Dans un arrêt rendu le 5 novembre 2025, la Cour de Cassation porte un intérêt renouvelé sur l’obligation de sécurité du salarié. Elle juge ainsi que la tenue récurrente par un salarié de propos déplacés, voire pénalement sanctionnables, portant atteinte à la dignité et à la santé psychique des autres salariés, peut être sanctionnée sur le terrain d’un manquement à l’obligation de sécurité.
Pour rappel : L’article L.4122-1 du Code du travail dispose que :« Conformément aux instructions qui lui sont données par l'employeur, dans les conditions prévues au règlement intérieur pour les entreprises tenues d'en élaborer un, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail (…) ». |
En l’espèce, un salarié occupant les fonctions de directeur commercial a été licencié pour faute grave en raison de propos à connotation sexuelle ou discriminatoire adressés à ses collègues de manière récurrente, et plus spécifiquement : l’envoi via la messagerie interne de l'entreprise des photos à caractère pornographique à un stagiaire, des propos relatifs à l'orientation sexuelle d'un salarié homosexuel, interrogeant ce dernier « si tel salarié ou prestataire lui plaisait ou était homosexuel », ou encore l’envoi des clichés à connotation racistes à l'égard de sous-traitants malgaches.
Le salarié en question conteste son licenciement devant les juges du fond. Il avance que ces faits étaient placés sous le ton de l'humour, certains de ses collègues ayant même témoigné qu’ils avaient accepté ce comportement. Au-delà de cet aspect, il soutient que les propos litigieux relevaient de sa vie personnelle car extraits de la messagerie interne et s'inscrivant dans le cadre d'échanges privés à l'intérieur d'un groupe de personnes « qui n’avaient pas vocation à devenir publics ». De ce fait, ils ne justifiaient aucune sanction disciplinaire.
Or les premiers juges censurent cette argumentation et concluent sur le bien-fondé du licenciement. Le salarié se pourvoit ainsi en cassation.
La Cour de Cassation procède tout d’abord à un rappel des dispositions de l’article L.4122-1 du Code du travail. Elle s’allie, ensuite, aux constatations de la cour d’appel selon lesquelles « le comportement du salarié, sur le lieu et le temps du travail, était de nature à porter atteinte à la santé psychique d'autres salariés ». En effet, la tenue répétée de « propos à connotation sexuelle, sexiste, raciste et stigmatisants en raison de leur orientation sexuelle », a l’égard de certains de ses collègues, « peu importe le caractère ‘’humoristique’’ ou ‘’d’ambiance interne’’ » de ces propos, « portait atteinte à la dignité en raison de leur caractère dégradant ». Cela étant, ce comportement constitue un manquement à l’obligation de sécurité qui pèse sur le salarié, et rend « impossible son maintien au sein de l'entreprise ».
Cass Soc., 5 novembre 2025, Pourvoi n° 24-11.048