Le licenciement d'un salarié ayant incité ses collègues à faire grève est nul

Emploi

- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

Dans un arrêt du 23 novembre 2022, la Cour de Cassation répond à la question de savoir si la protection attachée aux salariés exerçant leur droit de grève s’applique aussi à ceux qui incitent leurs collègues à mener une telle action.

Pour rappel

Selon l’article L2511-1 du Code du travail, « l'exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié. Son exercice ne peut donner lieu à aucune mesure discriminatoire telle que mentionnée à l'article L. 1132-2, notamment en matière de rémunérations et d'avantages sociaux. Tout licenciement prononcé en absence de faute lourde est nul de plein droit ».

En l’espèce, un salarié a été engagé en qualité de responsable de produit d’une société. Après le refus de la direction d’embaucher du personnel supplémentaire, le salarié avait contacté plusieurs membres de son équipe pour les inciter à faire grève. Le salarié a été licencié pour faute grave, l’employeur y voyant une démarche d’intimidation et une intention de nuire à la société, afin de l’obliger à embaucher du personnel supplémentaire.

Le salarié saisit les juges du fond en nullité de son licenciement. Les premiers juges le déboutent de sa demande, en constatant que la lettre de licenciement ne reproche pas au salarié d’avoir exercé son droit de grève, mais d'avoir incité des autres collègues à faire une telle action.

La Chambre sociale de la Cour de Cassation censure la décision des premiers juges. Elle rappelle, tout d’abord, l’articleL2511-1 du Code du travail selon lequel « la nullité du licenciement d'un salarié n'est pas limitée au cas où le licenciement est prononcé pour avoir participé à une grève mais s'étend à tout licenciement prononcé à raison d'un fait commis au cours ou à l'occasion de l'exercice d'un droit de grève et qui ne peut être qualifié de faute lourde ». Il en résulte pour la Cour qu’ « en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la lettre de licenciement reprochait au salarié d'avoir tenté d'inciter les membres de son équipe à mener une action de grève en réponse au refus de la direction d'engager du personnel supplémentaire, ce dont il résultait que les faits reprochés avaient été commis à l'occasion de l'exercice du droit de grève, la cour d'appel a violé le texte susvisé ». Cela étant, le licenciement doit être annulé.

Cass., Soc., pourvoi n° 21-19.722