11e Baromètre de la perception des discriminations dans l’emploi : Enquête du Défenseur Des Droits

Non-discrimination
Égalité professionnelle F/H
Égalité dans le travail

- Auteur(e) : Khalida BENZIDOUN

Le 27 septembre 2018, le Défenseur Des Droits a publié le « 11ème Baromètre sur la perception des discriminations dans l’emploi ».

 

Le Défenseur des droits est une institution indépendante de l'État créée en 2011 et inscrite dans la Constitution[1]. Ses missions consistent à défendre les personnes dont les droits ne sont pas respectés, permettre l'égalité de tous et toutes dans l'accès aux droits.

 

Toute personne physique morale peut le saisir directement et gratuitement lorsqu'elle :

  • pense qu'elle est discriminée par un particulier, un représentant de l'ordre public ou privé
  • a des difficultés dans ses relations avec un service public
  • estime que les droits d'un enfant ne sont pas respectés

 

En effet, chaque année, le DDD et l’OIT publient en partenariat un baromètre sur la perception des discriminations dans l’emploi. Cette année, l’étude se concentre sur « l’exposition de la population active aux propos et comportements :

  • sexistes
  • homophobes
  • racistes
  • liés à la religion
  • handiphobes
  • liés à l’état de santé au travail.

 

Il en ressort que tant dans le secteur public que privé, près de 25 % de la population active « se déclare avoir fait l’objet de propos ou comportements stigmatisant dans l’environnement professionnel ». Les propos sexistes et racistes sont les plus fréquents.

 

« L’étude met ainsi en lumière le fait que se cumulent différentes formes d’« attitudes hostiles au travail », illustrées par trois types de situations :

les expériences de « propos ou comportements stigmatisants », qui regroupent les expériences de propos ou comportements sexistes, homophobes, racistes, liés à la religion, handiphobes ou liés à l’état de santé, rapportées par les personnes qui en ont directement été l’objet ;

les « expériences de discrimination », entendues comme le traitement défavorable subi au travail en lien avec au moins l’un des critères suivants : sexe, grossesse ou maternité, âge, origine ou couleur de peau, religion, état de santé ou situation de handicap ;

les comportements et situations de « dévalorisation du travail », regroupant des situations de dépréciation ou de déni de reconnaissance du travail ou des compétences. Ces situations peuvent renvoyer soit à une dévalorisation injuste du travail et la manière dont il est mené, une sous-estimation des compétences, ou l’attribution de tâches ingrates ou dévalorisantes ».

 

L’enquête souligne également que « le fait d’avoir été confronté à un propos ou un comportement en lien avec un critère de discrimination multiplie par 4 le risque d’être confronté à une situation de dévalorisation du travail ».

Aussi, « face à ce constat, le DDD recommande d’intégrer la lutte contre les propos et comportements sexistes, racistes, homophobes, liés à la religion, handiphobes ou lié à l’état de santé à une démarche de prévention des risques professionnels ».

 

« L’originalité de ce baromètre réside dans le fait qu’il adopte une analyse que le Défenseur des droits qualifie lui-même d’« intersectionnelle » pour permettre de mieux appréhender les discriminations au travail.

Concept anglo-saxon créé en 1989 par une juriste féministe américaine, Kimberlé Crenshaw, l’intersectionnalité invite à envisager simultanément plusieurs formes de discrimination.

Le baromètre relève ainsi que les personnes les plus exposées à un « continuum d’attitudes hostiles au travail » sont les femmes non-blanches de 18 à 44 ans et insiste ainsi sur la nécessité d’étudier en même temps différents critères de discrimination – le sexe et la couleur de peau en l’occurrence – pour mieux discerner les discriminations à l’œuvre[2] ».

 

Les principaux éléments statistiques de cette étude mettent en avant la répartition des expériences de propos et comportements sexistes racistes, homophobes, liés à la religion, handiphobes ou liés à l’état de santé au travail, pour certains groupes sociaux, d’où il ressort que les victimes sont:

  • 40% des hommes de 18 à 34 ans perçus comme non-blancs
  • 40% des hommes homosexules ou bisexuels
  • 43% des femmes en situation de handicap
  • 54% des femmes de 18 à 44 ans perçues comme non-blanches

 

Encore aujourd’hui, les propos et comportements sexistes, homophobes, racistes, liés à la religion, handiphobes ou liés à l’état de santé au travail, sont minimisés dans les milieux de travail, en particulier lorsqu’ils tentent d’être justifiés par l’humour.

Le 11e baromètre du Défenseur des droits et de l’Organisation internationale dutravail met en évidence que ces attitudes ne sont pas un épiphénomène. Loin de se résumer à des actes isolés, une part significative de la population en a déjà fait l’expérience, la plupart du temps dans un contexte d’hostilité professionnelle incluant des expériences de discrimination et de dévalorisation du travail. (…)

 

Selon l’analyse du Défenseur des Droits, au regard du cadre juridique régissant les relations de travail, notamment celui de la non-discrimination, les situations dans lesquelles les personnes subissent à la fois les trois attitudes hostiles observées dans l’enquête pourraient être qualifiées juridiquement de harcèlement discriminatoire[3]. (…)

Ces situations sont de nature à engager la responsabilité de l’employeur ou de l’employeuse, sur le fondement de son obligation de sécurité.

Ainsi, il apparait nécessaire d’intégrer les propos et comportements sexistes, racistes, homophobes, liés à la religion, handiphobes ou liés à l’état de santé à une démarche de prévention globale ».

 

Vous trouverez ci-après le rapport du Défenseur des Droits dans son intégralité.

 

 


 

 

[1] Le Défenseur des droits est né de la réunion de quatre institutions : le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Égalité (HALDE) et la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité (CNDS).

 

 

 

 

[3] Considéré comme une discrimination par la loi du 27 mai 2008, le harcèlement discriminatoire est constitué par « tout agissement lié à [l’un des motifs de discrimination prohibé4], subi par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant »