Plan de sauvegarde de l'emploi : l’obligation de recherche d’un repreneur vise aussi les entreprises ayant constitué un comité social et économique unique

Emploi
Gestion de l'emploi

- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

Dans un arrêt du 6 décembre 2022, la Cour administrative d’appel de Versailles clarifie l’obligation qui pèse sur l’employeur s’agissant la recherche d’un repreneur en cas de fermeture de site envisagée.

Pour rappel :

Suivant l’article L.2312-8 du Code du travail, l’employeur doit consulter et informer le CSE sur les questions relatives à la marche générale de l'entreprise, notamment sur : « Les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs ; La modification de son organisation économique ou juridique ; (…)».

Selon l’article L.1233-57-9 du même Code : « Lorsqu'elle envisage la fermeture d'un établissement qui aurait pour conséquence un projet de licenciement collectif, l'entreprise mentionnée à l'article L. 1233-71 réunit et informe le comité social et économique, au plus tard à l'ouverture de la procédure d'information et de consultation prévue à l'article L. 1233-30 ».

L’article L.1233-57-10 du Code du travail précise que, « L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la réunion prévue à l'article L. 1233-57-9, tous renseignements utiles sur le projet de fermeture de l'établissement. Il indique notamment : Les raisons économiques, financières ou techniques du projet de fermeture ; Les actions qu'il envisage d'engager pour trouver un repreneur ; Les possibilités pour les salariés de déposer une offre de reprise, les différents modèles de reprise possibles, notamment par les sociétés prévues par la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives de production, ainsi que le droit des représentants du personnel de recourir à un expert prévu à l'article L. 1233-57-17 ».

Selon l’article L.1233-57-14 du même Code, « L'employeur ayant informé le comité social et économique du projet de fermeture d'un établissement recherche un repreneur. Il est tenu : D'informer, par tout moyen approprié, des repreneurs potentiels de son intention de céder l'établissement ; (…)».

En l’espèce, une société appartenant à un groupe pharmaceutique international exerce des activités de recherche et développement. Un nouvel institut est créé à Paris, qui ressemble désormais l’ensemble des activités de recherche et développement. Plusieurs sociétés du groupe font l'objet donc d'un transfert vers ce nouveau site. Pour la société de recherche et de développement en question, le transfert de l'activité de l'ensemble des salariés est prévu en février 2023.

Dans ce cadre, la société a engagé une procédure de licenciement collectif pour motif économique et de plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) en cas de refus des salariés d'accepter une modification de leur contrat de travail, et en informe et consulte le CSE. Ce dernier a refusé de rendre un avis sur les documents présentés au terme de la procédure d'information consultation. Estimant que l’obligation de recherche d’un repreneur ne lui était pas applicable, la société dépose une demande d’homologation du PSE auprès de la DRIEETS. Celle-ci qui refuse la homologation au motif que l’employeur n’a pas respecté son obligation de rechercher un repreneur et n'a pas consulté le CSE sur ce point.

La société attaque la décision de l’administration devant le Tribunal administratif qui donne droit à sa demande. Le Tribunal relève en effet que le transfert de l'ensemble de la société ne constituait pas un transfert d'établissement au sens de l'article R. 1233-15 du Code du travail. La société en question ne disposant pas de CSEE, mais simplement étant dotée d’un CSE mis en place au sein du site unique de l’entreprise, elle n'était par conséquent pas soumise à l'obligation de recherche d'un repreneur. Le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion conteste cette position, en interjetant appel.

Pour se prononcer, la Cour administrative d’appel rappelle qu’à la lumière des articles L.1233-57-9 et L.1233-57-10 du Code du travail, lorsqu’une entreprise engage la fermeture d’un établissement ayant pour conséquence un projet de licenciement collectif, elle doit informer et consulter le CSE sur les actions qu’elle envisage pour trouver un repreneur. Elle relève que la société en question constitue bien un établissement au sens de l’article R. 1233-15 du Code du travail, car ce texte s’applique aux entreprises constituées d’un seul ou plusieurs établissements. C’est surtout ces éléments sur les modalités d'information et de consultation du CSE qui permettent à la DREETS d’analyser la qualité du projet et de rendre sa décision.   

Cela étant, la Cour conclut que la société était bien tenue de l’obligation de chercher un repreneur, celle-ci ne pouvant pas dépendre d’une organisation de l’entreprise qui aurait été décidée par l’employeur (article L.2313-2 u Code du travail et suiv.). Le refus de la DRIEETS d’homologuer le PSE était donc bien fondé.

 Cour administrative d'appel de Versailles - 4ème Chambre 6 décembre 2022 / n° 22VE02215