Obligation de reclassement : un nouvel avis médical doit être sollicité en cas de contestation du poste proposé

Emploi
Gestion de l'emploi

- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

Dans un arrêt rendu le 22 octobre 2025, la Cour de Cassation se prononce sur l’étendue de la présomption d’accomplissement de l’obligation de reclassement de l’employeur.  Pour la Haute juridiction, lorsqu’un salarié déclaré inapte conteste la compatibilité du poste proposé avec les recommandations du médecin du travail, l’employeur est tenu de solliciter un nouvel avis médical.

Pour rappel :

L’article L.1226-10 du Code du travail dispose que : « Lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L.4624-4,  à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté. […] ».

 

De plus, l’alinéa 3 de l’article L. 1226-12 du Code du travail prévoit que : « L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail ».

 

En l’espèce, un salarié engagé en qualité de monteur vendeur, placé en arrêt de travail à la suite d’une maladie professionnelle, a été déclaré inapte à son poste par avis du médecin du travail. Selon cet avis, ledit salarié pourrait « occuper un poste de vendeur ; un poste sans gestes répétitifs des membres supérieurs et sans gestes "bras au-dessus de la ligne horizontale des épaules ». Cela entant, l’employeur lui avait proposé un poste de vendeur. Le salarié refuse le poste proposé en raison de l’incompatibilité avec son état de santé et les limitations physiques préconisées par le médecin du travail. Il a été alors licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le salarié conteste son licenciement devant les premiers juges en soutenant que l’employeur avait manqué à son obligation de recherche de reclassement.  Les premiers juges valident sa demandent et déclarent, en conséquence, le licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’employer se pourvoit ainsi en cassation.

Or la Haute juridiction s’aligne aux juges du fond. Elle rappelle tout d’abord que « lorsque l’employeur propose un poste au salarié déclaré inapte, conformément aux dispositions légales, en tenant compte de l’avis et des indications du médecin du travail, il satisfait à son obligation de recherche de reclassement ».

Il en résulte, poursuit-elle, que si le salarié conteste la compatibilité de l’emploi proposé avec les recommandations du médecin du travail émises dans l’avis d’inaptitude, l’employeur doit solliciter un nouvel avis du médecin du travail.

Or, la Cour mentionne que les premiers juges ont relevé que, le poste refusé, « n'avait pas été préalablement validé par le médecin du travailau regard d’un descriptif précis des tâches à accomplir », et ce, même si ce dernier a échangé avec l’employeur et qu’une lettre de l’employeur, lui étant adressée, prétend que le poste de vendeur était conforme à ses recommandations, sans plus de précisions sur les tâches du vendeur.

Cela étant, « il incombait à l'employeur de solliciter un nouvel avis du médecin du travail, ce que celui-ci ne justifiait pas avoir fait ».

Portée du jugement :

En pratique, lorsqu’un salarié, déclaré inapte, refuse le poste proposé en raison de l’incompatibilité avec les préconisations du médecin du travail, l’employeur ne peut pas se contenter de prendre acte de ce refus en le licenciant. Il se doit de solliciter, à nouveau, un avis médical, sur la base d’un descriptif précis des tâches à accomplir correspondant au poste proposé.

 

Cass. Soc., 22 oct. 2025, n° 24-14.641