Avis d’information sur les textes applicables à l’entreprise : son absence n’entraîne pas l’inopposabilité des accords concernés

Qualité de vie au travail

- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

Les textes conventionnels applicables à l’entreprise peuvent-ils être opposables aux salaries, même si toutes les formalités d'information n'ont pas été respectées ? Telle était la question à laquelle, la Cour de Cassation, a été invitée à répondre. Dans un arrêt rendu le 5 juillet 2023, la Haute juridiction juge que l’absence de ces formalités n’entraine pas l’inopposabilité des textes conventionnels aux salariés, dans la mesure où ceux-ci en avaient bien eu connaissance dans les faits.

Pour rappel :

Selon l’article L2262-5 du Code du travail :

« Les conditions d'information des salariés et des représentants du personnel sur le droit conventionnel applicable dans l'entreprise et l'établissement sont définies par convention de branche ou accord professionnel.

En l'absence de convention ou d'accord, les modalités d'information relatives aux textes conventionnels applicables sont définies par voie réglementaire ».

Ainsi à ce titre, l’article R2262-1 du même Code dispose que :

« A défaut d'autres modalités prévues par une convention ou un accord conclu en application de l'article L. 2262-5, l'employeur :

1° Donne au salarié au moment de l'embauche une notice l'informant des textes conventionnels applicables dans l'entreprise ou l'établissement ;

2° Tient un exemplaire à jour de ces textes à la disposition des salariés sur le lieu de travail ;

3° Met sur l'intranet, dans les entreprises dotées de ce dernier, un exemplaire à jour des textes. ».

In fine, selon l’article R2262-3 du Code du travail, dans sa version du 01 mai 2008, applicable en l’espèce :

« Un avis est affiché aux emplacements réservés aux communications destinées au personnel.

Cet avis comporte l'intitulé des conventions et des accords applicables dans l'établissement. La mention générique « Accords nationaux interprofessionnels » peut être substituée à l'intitulé des accords de cette catégorie.

L'avis précise où les textes sont tenus à la disposition des salariés sur le lieu de travail ainsi que les modalités leur permettant de les consulter pendant leur temps de présence. ».

A noter qu’après l’entrée en vigueur d'un décret du 20 octobre 2016, ledit avis est désormais communiqué par tout moyen aux salariés.

En l’espèce, un salarié engagé en qualité d'agent de télésurveillance, a saisi les juges prud’homaux pour contester l’application d’un accord de modulation du temps de travail et obtenir des sommes au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents et au titre du dépassement des durées maximales de travail. Le salarié soutenait que ledit accord n’avait pas fait l’objet de l’avis informatif exigé par le Code du travail et, qu’ainsi, l’employeur n’avait pas satisfait à l’intégralité de ses obligations d’information.

La Cour d’appel donne droit à sa demande, en estimant que l’accord litigieux lui était inopposable. En effet, la Cour relève que, même si ledit accord était à la disposition des salariés dans la salle de pause et mentionné dans le contrat du travail du salarié, « il ne ressort pas […] que cette mise à disposition a fait l'objet de l'avis prescrit par l'article R. 2262-3 précité, ni que [le salarié] en avait connaissance ». L’employeur s’est pourvu ainsi en cassation.

La Cour de Cassation rejette pourtant l’argumentation des juges du fond. Tout en rappelant les modalités d’information sur les textes conventionnels applicables, exigées par le Code du travail, elle en fait une interprétation moins formaliste. La Cour juge en effet que « le salarié avait été informé au moment de son embauche du texte conventionnel applicable dans l'entreprise », et que « celui-ci (l’accord) était mis à disposition en salle de pause, en sorte qu'il était accessible ».

Cass., Soc., Pourvoi nº 21-25.158