Congé maternité : l’envoi de la lettre de convocation à un entretien préalable de licenciement est interdit

Emploi
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- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

La protection contre le licenciement durant le congé maternité et les congés payés qui y sont accolés, s’étend aussi aux mesures préparatoires liées au licenciement. C’est ce que précise la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 29 novembre 2023.

Pour rappel :

Selon l’article L. 1225-4 du Code du travail : «Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu'elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l'expiration de ces périodes. 

Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa.».

En l’espèce, une salariée engagée en qualité de chef de projet internet est placée en congé maternité puis en congés payés du 8 septembre 2017 au 24 janvier 2018, avec une reprise effective du travail au 25 janvier 2018. Son poste de travail a été inclus dans un projet de licenciement pour motif économique, sur lequel les délégués du personnel ont été consultés le 12 janvier 2018. Le 16 janvier 2018, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé plus de deux mois après la reprise de ses fonctions.

La salariée fait une action en nullité de son licenciement, en invoquant qu’il était interdit à l’employeur de prendre des mesures préparatoires à son licenciement durant la période de ses congés. La cour d’appel la déboute pourtant de sa demande, en jugeant que l’employeur n'a pas procédé à un acte préparatoire au licenciement pendant la période de protection. Pour arriver à ce constat, la cour considère que ni la convocation de la salariée à l’entretien préalable notifiée pendant sa période de protection, ni la consultation des délégués du personnel, n’étaient des éléments susceptibles de caractériser la volonté de l’employeur de licencier, la décision de ce dernier n’étant pas prise. La salariée se pourvoit ainsi en cassation.

La Cour de cassation censure pourtant le jugement de la cour d’appel. Elle rappelle, tout d’abord, les dispositions de l’article L. 1225-4 du Code du travail, interprétées à la lumière de l'article 10 de la directive 92/85/CEE du Conseil du 19 octobre 1992, «qui interdisent à un employeur, non seulement de notifier un licenciement, quel qu'en soit le motif, pendant la période de protection visée à ce texte, mais également de prendre des mesures préparatoires à une telle décision». Or, selon la Haute juridiction, l’envoi de la lettre de convocation à l’entretien préalable «constitue une mesure préparatoire au licenciement», et il est donc interdit durant la période de protection liée à la maternité.

Cass., Soc., Pourvoi n° 22-15.794