite de 8 trimestres, leur permettant un départ à la retraite avant l’âge légal (abaissé dans ce cas à due concurrence du nombre de trimestres attribués au titre de la majoration).   

IV- Gestion des comptes, contrôle et réclamations

A- La gestion du compte de prévention de la pénibilité 

La gestion du compte « pénibilité » est confiée à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) en ce qui concerne l’Ile-de-France et au réseau des caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) pour ce qui est du reste de L'Hexagone.

Ainsi, chaque année, ces organismes enregistrent sur le compte « pénibilité » les points correspondant aux données déclarées par l’employeur dans le cadre de la déclaration annuelle des données sociales, et portent annuellement à la connaissance du travailleur les points acquis au titre de l’année écoulée ainsi que les modalités de contestation.

Un service d’information en ligne est mis à la disposition des travailleurs titulaires d’un compte « pénibilité » par les CARSAT, leur permettant de connaître : 

  • le nombre de points qu’ils ont acquis et consommés au cours de l’année civile précédente,
  • le nombre total de points inscrits sur leur compte,
  • les utilisations possibles de ces points.       

Chaque salarié titulaire d’un compte « pénibilité » est informé par voie électronique, au plus tard le 30 juin, que l’information afférente à son compte est disponible sur le site dédié. A défaut, cette information est portée à sa connaissance par lettre simple.  

B- Contrôle de l’effectivité et de l’ampleur des expositions à la pénibilité 

Les CARSAT peuvent procéder à des contrôles de l’effectivité et de l’ampleur de l’exposition aux facteurs de risques professionnels ainsi que de l’exhaustivité des données déclarées, sur pièces et sur place, ou faire procéder à ces contrôles par des organismes habilités.    

Dans ce cadre, les employeurs sont tenus d’adresser ou de présenter aux agents des caisses de retraite tout document leur permettant l’exercice de leur mission.

1- Contrôle sur place

Dans ce cas, la caisse de retraite compétente adresse à l’employeur un avis de passage qui mentionne la date et l’heure du contrôle, l’objet du contrôle ainsi que la possibilité pour l’employeur de se faire assister des conseils de son choix pendant le contrôle. Cet avis, transmis par tout moyen permettant d’en attester la date de réception, doit parvenir au moins 15 jours avant la date de la première visite.

2- Contrôle sur pièces

Lorsqu'il s'agit d'un contrôle sur pièces, un avis de contrôle mentionnant l’objet du contrôle, la date de début du contrôle, la liste des documents et informations nécessaires à l’exercice du contrôle et la date limite de leur transmission à la caisse retraite est transmis à l’employeur par tout moyen permettant d’en attester la date de réception. 

3- L’après-contrôle   

A l’issue du contrôle, deux situations peuvent se présenter : soit les agents de contrôle n’ont pas d’observations à faire, auquel cas ils en informent l’employeur et les salariés concernés, soit ils demandent à l’employeur d’apporter des modifications aux éléments ayant conduit à la détermination du nombre de points et lui impartissent un délai d’un mois pour présenter ses observations. A l’expiration de ce délai, la caisse de retraite notifie sa décision avec mention des voies et délais de recours par tout moyen permettant d’en attester la date de réception à l’employeur et à chacun des salariés concernés.

La notification de la décision de la caisse adressée à l’employeur mentionne les périodes concernées par sa décision et les modifications apportées aux déclarations de l’employeur. Suivant les cas, elle mentionne le montant des cotisations dont l’employeur peut demander le remboursement ou le montant supplémentaire de cotisations dont il doit s’acquitter auprès de l’organisme de recouvrement. Ces montants sont calculés sur la base des données relatives à l’assiette des cotisations sociales qui figurent dans la déclaration annuelle des données sociales.

La notification de la décision de la caisse adressée au salarié mentionne le nombre de points inscrits sur son compte personnel de prévention de la pénibilité au titre des périodes concernées.

La caisse de retraite corrige, le cas échéant, le nombre de points inscrits sur le compte personnel de prévention de la pénibilité du salarié concerné si les points n’ont pas déjà été utilisés.

La caisse de retraite ne peut engager un contrôle de l’effectivité ou de l’ampleur de l’exposition aux facteurs de risques professionnels d’un salarié pour les périodes d’activité ayant fait ou faisant l’objet d’une réclamation de ce salarié et ayant donné lieu à une décision du directeur de la caisse de retraite.

C- Réclamation obligatoire auprès de l’employeur 

Lorsque le travailleur titulaire d’un compte « pénibilité » est en désaccord sur le nombre de points qui lui a été communiqué par la caisse de retraite à partir des données déclarées par l’employeur ou qu’il n’a reçu aucune information relativement à son compte de la part de la caisse de retraite dans le délai prévu (au plus tard le 30 juin) et que cette situation résulte d’un différend avec son employeur sur l’exposition elle-même, il doit, préalablement à la saisine de la caisse, porter sa réclamation devant l’employeur.

Dès réception de la réclamation, l’employeur indique au salarié qu’à défaut de réponse de sa part dans le délai de deux mois à compter de sa réception, celle-ci est réputée rejetée. Il lui indique également que sa réclamation est susceptible d’être portée devant la caisse dans un délai de deux mois à compter de l’expiration du délai précédent.

Le salarié a deux mois après la décision expresse ou implicite de rejet de l’employeur pour porter sa réclamation devant la caisse de retraite.

Dans l’hypothèse où l’employeur fait droit à la réclamation du salarié, il en informe la caisse de retraite, corrige les données dans la déclaration annuelle des données sociales et régularise les cotisations versées à l’organisme de recouvrement.

A l’inverse, lorsque l’employeur rejette la réclamation du salarié, celui-ci se trouve alors fondé à saisir la caisse de retraite qui lui adresse en retour un accusé de réception indiquant qu’à défaut de réponse dans le délai de six mois à compter de la réception, sa réclamation est réputée rejetée et est susceptible d’être contestée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale dans un délai de deux mois.

En tout état de cause, l'action du salarié en vue de l'attribution de points ne peut intervenir qu'au cours des trois années civiles suivant la fin de l'année au titre de laquelle des points ont été ou auraient dû être portés au compte.

D- Redressement

Pendant cinq ans à compter de la fin de l’année au titre de laquelle des points ont été ou auraient dû être inscrits au compte « pénibilité », les caisses de retraite peuvent notifier à l’employeur et au salarié les modifications qu’ils souhaitent apporter aux éléments ayant conduit à la détermination du nombre de points qui y sont inscrits.

E- Régularisation et pénalité

En cas de déclaration inexacte faite par l’employeur des expositions de ses salariés aux facteurs de pénibilité, le montant des cotisations versées par l’entreprise au fonds chargé du financement des droits liés au compte « pénibilité » et le nombre de points qui y sont affectés sont régularisés.

En plus de la régularisation, l’employeur peut également, pour chaque salarié ou assimilé pour lequel l’inexactitude est constatée, faire l’objet d’une sanction financière prononcée par le directeur de la CARSAT, dans la limite de 50% du plafond mensuel de la sécurité sociale (plafond fixé à 3 170 euros pour 2015).     

Lorsque l’entreprise utilisatrice de main d'oeuvre ne transmet pas ou pas convenablement à l’entreprise de travail temporaire les informations nécessaires à l’établissement par cette dernière de la fiche individuelle et que de ce fait cette dernière fait une déclaration inexacte, elle encourt dans ce cas une pénalité identique. 

F- Contentieux

Les différends relatifs aux décisions des CARSAT relèvent des dispositions régissant le contentieux général de la sécurité sociale et sont jugés par les tribunaux des affaires de la sécurité sociale.

En cas de recours juridictionnel contre une décision de la CARSAT, le salarié et l'employeur sont parties à la cause. Ils sont mis en mesure, l'un et l'autre, de produire leurs observations à l'instance.     

V- Financement du compte de prévention de la pénibilité 

Le financement des droits liés au compte « pénibilité » est confié à un fonds spécifique, placé sous la tutelle des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget.   

A- Les dépenses du fonds

Le fonds aura pour mission :

- la prise en charge de tout ou partie des sommes exposées par les financeurs des actions de formation professionnelle suivies par les salariés dans le cadre du compte « pénibilité » ;

- la prise en charge des compléments de rémunération et des cotisations et contributions légales et conventionnelles correspondantes des salariés bénéficiant d’un passage à temps partiel ;

- le remboursement au régime général de sécurité sociale des sommes représentatives de la prise en charge des majorations de durée d'assurance intervenues dans l’optique d’une retraite anticipée ;  

- la prise en charge des dépenses liées aux frais d’expertise exposés par les commissions chargées d’émettre un avis lorsque le salarié est en désaccord avec son employeur sur l’effectivité ou l’ampleur de son exposition aux facteurs de risques professionnels et les dépenses liées aux frais des expertises demandées par les juridictions dans le cadre de ce contentieux ;     

 - le remboursement aux CARSAT des frais exposés au titre de la gestion du compte « pénibilité ». 

B- Les recettes du fonds 

 Les recettes du fonds sont constituées des cotisations à la charge des employeurs suivantes : 

  • une cotisation dite "de base" versée par les employeurs au titre des salariés qu’ils emploient et qui entrent dans le champ d’application du compte « pénibilité ». Il importe peu que ces salarié soient effectivement et réellement exposés aux facteurs de pénibilité. 

Initialement cette cotisation devait être fixée, selon le texte de la loi relative aux retraites, dans la limite de 0,2% des rémunérations ou gains perçus par les salariés exposés à la pénibilité. Néanmoins, suite aux nombreuses protestations émanant du monde patronal, le gouvernement a décrété un sursis sur le paiement de cette cotisation en la rendant nulle pour les années 2015 et 2016. Et ce n’est qu’à compter de l’année 2017 que les employeurs en seront redevables à hauteur de 0,01%.    

  • une cotisation dite "additionnelle" comprise entre 0,1 et 0,8% des rémunérations ou gains perçus par les salariés exposés à la pénibilité, est versée par les employeurs ayant exposé au moins un de leurs salariés à la pénibilité. Pour les années 2015 et 2016, ce taux est fixé, par décret du 9 octobre 2014, à 0,1% et à compter de l’année 2017 à 0,2%.  

En cas d’exposition simultanée des salariés à plusieurs facteurs de pénibilité, un taux spécifique compris entre 0,2 et 1,6% est appliqué. Pour les années 2015 et 2016, ce taux est fixé à 0,2% et à compter de l’année 2017 à 0,4%.   

Il convient de souligner que la loi relative aux retraites de 2014 avait prévu un taux de cotisation additionnelle compris entre 0,3 et 0,8%; les taux fixés par décret étaient par conséquent inférieurs aux dispositions de la loi. Cette anomalie n'a pas échappé au syndicat CGT- Force ouvrière qui a saisi le Conseil d'Etat d'un recours tendant à faire annuler ces dispositions réglementaires. Dans une décision rendue le 4 mars dernier, le Conseil d'Etat a jugé illégales ces dispositions "en tant qu'elles n'ont pas fixé des taux de cotisation plus élevés" (CE 4 mars 2016, n° 386354).

La cotisation additionnelle n’est pas due pour les contrats de travail inférieurs à un mois.

Le principe de la compensation entre les régimes obligatoires de sécurité sociale s’applique aux cotisations « pénibilité ».

L'URSSAF indique que la date limite de paiement de la cotisation additionnelle correspond à celle de déclaration des facteurs de pénibilité, soit la déclaration sociale nominative :

  •     due au titre de décembre pour les salariés dont le contrat demeure en cours à la fin de l’année civile,
  •     due au titre de la paie effectuée au titre de la fin du contrat de travail, pour les salariés dont le contrat se termine en cours d’année.

Concernant les entreprises non utilisatrices de la DSN, la date limite de paiement reste fixée au 31 janvier de l’année suivante (peu importe les périodes et durées de travail).

 



 

 

[1] Etude d’impact relative à la loi sur les retraites de janvier 2014, page 19  

 

 

 

[2]Ibid.

 

 

 

[3]Ibid., p. 44 

 

 

 

[4]Ibid. p. 19

 

 

 

[5]Ibid.

 

 

 

[6] figurant sur au moins une des listes suivantes : 1° La liste élaborée par la commission paritaire nationale de l'emploi de la branche professionnelle dont dépend l'entreprise ou, à défaut, par un accord collectif conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et les organisations syndicales de salariés signataires d'un accord constitutif de l'organisme collecteur paritaire des fonds de la formation professionnelle continue à compétence interprofessionnelle auquel l'entreprise verse la contribution qu'elle doit sur le fondement du chapitre Ier du titre III du présent livre ; 2° Une liste élaborée par le Comité paritaire interprofessionnel national pour l'emploi et la formation, après consultation du Conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles ; 3° Une liste élaborée par le comité paritaire interprofessionnel régional pour l'emploi et la formation de la région où travaille le salarié, après consultation des commissions paritaires régionales de branche, lorsqu'elles existent, et concertation au sein du bureau du comité régional de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles mentionné à l'article L. 6123-3 dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.