Accord Renault du 4 février 2011 sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

Gestion de l'emploi

- Auteur(e) : Hakim El Fattah

Souhaitant marquer "sa volonté d'anticiper au mieux les évolutions des métiers", le constructeur automobile Renault a signé le 4 février avec les syndicats (CFDT, CFTC, CFE-CGC, FO) un accord relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC).

L' accord est conclu pour une durée de trois ans. Il s'applique à toutes les entités de Renault situées en France et relevant de la branche automobile. Les filiales industrielles MCA, SOVAB, STA, ACI Villeurbanne, SOFRASTOCK Internationale, Alpine Renault, ainsi que la fonderie de Bretagne sont concernées par cet accord. 

On se souvient que l' annonce en mois de novembre dernier par Renault de son intention d'inclure dans cet accord un dispositif permettant à certains salariés une cessation anticipée d'activité, avait suscité des critiques et notamment de la part du gouvernement qui reprochait au constructeur automobile de s'engager dans une démarche contraire à la loi portant réforme des retraites du 9 novembre 2010 et aux politiques publiques tendant à encourager l'emploi des salariés seniors.

Aujourd'hui, Renault souligne que son accord GPEC ne part pas d' un "constat de difficultés économiques ou de la nécessité d'engager des restructurations", mais s'inscrit dans "la stratégie du groupe" et vise, sur le plan collectif, à "mieux anticiper et accompagner à moyen et long terme l'évolution des métiers, des compétences et des emplois", et à titre individuel, "il doit permettre à chaque collaborateur d'enrichir ses compétences tout au long de son parcours professionnel". 

Construction de prévisions triennales

Pour ce faire, les parties signataires de l'accord insiste sur l'intérêt de faire chaque année une prévision en tendance sur trois ans "glissants" en s'appuyant sur les différents scenarii des plans d'affaires établis annuellement en projection des trois années à venir, ainsi que sur les analyses de la démographie et des hypothèses possibles de son évolution. 

Il s'agira de faire apparaître sur la période et en fonction des éléments connus ou prévisibles, les métiers "stables", les métiers en "augmentation quantitative" et/ou en "évolution sur le plan qualitatif" et les métiers "en déclin" sous une forme graphique simple, désignés comme les métiers "sensibles".

Toute une batterie d'actions et de mesures est prévue par l'accord en vue d'une "gestion dynamique des compétences" :

Analyse collective de l'emploi et des compétences;

Définition des métiers "en évolution";

Mise en place d'un observatoire des emplois et des compétences;

Mobilisation en faveur de la formation

Les parties signataires s'engagent, par "un dialogue social renforcé", à créer "les conditions d'une nouvelle mobilisation en faveur de la formation tout au long de la vie professionnelle". Les leviers mobilisables à cet effet sont:  

  • Le plan de formation;
  • le contrat et période de professionnalisation;
  • la validation des acquis de l'expérience;
  • les transmissions des savoirs et des compétences et développement du tutorat;
  • l'entretien professionnel et l'entretien de deuxième partie de carrière;
  • le bilan professionnel et le bilan de compétences.

Encourager de la mobilité

Pour permettre à ses salariés de développer leur parcours professionnel et d'équilibrer, le cas échéant, les besoins de chacun des établissements de Renault en fonction de la charge de travail, l'accord prévoit un dispositif de mobilité géographique. Pour encourager les salariés dans cette dynamique, il est prévu une indemnité supplémentaire d'aide à la mobilité géographique pour les salariés des bassins Nord et Normandie de :

- 5 mois de salaires pour la mobilité vers la région parisienne et la Lorraine;

- 3 mois de salaires pour les salariés acceptant une mobilité au sein du même bassin et vers les bassins Nord et Normandie, ainsi que vers les sites de Villeroy et Le Mans.

Dans le même ordre d'idées, l'accord rappelle qu'un processus de détachement intersites industriels de personnels a été mis en place : le salarié travaille de manière provisoire dans un autre site que le sien. Pour les détachements supérieurs à 6 mois, une indemnité supplémentaire est prévue : 

- un demi-mois de salaire par période de 6 mois dans le cas de détachement intra bassins;

- un mois de salaire par période de 6 mois dans le cas de détachement inter bassins.

Il est également prévu pour les salariés qui souhaitent tester d'autres activités professionnelles la possibilité de bénéficier d'un congé sabbatique, d'un congé pour création d'entreprise ou encore d'un congé de solidarité internationale. Leur contrat de travail est suspendu pendant ces congés. Le salarié peut également, en commun accord avec son employeur, suspendre son contrat de travail afin d'exercer une activité salariée dans une autre entreprise. 

La mobilité peut s'exercer aussi dans le cadre d'un prêt de main d'oeuvre : le salarié est placé par l'entreprise prêteuse sous l'autorité de l'entreprise utilisatrice et son contrat de travail Renault n'est ni suspendu ni rompu.

Prise en compte de la pénibilité

Suite à la réflexion engagée au sein du groupe sur les conditions de travail, les parties signataires prévoient de mettre en place un dispositif d'aménagement de fin de carrière pour les salariés volontaires APR et ETAM en usine, âgés de 58 ans et plus, occupés en horaires décalés depuis 15 ans ou l'ont été pendant 15 ans ou reconnus en IPP d'au moins 10%. 

Les salariés qui souhaitent bénéficier du dispositif demeurent salariés de l'entreprise. Au cours de la période de dispense d'activité, l'entreprise peut, toutefois, les solliciter, s'ils sont volontaires, pour reprendre temporairement une activité. Ils peuvent également de leur propre initiative demander une reprise d'activité.

Pendant toute la durée de dispense d'activité, dont la durée maximale est de 3 ans, le salarié reçoit des appointements bruts annuels s'élevant à 75% de la rémunération annuelle calculée sur la base des 12 derniers mois précédant l'entrée dans le dispositif, versés en 12 mensualités égales. Cette rémunération forfaitaire est soumise à l'ensemble des cotisations sociales et fiscales.

Pendant la période de dispense d'activité, le salarié n'acquiert aucun droit à congés payés ni à capitalisation en CTC, CTI ou CEF, sauf période où il reprendrait une activité. En revanche, s'il accepte et si les régimes concernés l'autorisent, les cotisations retraite sont versées comme s'il travaillait à taux plein et, lors de son départ, l'indemnité de départ à la retraite est calculée sur la base d'un salaire à taux plein reconstitué. 

Tenant compte des dispositions légales relatives à la mise à la retraite d'office qui ne peut intervenir avant l'âge de 70 ans, l'accord indique que le salarié qui ne souhaite pas procéder à la liquidation de ces droits à pension à l'issue de la période de suspension, sera autorisé à reprendre son activité. 

Enfin, l'adhésion au dispositif peut s'effectuer à compter du 31 juillet 2011, pour s'achever au 31 décembre 2013.

Recrutements

Le groupe Renault s'engage à "maintenir son implantation industrielle en France" et envisage sur la durée de l'accord :

- de recruter 400 personnes sur le périmètre industriel dès lors que les marchés seraient bien aux niveaux prévus aujourd'hui pour les 3 années du plan et dès lors que les objectifs de compétitivité seraient tenus.

- de recruter 1600 personnes sur le périmètre des activités d'ingénierie et tertiaire, dès lors que les évolutions constatées permettront de maintenir les niveaux d'effectifs nécessaires à l'atteinte de la performance.

- de recruter au moins 2700 personnes dans les différentes formules de l'alternance.

Enfin, seront chargés de coordonner la démarche GPEC au sein du groupe Renault plusieurs acteurs : les directeurs et conseillers chargés du développement des carrières et des compétences, les structures corporate, les services DRH. Une instance paritaire de dialogue sur la stratégie de l'entreprise est mise en place.