Salariés protégés : une information directe de l’employeur est requise pour se prévaloir de la protection contre le licenciement

Syndicats
Instances repésentatives du personnel

- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

Un salarié titulaire d’un mandant extérieur à l’entreprise ne peut pas se prévaloir de la protection qui y est attachée dès lors qu’il n’a pas informé son employeur de l’existence de ce mandat. C’est ainsi que juge la Cour de Cassation, dans un arrêt rendu le 29 mai 2024.

Pour rappel :

Les articles L2411-1 et L2411-2 du Code du travail énumèrent les salariés bénéficiaires d'une protection contre le licenciement.

Plus spécifiquement, l’article L2411-3 du même code précise que : « Le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. Cette autorisation est également requise pour le licenciement de l'ancien délégué syndical, durant les douze mois suivant la date de cessation de ses fonctions, s'il a exercé ces dernières pendant au moins un an.  Elle est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la désignation du délégué syndical a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa désignation comme délégué syndical, avant que le salarié ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement ».

De même, l’article L2411-4 prévoit que : « Le licenciement d'un salarié mandaté au titre des articles L. 2232-23-1 et L. 2232-26 ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail.  Cette autorisation est également requise dès que l'employeur a connaissance de l'imminence de sa désignation.  Il en est de même pour le licenciement d'un ancien salarié mandaté durant les douze mois suivant la date à laquelle son mandat a pris fin. Dans ce cas, lorsque aucun accord n'a été conclu à l'issue de la négociation au titre de laquelle le salarié a été mandaté, le délai de protection court à compter de la date de la fin de cette négociation, matérialisée par un procès-verbal de désaccord».

En l’espèce, un salarié est engagé en qualité de régisseur, à l’occasion d’un contrat de travail à durée indéterminée. Il est par ailleurs titulaire d'un mandat de conseiller du salarié, aux termes d'un arrêté préfectoral. Licencié pour faute grave, il saisit la juridiction prud'homale en nullité de son licenciement pour violation de son statut protecteur en tant que conseiller du salarié. Additionnement, il sollicite sa réintégration et le paiement de diverses sommes.

La cour d’appel donne droit à sa demande. Elle retient que le mandat du salarié en question était bien connu à l’employeur, ce premier figurant dans la liste des conseillers du salarié publiée dans le recueil des actes administratifs du département. De plus, ce salarié avait bien assisté une salariée de l'entreprise lors de l'entretien préalable à son licenciement, ce qui confirme que l’employeur avait nécessairement connaissance de sa qualité de conseiller du salarié. Cela étant, l’employeur se pourvoit en cassation. Il évoque qu’il n’était pas directement informé de l’existence de ce mandat extérieur à l’entreprise.

La Cour de cassation censure l’argumentation des juges d’appel. Elle rappelle tout d’abord que le salarié protégé, au sens de l’article L2411-1 du Code du travail, « n'est pas en droit de se prévaloir de la protection résultant d'un mandat extérieur à l'entreprise lorsqu'il est établi qu'il n'en a pas informé son employeur au plus tard lors de l'entretien préalable au licenciement, sauf à prouver que l'employeur en avait connaissance ». Or, pour la Cour, cette connaissance « ne pouvait pas résulter du simple fait que ledit salarié ait assisté une salariée de l'entreprise lors de l'entretien préalable à son licenciement », celui-ci n’ayant pas informé expressément son employeur de l’existence de ce mandat.

Cass., Soc., 29 mai 2024, pourvoi no 23-10.753