L’état du dialogue social en 2024 : un regain d'intérêt pour l'action du CSE

Instances repésentatives du personnel

- Auteur(e) : Evdokia Maria Liakopoulou

Dans un contexte social marqué par la reforme des retraites, les contraintes inflationnistes et le cycle de renouvellement des comités sociaux et économiques (CSE), les représentants du personnel se montrent plus déterminés et motivés. A cet état d’esprit s’alignent sept salariés sur dix. Tels sont les principaux enseignements tirés de la 6ème édition du baromètre Syndex/Ifop 2024[1] sur l’état du dialogue social en France, publié le 23 janvier 2024.  

  • Malgré les difficultés constatées par les acteurs, l’image du CSE s’améliore considérablement

Dans cette nouvelle édition du baromètre, les salariés et leurs représentants expriment un avis plus positif à l’égard du CSE. En 2023, l’état d’esprit des représentants du personnel s’avère beaucoup plus amélioré, caractérisé par une plus forte détermination (67% des sondés) et motivation (65%). Les salariés se trouvent sur la même longueur d’onde, car ils sont 71% à avoir une bonne image de leur CSE, « le meilleur score jamais mesuré ». Le contexte de la reforme des retraites et d’élections professionnelles a pu y jouer favorablement : 26 % des salariés estiment que la mobilisation contre la réforme des retraites a eu un impact positif sur l'image du CSE, 59 % déclarent avoir voté aux dernières élections et 62% se montrent intéressés par l’action du CSE.

Néanmoins, des problématiques persistent, voire se multiplient. Ainsi, l’inquiétude des répondants demeure importante et atteint 51%. Les représentants du personnel pointent de façon beaucoup plus marquée les inconvénients qui touchent l’action du CSE : un affaiblissement du poids des représentants du personnel face à celui de la direction depuis la mise en place du CSE (pour 41% d’entre eux) ; des ordres du jour trop chargés avec un manque de place accordée aux sujets de fond (pour 39% d’entre eux) ; un manque d'attractivité de la fonction (36%) ; une prise en compte insuffisante de la santé au travail (28%), ou même une absence de renégociation récente des moyens du CSE (pour près de 70%). Plus alarmant encore, la difficulté pour le CSE de recruter de nouveaux membres demeure une réalité selon 93% des représentants du personnel.

Compte tenu de ces constats les élus plaident pour un renforcement du poids des avis émis par le CSE (82%), un dialogue social au plus près du terrain (67%), et des réunions de CSE recentrées sur les sujets les plus importants (65%).

  • Des regards diversifiés vis-à-vis du dialogue social

Concernant l’évaluation de la qualité du dialogue social, un écart toujours marquant se constate entre, d’un côté les directions et les salariés et leurs représentants de l’autre. Les chiffres sont parlants : si les directions octroient une note moyenne de 7,7/10, les salariés et leurs représentants se montrent beaucoup plus réservés, en attribuant respectivement 5,8/10 et 5,2/10.

La direction et les représentants du personnel se partagent entre formalisme et proximité avec le terrain. S’ils s’accordent à dire que la confiance entre les acteurs du dialogue social et l’information constituent les ingrédients majeurs d’un dialogue social de qualité, leurs avis sont diamétralement opposés s’agissant la prise en compte des revendications des représentants du personnel (revendiqué par 68% des élus, contre 60% des directions), le respect de la législation (par 77% des directions, contre 63% des élus) ou même les moyens alloués pour le dialogue social (32% des directions, contre 59% des élus).

  • Entre nouveaux et anciens sujets de traitement prioritaire par le CSE

Le traitement des sujets de la santé et risques psychosociaux et des conditions de travail occupe toujours une place prioritaire tant pour les représentants du personnel (92%) que pour les salariés. Les directions confirment cette priorité, mais elles sont plus négligentes envers la pénibilité : seuls 26% des représentants du personnel et 47% des salariés considèrent que la direction en a une conscience suffisante.

L’autre sujet prioritaire traditionnel, celui des rémunérations et du pouvoir d’achat, préoccupe 86% des élus et 77% des salariés. Au contraire, seuls 53% des dirigeants traitent ce sujet comme prioritaire. L’écart se concrétise au niveau de la problématique du partage de la valeur dans l’entreprise et des moyens pour l’atteindre : « alors que les salariés et leurs représentants privilégient les hausses de rémunération, les directions préfèrent mixer fixe et variable ».

Au contraire, les nouveaux sujets de l’intelligence artificielle et de la nouvelle prérogative environnementale du CSE peinent à s’installer dans l’esprit des acteurs. Seuls 10 % des représentants du personnel, 14% des salariés et 6% des directions considèrent l’intelligence artificielle comme un sujet prioritaire. Seul un élu sur quatre considère que le CSE s’est emparé de sa nouvelle prérogative environnementale. Au contraire, la semaine de 4 jours semble susciter plus d’intérêt tant pour les représentants du personnel (79% la plébiscitent) que pour les salariés (75%), avec pourtant une certaine réticence de la part des dirigeants (42%). In fine, dans la foulée de la récente reforme des retraites, le sujet des seniors en entreprise n’a donné lieu qu’à peu de nouveaux dispositifs d’accompagnement des fins de carrière, à l’exception du compte épargne-temps (constaté par 58% des élus), du télétravail (41%) et de la retraite progressive (39%).

 

Vous trouverez, ci-après, l’intégralité du 6e baromètre Syndex-Ifop, État du dialogue social en France. Le regard des représentant·es des salarié·es, des directions et des salarié·es, janvier 2024.

https://www.syndex.fr/actualites/actualite/les-resultats-de-notre-enquete-syndex-ifop-sur-letat-du-dialogue-social-en-1

[1] L’enquête a été réalisée par l’Ifop pour Syndex auprès de 1 420 représentants des salariés, 1 300 salariés et 401 chefs d’entreprise et DRH, via un questionnaire auto-administré entre octobre et novembre 2023. Cette phase quantitative a été complétée par des entretiens qualitatifs avec des représentants du personnel.