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Lettre d'information n°141 Juillet-Aout 2022

 PAR TIPHAINE GARAT ET MICHÈLE FORTÉ

 

En cette rentrée, le mot « pouvoir d’achat » est sur toutes les lèvres !

Dans cette lettre, l’équipe de l’IDT passe en revue l’important arsenal législatif et règlementaire qui a été pris cet été pour faire face à l’inflation et lutter pour le pouvoir d’achat.

Le renouvellement des instances est aussi au cœur des préoccupations des acteurs socio-économiques.

Une conférence est organisée le 23 septembre prochain à Strasbourg, en format hybride, et permettra de s’interroger sur le lien entre les salariés et leurs représentants et du rôle du dialogue social en entreprise.

Retrouvez l’entretien avec Benjamin Dabosville, un des auteurs du rapport « Le représentant de proximité : une figure au cœur des enjeux de la nouvelle représentation des salariés », qui est à l’origine de cet évènement.

 

Nous vous souhaitons à tous une bonne rentrée !


Entretien
La représentation du personnel après les ordonnances « Macron » de 2017 : quel bilan ?

Cinq ans après les ordonnances Travail de septembre 2017, plusieurs rapports de recherche ont, pour le compte de France Stratégie, tiré un premier bilan de celles-ci. Maître de conférences à l’Institut du travail et responsable de l’équipe Droit social de l’UMR 7354 DRES, Benjamin Dabosville organise une conférence à l’Université de Strasbourg le 23 septembre visant à présenter et discuter les résultats de l’une de ces recherches interdisciplinaires.

 

Le colloque du 23 septembre s’intitule « Quelle représentation de proximité dans les entreprises ? ». Pourquoi avoir choisi cet objet d’étude ?

La question de la proximité constitue une clef d’entrée précieuse pour étudier la mise en œuvre des réformes de 2017. S’agissant de la représentation du personnel en entreprise, rappelons que l’objet de la réforme était de supprimer les institutions existantes (comité d’entreprise ; délégué du personnel ; comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) au profit d’une nouvelle, le Comité Social et Économique (CSE). Il en a résulté un risque de centralisation et de perte de lien avec les salariés, d’autant que le nombre de représentants du personnel a souvent été fortement réduit. Afin de pallier ce risque, plusieurs outils juridiques existent. Nous avons étudié la manière dont ces derniers ont été utilisés par les acteurs. En somme, nous avons utilisé la représentation de proximité comme une loupe afin d’examiner tant les opportunités que les défis créés par les ordonnances de 2017.

 

Quels sont ces mécanismes permettant de conserver un lien de proximité dans les entreprises ?

Le schéma 1 entreprise = 1 CSE doit être nuancé. D’abord une entreprise peut être décomposée en plusieurs entités dotées chacune de « CSE d’établissements » et chapeautées par un CSE central. Ensuite, le fonctionnement du CSE s’appuie souvent sur plusieurs commissions thématiques (commission égalité ; commission économique ; commission de la formation, etc…). Or le périmètre de ces commissions peut être géographiquement plus réduit que celui du CSE. Il peut, par exemple, y avoir un seul CSE couvrant plusieurs sites industriels, tandis que chacun de ces sites aura sa propre commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT). Enfin, il peut être décidé dans une entreprise de créer des « Représentants de proximité » (RdP).

 

Comment se fait le choix entre ces outils et comment fonctionnent-ils ?

L’une des grandes innovations des ordonnances de 2017 est de donner un rôle central à la négociation collective. Jusqu’à présent, le législateur fixait assez précisément le cadre de la représentation du personnel en entreprise et celle-ci différait assez peu d’une entreprise à l’autre. Aujourd’hui, beaucoup de choses sont négociées. Ce sont donc les accords collectifs d’entreprise qui déterminent en grande partie le rôle respectif du CSE, des commissions ou des représentants de proximité. S’agissant de ces derniers, leur étude est d’autant plus intéressante que la loi ne comporte pratiquement aucune indication sur leur mode de désignation, leur fonctionnement, leur mission ou encore leur lien avec les autres acteurs de l’entreprise. C’est l’une des raisons pour lesquelles notre groupe de recherche s’est particulièrement intéressé aux représentants de proximité : leur analyse permet de cerner ce que signifie concrètement la priorité donnée à la négociation collective, lorsque celle-ci ne connait aucune limite légale claire.

 

Comment la recherche s’est-elle déroulée ? 

Le projet a été dirigé par Cyril Wolmark, professeur de droit à l’Université de Nanterre, et par Jérôme Pélisse, professeur de sociologie à Sciences Po Paris. Notre décision de rejoindre cette recherche s’est faite rapidement, car elle fait écho à de nombreuses questions pratiques que nous rencontrons régulièrement lorsque nous formons des élus du personnel à l’Institut du travail ou lorsque nous évoquons les relations collectives de travail en Master 2 droit social interne, européen et international. Le projet s’inscrit également parfaitement dans les recherches relatives au « dialogue social » que nous menons au sein de l’UMR 7354 DRES. Nous avons donc rejoint un groupe composé de chercheurs issus de différentes entités (CSO, IRERP, Groupe Alpha) et avons mené une analyse pluridisciplinaire sur deux ans. Celle-ci comportait trois volets : une analyse statistique d’un échantillon d’accords ; des études juridiques portant sur les différentes clauses des accords ; enfin des monographies réalisées en allant interroger les acteurs tant dans des entreprises dotées de représentants de proximité que dans des entreprises qui en sont dépourvues.

 

Quels sont les principaux résultats de cette recherche ?

L’enseignement essentiel est celui de la diversité des situations. Dans certaines entreprises, le rôle du représentant de proximité est de s’occuper de la machine à café tandis que dans d’autres, il fait figure de « CSE-bis ». Cette diversité est le fruit de la philosophie même des ordonnances de 2017. Celle-ci a donné aux acteurs une liberté que tous n’avaient pas réclamé. Comment articuler le CSE avec les commissions et les représentants de proximité ? Quel rôle donner à l’employeur dans le fonctionnement des institutions représentatives du personnel ? Comment veiller à la protection de la santé des travailleurs ou traiter les réclamations individuelles et collectives dans le nouveau cadre ? Et, plus généralement encore, que faire dans le silence de la loi ? Ces questions sont récurrentes et montrent la difficulté qu’il y a souvent eu à appréhender les nouveaux textes.

 

Comment va se dérouler le colloque du 23 septembre ?

Ce colloque a été conçu comme un temps d’échange. Au sein de notre équipe strasbourgeoise, notre crédo est celui de l’enrichissement mutuel : nous produisons certes de la science, mais nous apprenons aussi énormément de nos discussions avec les praticiens. La journée a donc été construite autour d’une succession de tables rondes, afin que la présentation des résultats de la recherche soit toujours suivie par un temps substantiel de discussion avec les participants. La matinée sera consacrée à la présentation générale des enjeux et à la manière dont la question de la proximité a été envisagée lors des négociations. Il s’agira notamment de comprendre pourquoi certaines entreprises sont dotées de représentants de proximité alors que d’autres fonctionnent sans. L’après-midi sera consacrée au fonctionnement de la représentation de proximité : désignation, moyens, liens avec le CSE, etc… Beaucoup d’entreprises renouvellent actuellement leurs CSE. Au-delà des élections en elles-mêmes, cette période est propice à s’interroger sur les choix effectués il y a quatre ans. Nous souhaitons pouvoir éclairer les acteurs de terrain, mais aussi identifier les nouvelles questions qui émergent de la pratique.

 

Informations pratiques
Les RDV du dialogue social - Quelle représentation de proximité dans les entreprises ?
Le 23 septembre 2022, de 08h45 à 17h00
Téléchargez ici le programme complet de la journée
Lien vers l'inscription

Gratuit, sur inscription uniquement.
Le lien Zoom pour y participer sera envoyé après inscription.
Manifestation validée au titre de la formation continue des avocats
Contact : tiphaine.garat[at]unistra.fr
03 68 85 83 25 / 03 68 85 87 00


Article
Les principales mesures sociales adoptées durant l’été 2022

Un important arsenal législatif et règlementaire a été mobilisé durant l’été pour compenser l’inflation et préparer la rentrée 2022. L’accent a été donné à la protection du pouvoir d’achat des Français : pérennisation de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, revalorisation du Smic et des diverses prestations sociales, renforcement des aides à l’embauche des alternants…

Cet article ne fait pas un recensement exhaustif des textes parus, mais propose un aperçu des principales mesures sociales adoptées.

 

Sauvegarde de l’emploi

  • Activité partielle

-Le décret du 29 juillet 2022[1]revalorise les taux horaires minima de l’allocation d’activité partielleau 1er août 2022 : Pour les entreprises recourant à l’activité partielle du droit commun, le taux horaire minimum de l'allocation d'activité partielle versée à l’employeur est fixé à 7,88 euros (au lieu de 7,73 euros jusqu’au 31 juillet). Pour les entreprises bénéficiant de l'activité partielle de longue durée, le taux horaire minimum de l'allocation versée aux employeurs est fixé à 8,76 euros (au lieu de 8,59 euros jusqu’au 31 juillet).

-Activité partielle des salariés vulnérables : La loi des finances rectificative pour 2022 du 16 août [2]réactive, à compter du 1er septembre et jusqu'à une date fixée par décret (au plus tard jusqu'au 31 janvier 2023), le dispositif de placement en activité partielle des salariés reconnus vulnérables, présentant un risque avéré de développer une forme grave d'infection au virus de Covid-19. Ce dispositif avait pris fin le 31 juillet dernier. Le ministère du Travail a aussi fait évoluer son Questions/réponses « Activité partielle – chômage partiel » en ce sens le 2 août 2022.

S’agissant des modalités d’indemnisation liées au dispositif, le décret du 30 août 2022[3] laisse inchangé le taux des indemnités versées aux salariés vulnérables, soit 70% du salaire brut antérieur. Au contraire, le taux de l’allocation remboursée à l’employeur passe de 70 % à 60 % du salaire brut antérieur, ce qui entraine un reste à charge de 15% pour les employeurs. In fine, un projet de décret présenté aux partenaires sociaux le 1er septembre[4] reconduit les critères d’identification des salariés vulnérables, tels que prévus dans le décret du 8 septembre 2021[5].

 

  • Pouvoir d’achat

Deux lois adoptées le 16 août 2022 sont dédiées à la protection du pouvoir d’achat des Français : la loi sur le pouvoir d’achat[6] et la loi de finances rectificative pour 2022. Plusieurs mesures y figurent, notamment :

- Prime PEPA : la loi sur le pouvoir d’achat pérennise et adapte, à partir du 1er juillet, la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (PEPA ou « prime Macron »). Cette prime, introduite par la loi du 24 décembre 2018[7], est désormais renommée prime de partage de la valeur (PPV). Tout comme l’ancienne PEPA, la PPV permet aux employeurs volontaires de verser à leurs salariés et intérimaires une prime défiscalisée et exonérée de cotisations sociales, afin de renforcer leur pouvoir d’achat.

Par rapport à la dernière mouture de la PEPA, le montant que pourra toucher un salarié par an se voit tripler : soit 3 000 euros maximum ou 6 000 euros s’il existe un accord d’intéressement dans l’entreprise et/ou un accord de participation dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Un nouveau régime d’exonération fiscale et sociale est aussi prévu : à partir du 1er juillet 2022 et jusqu’au 31 décembre 2023, la PPV perçue par des salariés qui perçoivent moins de trois fois la valeur annuelle du SMIC est totalement exonérée de cotisations salariales et patronales ainsi que d’impôt sur le revenu. Au contraire, pour ceux qui gagnent au-delà de trois fois le SMIC, la PPV est exonérée de cotisations sociales, mais elle est assujettie à la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) la CSG/CRDS et à l'impôt sur le revenu (et au forfait social de 20 % pour les entreprises qui comptent au moins 250 salariés). A partir de 1er janvier 2024, c’est ce dernier régime qui s’appliquera à tous les salariés, y compris ceux gagnant jusqu'à trois fois le SMIC. Des fiches techniques publiées par le ministère du Travail[8] et l’Urssaf[9] le 17 août, précisent les modalités déclaratives de la prime auprès des organismes sociaux et sur le bulletin de paie.

-Epargne salariale : La loi sur le pouvoir d’achat permet aux salariés qui bénéficient d'un plan d'épargne d'entreprise à débloquer de manière anticipée, avant le 31 décembre 2022, leur épargne salariale. Le déblocage se rapporte aux sommes issues de l’intéressement (primes liées à la performance de l'entreprise) ou de la participation (prime de redistribution des bénéfices de l'entreprise) accumulées jusqu'au 1er janvier 2022, s’effectue en une seule fois, ne peut pas dépasser le plafond global de 10 000 euros net et doit servir au financement de l’achat d’un ou plusieurs biens ou la fourniture d’une ou plusieurs prestations de service.

- Utilisation des titres-restaurants : La loi sur le pouvoir d’achat prévoit la possibilité d’utiliser les titres restaurants jusqu'à fin 2023 pour tous les produits alimentaires directement ou non consommables. Par ailleurs, la loi de finances rectificative pour 2022 porte le plafond d’exonération maximum de la participation patronale au financement des titres-restaurants à 5,92 euros par titre du 1er septembre 2022 au 31 décembre 2022 (contre 5,69 euros en vigueur avant le 1er septembre 2022).  

- Frais de transport : La loi de finances rectificative pour 2022 modifie les prises en charge possibles et les plafonds d’exonération en matière de frais de transport. Tout d’abord, ladite loi étend le champ d’application du dispositif de la prime transport[10] en supprimant les conditions relatives à l’éligibilité (salariés dont la résidence habituelle ou le lieu de travail ne sont pas desservis ou se trouvent hors périmètre d’un plan de mobilité obligatoire ; ou dont les horaires de travail ne permettent pas d’emprunter un mode collectif de transport). Cela étant, le dispositif est désormais ouvert à tous les salariés.

Ensuite, la loi rehausse le plafond d'exonération de la prime transport pour l'imposition des revenus des années 2022 et 2023 : celui passe de 200 euros à 400 euros par an et par salarié pour les frais de carburant, et de 500 euros à 700 euros par an et par salarié pour les frais d’alimentation d’un véhicule électrique, hybride rechargeable ou à hydrogène. Il en est de même pour le forfait mobilités durables[11], dont le plafond d’exonération de cotisations et contributions sociales pour 2022 et 2023 est porté à 700 euros (au lieu de 500 euros depuis 2021), ainsi que pour la prise en charge du prix des titres d’abonnement aux transports publics[12], dont le seuil d’exonération est porté à 75 % du coût de l'abonnement (au lieu de 50 %). Par ailleurs, la loi permet désormais la possibilité de cumuler cette prise en charge des frais d’abonnement de transport avec la prime transport.

- RTT et heures supplémentaires : La loi de finances rectificative pour 2022 offre la possibilité aux salariés, avec l’accord de leur employeur, de convertir en majoration de salaire[13] les journées ou demi-journées de RTT non prises, acquises du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2025. Les rémunérations versées aux salariés à ce titre sont exonérées d'impôt sur le revenu, dans la limite annuelle de 7 500 € par salarié (voir ci-après).

En effet, la loi de finances rectificative prévoit uneaugmentation du plafond de défiscalisation des heures supplémentaires et complémentaires réalisées depuis le 1er janvier 2022, qui est porté de 5 000 à 7 500 euros. A cette mesure s’ajoute un dispositif de déduction forfaitaire des cotisations sociales patronales sur les heures supplémentaires réalisées à compter du 1er octobre 2022, tel que prévu par la loi sur le pouvoir d’achat. Ce dispositif est applicable aux entreprises dont l’effectif est compris entre 20 et 249 salariés.

- SMIC et prestations sociales : Un arrêté du 29 juillet 2022[14], revalorise de 2,01 % au 1er août le montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic). Le Smic horaire brut passe de 10,85 euros au 1er mai 2022 à 11,07 € au 1er août et le Smic mensuel brut s’établit à 1 678,95 euros. Pour suivre cette évolution, la loi sur le pouvoir d’achat revalorise de manière anticipée au 1er juillet 2022 différentes prestations sociales à hauteur de 4%. Sont ainsi concernés : les pensions de retraite et d'invalidité de base, les allocations familiales, les rentes et indemnités versées aux victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP), les minimas sociaux à savoir du revenu de solidarité active (RSA), de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) et de l'allocation aux adultes handicapés (AAH). S’agissant de cette dernière, une déconjugalisation est actée par la loi sur le pouvoir d’achat, avec une entrée en vigueur au plus tard le 1er octobre 2023. En d’autres termes, les revenus du conjoint ne seront plus pris en compte pour calculer le montant de l’AAH.

 

  • Assurance chômage

Deux arrêtés en date du 21 juin 2022[15] et du 18 août 2022[16]apportent des précisions sur la mise en œuvre du dispositif de bonus-malus qui entre en vigueur le 1er septembre 2022. Celui-ci consiste à moduler la contribution patronale d’assurance chômage en fonction du taux de séparation de l’entreprise, autrement dit du nombre de fins de contrats de travail (CDD, CDI) ou de missions d’intérim, (hors démissions et exceptions réglementées) qui débouchent sur une inscription à Pôle Emploi, par rapport à l’effectif annuel moyen.

-L’arrêté du 21 juin apporte de nombreuses informations concernant les modalités d'établissement et de notification des taux de séparation par entreprise, de séparation médians par secteur et de contribution majorés ou minorés par entreprise.

-L'arrêté du 18 août porte publication des taux de séparation médians par secteur pris en compte pour le calcul du bonus-malus.

-In fine, un projet de loi portant des premières mesures d’urgence visant à conforter et à améliorer le fonctionnement du marché du travail, transmis par le ministère du Travail aux partenaires sociaux le 26 août 2022, permet au gouvernement de prolonger jusqu’à la date du 31 août 2024 le dispositif de bonus-malus.

S’agissant des allocations d'assurance chômage, celles-ci ont été revalorisées de 2,9% au 1er juillet 2022 par une décision du Conseil d’administration de l’Unédic[17].

 

  • Embauche d’alternants 

Deux décrets adoptés le 29 juin 2022 prolongent et aménagent les aides à l’embauche des alternants :

- Le décret n° 2022-957 du 29 juin 2022[18] aménage l'aide à l'embauche de 8 000 € versée aux employeurs qui recrutent des demandeurs d'emploi de longue durée en contrat de professionnalisation. A compter du 1er juillet 2022, cette aide est aussi ouverte au titre de personnes embauchées à l’issue d’une préparation opérationnelle à l’emploi individuelle (POEI) ou d’une action de formation préalable au recrutement (AFPR).

- Le décret n° 2022-958 du 29 juin 2022[19] prolonge jusqu'au 31 décembre 2022 (au lieu du 30 juin 2022) le montant dérogatoire accordé au titre de l'aide unique aux employeurs d'apprentis, ainsi que l'aide exceptionnelle à l’embauche d’alternants (apprentis ou jeunes en contrat de professionnalisation).

Ces aides donnent droit à 5 000 € maximum si l’alternant a moins de 18 ans et 8 000 € maximum s’il est majeur[20].

 

Protection de la santé et de la sécurité

 

  • Instauration d’un régime post crise sanitaire

- Abrogation des régimes sanitaires d'exception : la loi sanitaire du 30 juillet 2022[21]abroge, à compter du 1er août 2022, le régime de gestion de la sortie de crise sanitaire (instauré le 31 mai 2021) ainsi que le régime de l’état d’urgence sanitaire (instauré le 23 mars 2020). Cela étant, des nouvelles mesures sanitaires (confinement, couvre-feu, passe sanitaire...) ne pourraient être édictées qu’après adoption d’une nouvelle loi. Toutefois, la loi sanitaire maintient, jusqu’au 30 juin 2023, le fichier SI-DEP qui centralise les résultats des examens de dépistage du Covid-19, et prolonge, jusqu’au 31 janvier 2023, le dispositif Contact Covid qui oriente et accompagne les malades et les cas contacts. Elle maintient également, à partir du 1er août 2022 et jusqu'au 31 janvier 2023, la possibilité d’exiger un test négatif des voyageurs en cas d’apparition d’un nouveau variant.

- Personnel de santé non vacciné : la loi sanitaire ouvre aussi la possibilité d’une réintégration des soignants, dont les contrats de travail ont été suspendus car non-vaccinés (en application de la loi du 5 août 2021). Cette réintégration sera effective seulement après avis favorable de la Haute Autorité de santé (HAS) concluant que l'obligation vaccinale n’est plus justifiée médicalement. Dans un avis du 21 juillet 2022, la HAS s'est prononcée sur le maintien de obligation vaccinale pour les professionnels des secteurs sanitaire et médico-social.

 

  • Certification des SPSTI

- Pris en application de l’article 11 de la loi santé du 2 août 2021[22], le décret du 20 juillet 2022[23]vient préciserla procédure de certification des services de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI). Il détermine les référentiels et les principes guidant l'élaboration du cahier des charges de la certification des SPSTI, dont la méthode et les conditions de délivrance doivent être fixés par arrêté (au plus tard le 1er mai 2023). 

 

  • Passeport prévention

- Les partenaires sociaux présentent leurs orientations sur le passeport prévention[24]  dans un document remis à la Direction générale du travail le 24 juin 2022[25]. Ils insistent sur le développement progressif du dispositif, avec une intégration dans un premier temps des formations transférables d’une entreprise à une autre. Ils rappellent qu’il constitue un outil géré par le salarié, qui apprécie lui seul les éléments consultables par l’employeur. Enfin, ils soulignent que le passeport prévention devra rester un outil au service des employeurs et des salariés et qu’en aucun cas il ne doit être un moyen de contrôle des compétences des salariés.

 

Négociation collective

 

  • Négociation de branche sur les salaires

- La loi sur le pouvoir d’achat accélère le déclenchement de la négociation de branche sur les salaires. Désormais, si le salaire minimum national professionnel des salariés sans qualification est inférieur au Smic, l’employeur dispose 45 jours (au lieu de trois mois) pour engager une négociation sur les salaires. A défaut d’initiative patronale après 45 jours, ce sont les organisations syndicales qui peuvent demander l'ouverture de négociations. Par ailleurs, ladite loi prévoit une procédure d'extension accéléréedes avenants salariaux à une convention étendue, lorsqu’au moins deux revalorisations du Smic sont intervenues dans les 12 derniers mois. La durée maximale, fixée par voie réglementaire, de cette procédure d’extension ne pourra pas excéder 2 mois. 

Par ailleurs, la loi sur le pouvoir d’achat complète les critères habilitant le ministère du Travail à fusionner le champ d'application des conventions collectives d'une branche avec celui d'une autre branche (tels qu’ils figurent dans l’article L. 2261-32 du code du Travail). Désormais, la faiblesse du nombre d'accords ou avenants signés assurant un salaire minimum national professionnel pour les salariés sans qualification, au moins égal au Smic, pourra constituer un motif autorisant le ministre du Travail à engager une procédure de fusion administrative de branches.  

 

  • Représentation des travailleurs des plateformes

- Le décret du 13 juin 2022[26]apporte des précisions sur les critères d'appréciation de la représentativité des organisations de plateformes, notamment :  les dates et périodes d’appréciation de la représentativité, les règles relatives à l’adhésion des plateformes à l’organisation candidate, la procédure du dépôt de candidature et les conditions dans lesquelles le directeur général de l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (ARPE) arrête la liste des organisations professionnelles représentatives de plateformes[27].

- L’arrêté du 25 juillet 2022[28]fixe les modalités de versement de l'indemnisation forfaitaire des représentants des travailleurs des plateformes, obtenue sous réserve d’une perte de rémunération effective en raison du temps consacré à l’exercice de leurs fonctions. Le montant de cette indemnisation dépend de l’activité exercée (représentation, formation, réunions de négociation), ainsi que de l’activité professionnelle du représentant (montant horaire de référence pour le calcul de l'indemnisation forfaitaire : 17 euros brut de l'heure pour les représentants exerçant une activité de livraison de marchandises et 30 euros brut de l'heure pour ceux exerçant une activité de conduite d'une voiture de transport avec chauffeur).  

 

  • Corps électoral pour les élections CSE

- Tirant les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 19 novembre 2021[29], le projet de loi portant des premières mesures d’urgence visant à conforter et à améliorer le fonctionnement du marché du travail ouvre aux salariés assimilables à l’employeur[30], la possibilité de participer en qualité d’électeur à l’élection du comité social et économique (CSE). Toutefois, ces salariés restent inéligibles.

 

 

 

[1] Décret nº 2022-1072 du 29 juillet 2022 portant modification du taux horaire minimum de l'allocation d'activité partielle et de l'allocation d'activité partielle spécifique en cas de réduction d'activité durable.

[2] Loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

[3] Décret n° 2022-1195 du 30 août 2022 relatif à la détermination des taux et modalités de calcul de l'indemnité et de l'allocation d'activité partielle pour les salariés reconnus comme vulnérables et présentant un risque avéré de développer une forme grave d'infection au virus de la Covid-19.

[4] Projet de décret définissant des critères permettant d’identifier les personnes vulnérables présentant un risque avéré de développer une forme grave d’infection au virus de la covid‑19 et pouvant être placés en activité partielle ou en arrêt maladie à ce titre.

[5] Décret nº 2021-1162 du 8 septembre 2021 pris pour l'application de l'article 20 de la loi nº 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

[6] Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.

[7] Loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d'urgence économiques et sociales.

[8] La prime de partage de la valeur », ministère du Travail, 17 août 2022.

[9] Le point sur la prime de partage de la valeur », Urssaf, 17 août 2022.

[10] Dispositif qui permet aux employeurs volontaires de prendre en charge tout ou partie des frais de carburant d’un véhicule et des frais d’alimentation d’un véhicule électrique, hybride rechargeable ou hydrogène engagés par certains salariés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail (article L. 3261-3 du code du Travail).

[11] Dispositif sous forme d’une allocation forfaitaire permettant aux employeurs volontaires de prendre en charge tout ou partie des frais engagés par ses salariés se déplaçant entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail avec leur cycle ou cycle à pédalage assisté personnel ou leur engin de déplacement personnel motorisé ou en tant que conducteur ou passager en covoiturage, ou en transports publics de personnes à l'exception des frais d'abonnement mentionnés à l'article L. 3261-2, ou à l'aide d'autres services de mobilité partagée définis par décret (article L. 3261-3-1 du code du Travail).

[12] Dispositif d’une prise en charge obligatoire par les employeurs au moins 50 % du prix des titres d'abonnements souscrits par ses salariés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail accomplis au moyen de transports publics de personnes ou de services publics de location de vélos (article L. L3261-2 du code du Travail).

[13]Au moins égale au taux de majoration de la première heure supplémentaire applicable dans l’entreprise, soit le salaire horaire majoré de 10 % au minimum ou de 25 % en l’absence d’accord collectif et à défaut d’accord de branche qui fixe ce taux de majoration.

[14] Arrêté du 29 juillet 2022 relatif au relèvement du salaire minimum de croissance.

[15] Arrêté du 21 juin 2022 relatif aux modalités d'établissement et de notification du taux de contribution à l'assurance-chômage modulé par le bonus-malus.

[16] Arrêté du 18 août 2022 portant publication des taux de séparation médians par secteur pris en compte pour le calcul du bonus-malus.

[17] Conseil d’administration de l’Unédic, communiqué du 30 juin 2022.

[18] Décret n° 2022-957 du 29 juin 2022 modifiant le décret n° 2021-1404 du 29 octobre 2021 relatif à l'aide à l'embauche de certains demandeurs d'emploi en contrat de professionnalisation.

[19] Décret n° 2022-958 du 29 juin 2022 portant prolongation de la dérogation au montant de l'aide unique aux employeurs d'apprentis et de l'aide exceptionnelle aux employeurs d'apprentis et de salariés en contrat de professionnalisation.

[20] L’aide exceptionnelle à l’embauche d’alternants donne droit au versement d’une aide  seulement au titre de la première année d’exécution du contrat. Elle concerne les entreprises de moins de 250 salariés embauchant des apprentis visant une certification qui ne dépasse pas le niveau master ou Bac+5. L’aide unique à l’embauche d’apprentis donne droit au versement d’une aide au titre de chaque année d’exécution du contrat d’apprentissage. Elle concerne les entreprises de moins de 250 salariés qui recrutent un apprenti visant une certification équivalente au plus au baccalauréat.

[21] Loi n° 2022-1089 du 30 juillet 2022 mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la Covid-19.

[22] Selon l’article 11 de la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, les services de prévention et de santé au travail (SPST) devront faire l'objet d'une procédure de certification et d'agrément.

[23] Décret n° 2022-1031 du 20 juillet 2022 relatif aux référentiels et aux principes guidant l'élaboration du cahier des charges de certification des services de prévention et de santé au travail interentreprises.

[24] Conçu par les partenaires sociaux dans l’ANI du 10 décembre 2020 sur la santé au travail et consacré par la loi sur la santé au travail du 2 août 2021, le passeport prévention recense tous les éléments certifiant les qualifications obtenues par les salariés en matière de santé et sécurité au travail. Il est alimenté par l’employeur, les organismes de formation et le salarié.

[25]Passeport de prévention, Propositions des partenaires sociaux au CNPST, Version du 12 juillet 2022.

[26]Décret nº 2022-882 du 13 juin 2022 relatif à l'appréciation de la représentativité des organisations professionnelles de plateformes.

[27] Un arrêté du 24 juin 2022 fixe la liste officielle des organisations représentatives au niveau national des travailleurs des plateformes dans le secteur des Voitures de Transport avec Chauffeur (VTC) : l’Association des VTC de France (AVF) (poids pour la négociation : 42,81 %), Union-Indépendants (11,51 %), l’Association des chauffeurs indépendants lyonnais (Acil) (11,44 %), FO (9,19 %), la Fédération nationale des autoentrepreneurs et microentrepreneurs (Fnae) (8,98 %), la CFTC (8,84 %) et l’Unsa (7,23 %). Un autre arrêté publié à la même date fixe la liste officielle des organisations représentatives au niveau national dans le secteur de la livraison de marchandises : la Fédération Nationale des autoentrepreneurs et microentrepreneurs (Fnae) (33,97 %), la CGT (32,58 %), l’UNION-Indépendants (26,66 %) et la Fédération SUD commerces et Services (SUD Commerces) (6,79 %).

[28] Arrêté du 25 juillet 2022 relatif à l'indemnisation des représentants des travailleurs des plateformes versée au titre de leurs formations et de leurs missions de représentation, ainsi qu'à la rémunération des organismes de formation par l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi.

[29] Décision n° 2021-947 QPC du 19 novembre 2021.

[30] En raison des attributions qui leur ont été déléguées, ou qui représentent l’employeur devant les instances représentatives du personnel.


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