La possibilité de la modification de l’ordre du jour des réunions du CSE par unanimité en début de séance

Instances repésentatives du personnel

- Auteur(e) : Altina POTOKU

L’ordre du jour du CSE est un document qui rassemble l'ensemble des points qui seront abordés au cours de la réunion du CSE, afin de permettre aux participants d’examiner les questions à l’ordre du jour et d’y réfléchir. Il est communiqué aux élus et aux représentants syndicaux au moins trois jours avant la séance et s’agissant pour le CSE d’entreprise ou d’établissement (C.trav., art L.2315-30), ou huit jours avant pour le CSE central (C.trav., art.L.2316-17).

Le non-respect du délai constitue un délit d’entrave au fonctionnement régulier du comité d’entreprise.

 

La chambre criminelle de la Cassation dans un arrêt du 13 septembre 2022, répond à la question de savoir si une question qui n’est pas inscrite à l’ordre du jour de la réunion du CSE peut être traitée dès lors qu’elle a été ajoutée en début de séance à l’unanimité des membres élus présents.

En l’espèce, le comité central d'entreprise (CCE) avait donné mandat à son secrétaire d'exercer des poursuites correctionnelles pour entrave à son fonctionnement alors que cette délibération n'avait pas été préalablement inscrite à l'ordre du jour de la réunion du comité et qu’elle ne présentait aucun lien avec les questions devant être traitées.

La société prévenue considérait que l’action du comité était irrecevable, car le point n’était pas prévu à l’ordre du jour communiqué aux membres de l’instance avant la séance, lesquels n’étaient pas tous présents lors de la réunion. Elle a assigné devant le tribunal correctionnel le comité central de l'entreprise. Par un jugement du 27 juin 2018, le tribunal a rejeté les exceptions de nullité relevées par la société et de l’irrecevabilité de la constitution de la partie civile du comité central d’entreprise. La société prévenue interjette appel devant la cour d’appel. L’arrêt rendu par les juges de fond confirme le jugement du tribunal correctionnel en ce qu’il a rejeté les demandes de la société prévenue.

Les juges de fond ont retenu que lors de la réunion du comité central de l'entreprise du 1er octobre 2015, son secrétaire est intervenu en début de séance pour solliciter l'ajout d'un point à l'ordre du jour par vote. Le point en question sur lequel les participants devaient se prononcer était celui du mandat du secrétaire du CCE pour agir en justice pour entrave. La question a finalement été inscrite à l'ordre du jour car elle avait été adoptée à l'unanimité. Cependant la société prévenue a contesté la décision des juges de fond en retenant qu’il en résultait que les membres titulaires absents étaient privés de toute possibilité de s’exprimer sur ce sujet et l’action en justice du comité donc devait être irrecevable.

La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par la société en affirmant que le délai pour adresser l'ordre du jour aux membres de l'instance est « édicté dans leur intérêt afin de leur permettre d'examiner les questions à l'ordre du jour et d'y réfléchir ». Constatant que la modification de l’ordre du jour a été adoptée à l’unanimité des membres présents, et que ces derniers ont accepté de discuter de la question du mandat, la chambre criminelle écarte toute irrégularité.

  • La Cour a estimé qu’à partir du moment où les membres présents ont voté à l’unanimité et ont accepté de débattre sur la question, ils étaient suffisamment renseignés pour examiner la question du mandat.  

Les juges de la haute juridiction semblent  tenir compte de la difficulté à fixer l’ordre du jour. Cette solution est favorable aux élus, car cette pratique leur permet de s’adapter aux contraintes qui peuvent se présenter dans le laps de temps séparant la communication de l’ordre du jour de sa discussion.

Dans cet arrêt, c’est le vote à l’unanimité par tous les membres élus qui a permis d’éviter la condamnation pour délit d’entrave. C’est bien le vote à l’unanimité qui vient finalement sécuriser cette pratique, de la modification de l’ordre du jour, en début de séance.