Deux ans après l'entrée en vigueur de l’obligation, pour certaines entreprises, de négocier un accord ou d’adopter un plan d’action en faveur de la prévention de la pénibilité, le ministère du travail dresse un bilan provisoire des négociations.
Extraits du Bilan des conditions de travail 2013 (pp. 378-280)
Éléments quantitatifs
Au 31 janvier 2014 et depuis l'entrée en vigueur de ce dispositif, le nombre d'entreprises ayant conclu un accord ou élaboré un plan d'action relatif à la pénibilité est de 5 400 ; pour ce qui est du nombre cumulé d'accords de branche relatifs à la prévention de la pénibilité conclus et transmis à la Direction générale du travail, il est de seize, dont cinq nouveaux accords signés au cours de l'année 2013 :
- onze accords s’inscrivent dans le dispositif “1 % pénibilité”. Ils concernent les branches du bâtiment et des travaux publics (BTP), du commerce du détail et de gros à prédominance alimentaire, des entreprises sociales pour l’habitat, de l’assainissement et de la maintenance industrielle, de la fabrication et du commerce de produits pharmaceutiques, de l’industrie pétrolière et de l’industrie du bois. L’année 2013 a permis la conclusion de quatre nouveaux accords dans les branches suivantes : œufs et industries en produits d’œufs, remontées mécaniques et domaines skiables, industrie de la chaussure ainsi que l’aide, l’accompagnement, les soins et les services à domicile.
- deux accords sont des accords spécifiques, qui ne s’inscrivent pas dans le cadre issu de la loi du 9 novembre 2010. Ils ont été conclus dans la branche des transports routiers et activités auxiliaires du transport (accord de 2010 antérieur à l’entrée en vigueur du dispositif pénibilité) et celle des ports et manutention (s’inscrivant ainsi dans le dispositif issu de la loi du 4 juillet 2008 sur les installations portuaires).
- trois accords sont des accords de méthode visant soit à outiller les entreprises de la branche pour qu’elles construisent leurs propres accords (branche de la transformation laitière), soit à cadrer la future négociation de branche sur la pénibilité (remontées mécaniques et domaines skiables). Le dernier accord de méthode, conclu le 26 avril 2013, concerne l’inter-secteur papier cartons. Il fait suite au constat d’échec de la négociation sur la pénibilité et vise à diffuser un plan d’action afin d’aider les entreprises à identifier les différents leviers de lutte contre la pénibilité (mobilisation de l’organisme paritaire collecteur agréé – OPCA, diffusion d’une liste de cabinets de consultants, mise en place du tutorat, etc.).
Il est encore prématuré de dresser un bilan complet de l’action des branches en matière de pénibilité. Si l’on peut d’ores et déjà tenter de distinguer quelques grandes tendances, détaillées dans le bilan qualitatif ci-après, de la manière dont les branches se sont approprié la démarche de prévention de la pénibilité au travers de la négociation, il n’est pas exclu que l’engagement du processus législatif ayant conduit à l’adoption de la loi nº 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites et la perspective de la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) aient eu pour effet de freiner temporairement le mouvement de négociation sur le sujet, dans l’attente de l’adoption d’un nouveau cadre stabilisé en la matière.
Éléments qualitatifs
L’analyse du contenu des nouveaux accords conclus en 2013 montre que seule une branche a élaboré un réel diagnostic des situations de pénibilité rencontrées dans son secteur. La branche des remontées mécaniques et domaines skiables a ainsi élaboré, avec l’aide d’un consultant, un diagnostic précis grâce à une enquête conduite auprès d’un échantillon de sept entreprises. En 2012, quatre des sept branches qui avaient conclu des accords “1 % pénibilité” avaient également adopté une démarche de diagnostic, afin d’adapter les mesures de prévention au regard des spécificités de chaque secteur. Il s’agit en particulier de la branche du bâtiment et des travaux publics ainsi que celle des sociétés anonymes et fondations d’HLM.
S’agissant des thèmes de négociation retenus, ce sont en premier lieu ceux concernant les conditions de travail : l’adaptation et l’aménagement du poste de travail ainsi que l’amélioration des conditions de travail, notamment au plan organisationnel. Ils font l’objet de mesures concrètes : études de poste en cas d’achat d’un nouveau matériel dans la branche des oeufs et industries en produits d’œufs, achat ou rénovation de matériel afin de prendre en compte des avancées réalisées en termes d’ergonomie dans la branche de l’industrie de la chaussure. Au plan organisationnel, deux branches (remontées mécaniques et domaines skiables et industrie de la chaussure) prévoient de favoriser la diversification des tâches des salariés exposés à des facteurs de pénibilité grâce à la rotation des postes. Enfin, des actions de formation sont souvent prévues, soit dans une optique de prévention des risques (aide, accompagnement, soins et services à domicile, remontées mécaniques et domaines skiables, œufs et industries en produits d’œufs), soit dans une optique de reconversion (oeufs et industries en produits d’œufs et industries de la chaussure).
Quant aux modalités de suivi de la mise en œuvre des engagements figurant dans les accords, deux d’entre eux prévoient la réalisation d’un bilan annuel par la commission paritaire de la branche (industrie de la chaussure, aide, accompagnement, soins et services à domicile), les deux autres préférant un bilan à la fin de la période triennale. Par ailleurs, les trois quarts des accords conclus prévoient des objectifs et des indicateurs adossés à chacun des thèmes retenus. La plupart de ces objectifs concernent toutefois la réalisation des actions prévues par les accords (accompagnement de 100 % des salariés, réalisation de 80 % des études, etc.) plutôt que la réduction directe de l’exposition des salariés aux facteurs de pénibilité.